Après le décès d'August Wilhelm Iffland fin 1814, le comte Karl von Brühl lui a donc succédé à la tête des théâtres berlinois en février 1815. Le comte Karl von Brühl étant l'une des figures centrales du débat sur la scénographie, puisque ce sont justement ses réalisations qui contribuèrent à le relancer, on comprendra que nous accordions un peu plus d'espace à sa biographie et à son travail, d'autant plus que c'est une figure moins connue en France. Certes Karl Brühl n'a pas la même importance pour le théâtre allemand qu'A. W. Iffland ou encore K. F. Schinkel, pour ne pas parler de Goethe ; mais il est un personnage intéressant pour d'autres raisons ce que nous aimerions démontrer dans les pages qui suivent.
Précisons d'emblée que le point le plus marquant, celui pour lequel K. von Brühl est mentionné dans l'histoire du théâtre allemand, est le principe de la reproduction fidèle des vêtements et lieux historiques de l'action, le principe de la "vérité historique" des costumes et des décors. Brühl était si profondément attaché à cette vérité historique, la défendant contre toutes les critiques que l'on a pu lui faire, que cet attachement suscite l'étonnement et demande des recherches plus sérieuses. Nous ne pouvons citer ici tous les ouvrages critiques qui accordent un peu de place à l'administration du comte Brühl ; nous évoquerons les titres essentiels. Pour mieux connaître l'ensemble du travail du comte Brühl comme administrateur des Théâtre Royaux, ses choix concernant le répertoire, ses relations avec les acteurs, ainsi le travail et la vie des acteurs (répétition, régie, salaires), nous disposons d'une étude très sérieuse et documentée de Marie-Luise Huebscher sur le Théâtre Royal de Berlin sous l'administration du Comte Brühl, publiée à Berlin en 1960. 132 On trouvera encore trois chapitres très complets sur l'ère Brühl dans l'ouvrage de Ruth FreydankLe théâtre à Berlin, 133 un autre ouvrage de qualité, même si son orientation idéologique transparaît dans la formulation, comme nous l'avons déjà signalé à propos d'August Wilhelm Iffland ; il est enrichi par de bonnes illustrations et documents d'époque. Concernant le travail sur la scénographie, nous devons rendre justice à la thèse d'Hermann Schaffner sur La réforme du costume sous l'administration du comte Brühl 134 qui aborde de façon très complète le travail sur les costumes, autant du point de vue pratique que de la réflexion esthétique. On se reportera à l'incontournable Histoire du théâtre européen de Heinz Kindermann pour une bonne synthèse du travail de Brühl et de Schinkel sur les costumes et la décoration. H. Schaffner surtout et H. Kindermann se sont également intéressés à la réception du travail du comte Brühl et leurs ouvrages contiennent des références à plusieurs auteurs que nous avons pu exploiter utilement pour l'étude du débat sur la scénographie.
Marie-Luise Huebscher, Die königlichen Schauspiele zu Berlin unter der Intendanz des Grafen von Brühl (1815 bis 1828), Berlin, 1960. Hannover. Phil. Diss.
Freydank, Theater in Berlin, op.cit.
H. Schaffner, Die Kostümreform des Grafen Brühl an den Königlichen Theatern zu Berlin, Köln, Institut für Theaterwissenschaft, 1926.