2. 2. 1. 2. A. W. Schlegel (1809-1811) : le "costume essentiel" : "l'esprit des temps et des peuples".

La position d'August Wilhelm Schlegel sur la question de la vérité historique dans la scénographie théâtrale n'est pas aussi simple que la critique l'a parfois affirmé 445 en le plaçant dans l'un ou l'autre camp, parce que l'on n'a pas fait assez la différence entre ses réflexions au sujet du décor ou du vêtement de scène historique et celles qu'il consacre au sujet du respect de la vérité historique dans le domaine de l'art. S'il apparaît, dans son évaluation d'exemples concrets de costumes, que Schlegel n'est pas un adversaire acharné de la vérité historique sur la scène théâtrale, le ton de ses propos théoriques sur l'art est bien différent. Nous pensons qu'il est possible de résoudre cette apparente contradiction en parcourant les passages concernés avec attention et en les replaçant leur contexte.

Tout d'abord, il semble qu'il existe peu d'affirmations de Schlegel sur la vérité historique appliquée aux décors (contrairement au thème de la richesse des décors, contre laquelle, on l'a vu, Schlegel élève distinctement la voix). En revanche, il est fait plusieurs fois mention d'habits historiques ou non historiques dans les critiques théâtrales rédigées en 1802, ou encore dans les Cours sur l'art et les Cours sur l'art et la littérature dramatique. En réalité, il est plus juste de dire que Schlegel a abordé et développé à plusieurs reprises la question du respect de la vérité historique dans les œuvres d'art et dans les textes littéraires, mais de façon plus succincte pour les habits de scène. Les positions de Schlegel n'en demeurent pas moins fort intéressantes, mais nous aimerions clarifier ce point.

L'origine de la confusion se trouve sans doute dans les termes employés par Schlegel. En effet, lorsque nous voyons revenir plusieurs fois le terme de "costume" (das Costum [sic]) dans l'ensemble des cours sur l'art et la littérature, notamment dans les cours sur l'art dramatique, le contexte nous indique que Schlegel ne l'emploie généralement pas dans le sens de "costume de théâtre", mais dans un sens plus large, encore en usage à cette époque 446 , un sens très proche de son sens étymologique (cf. son origine italienne costume), c'est-à-dire "coutume", "mœurs", "traditions", et ce dans différentes activités humaines (dont le vêtement constitue certes une partie importante et des plus visibles). Schlegel introduit même une distinction fondamentale entre un costume "extérieur" ou "superficiel" (äußerliches Kostüm) que sont les faits historiques, et un costume "essentiel", plus profond (wesentliches Kostüm) qui est, selon ses propres mots, "l'esprit des temps et des peuples" (der Geist der Zeiten und Völker) qui évoque les notions de mentalité, spiritualité, identité. Or, c'est peut-être là ce que Schlegel demande tant au vêtement de théâtre qu'à une présentation de l'histoire : de dire, de montrer quelque chose de "l'esprit" du personnage ou d'un événement, et il nous faut préciser cette notion.

Mais il est vrai que la démonstration de Schlegel n'est pas toujours limpide, d'abord parce qu'il emploie lui-même le terme de costume dans plusieurs sens, et parce qu'il introduit des exemples tirés de l'histoire du théâtre au sein d'une argumentation sur le respect du "costume" (c. à d. de la vérité historique) dans les œuvres d'art plastique, ou encore parce que les exemples choisis dans sa diatribe contre l'exigence de vérité historique dans l'art en général parlent du vêtement des figures représentées. Déduire la position de Schlegel sur le costume (vêtement de scène) de ses réflexions théoriques sur le "costume" (la vérité historique) s'avère donc être une démarche délicate. Nous avons choisi de présenter d'abord les indications concrètes que nous possédons du regard d'August W. Schlegel sur le costume de scène (historique). Dans un deuxième temps nous présenterons les réflexions théoriques de Schlegel au sujet du respect de la vérité historique, et ce, pour les raisons suivantes : les propos de Schlegel doivent être évoqués parce qu'ils ouvrent  en théorie  de nouvelles perspectives dans le domaine de l'art, du théâtre et de la scénographie et parce qu'ils trouvèrent un écho auprès des contemporains de l'auteur. Ils nous permettent de mieux comprendre la position des Romantiques en général face aux questions posées par la scénographie et, par effet de contraste, les conceptions auxquelles ils s'opposent. Ce chapitre nous permet également de préciser la position de Schlegel sur le vêtement de scène et sa fonction en général.

La position de Schlegel sur le costume historique et le costume de scène en général.

Dans la pratique, August Wilhelm Schlegel semble apprécier l'authenticité des costumes. Il est vrai que les affirmations que nous possédons concernent surtout les costumes de la Grèce et de la Rome antique ; et nous manquons d'informations pour les autres cas. Certes nous constatons aussi qu'il comprend les cas où l'histoire n'a pas été respectée parce que les costumes ont été choisis dans un autre esprit que celui du réalisme. Le choix d'un costume historique est pour lui un choix esthétique (pour sa beauté, son bon goût), voire dramaturgique (pour les informations qu'il transmet dans le cadre de la représentation, et qui peuvent aller bien plus loin que la simple identification du personnage, qui peuvent même être des informations sur un groupe de personnages, sur l'action etc.).

Une série de critiques théâtrales 447 de représentations données entre 1802 et 1803 aux Théâtres Royaux de Berlin nous livre la réaction de l'auteur face à des réalisations concrètes de costumes, décors, etc. Dans la critique de Rodogune (une adaptation de la pièce de Corneille), il vante le costume de l'envoyé des Parthes, déterminé par des spécialistes :

‘[…] on voyait très bien qu'un connaisseur éclairé de l'Antiquité, M. Hirt, et un artiste honnête, M. Hummel, avaient prodigué leurs conseils pour ce costume, ainsi que pour l'habit de Rodogune, et des instructions analogues eussent été souhaitables pour celui de la Reine [Cléopâtre]. 448
Rodogune dans la tragédie du même nom.
Rodogune dans la tragédie du même nom.

Costumes du Théâtre National et Royal de Berlin [Iffland…], 1802. N° 9.

Schlegel semble plutôt apprécier que le costume soit déterminé avec exactitude par des connaisseurs. Il nous paraît donc exagéré de présenter Schlegel comme un opposant virulent à la vérité historique des costumes. Dans la critique du Regulus d'Heinrich von Collin, Schlegel souligne même les quelques erreurs du costume, par exemple la bordure rouge des toges ou le choix d'une toge rouge pour le personnage du consul. Pour la représentation à Weimar et à Berlin de son drame Ion, une reprise d'un sujet antique, Schlegel fait dessiner les costumes par le sculpteur Friedrich Tieck dans un style grec tout à fait authentique dans leur forme et leurs motifs. Dans une description de représentations privées données par Madame de Staël, il fait l'éloge d'un costume antique authentique choisi par la comédienne amateur pour le rôle de Phèdre. 449 Schlegel loue la simplicité de la coupe, la beauté naturelle des plis, des mouvements du tissu qui accompagnent la gestuelle harmonieuse et émouvante de l'interprète. Mais ces derniers exemples révèlent également le goût particulier de Schlegel pour le vêtement antique, et on en déduit que l'éloge des costumes historiques procède tout autant d'une recherche esthétique. Dans un autre texte, Schlegel semble apprécier la vérité historique dans la scénographie. Il s'agit d'un passage du 32ème chapitre du Cours sur l'art et la littérature dramatique (1809-1811), un passage dans lequel il évoque l'évolution du costume de scène depuis le XVIIe siècle. Schlegel, dans ce passage, se moque d'abord du costume de la fin du XVIIe siècle et du début du XVIIIe (plusieurs passages du Cours signalent effectivement qu'il n'apprécie pas ce style) :

‘Maintenant on est enfin revenu à un goût plus pur, dans certains des plus grands théâtres le costume est vraiment enseigné et rigoureusement respecté. 450

Il ajoute, un peu ironiquement, que cette situation est due à la mode de la vérité historique dans les arts, et aux modes féminines nouvelles qui se rapprochent des vêtements antiques. Schlegel regrette par ailleurs que les acteurs ne sachent pas porter dignement les vêtements historiques, mais reconnaît aussi la difficulté que ces costumes impliquent pour le jeu, qu'ils peuvent entraver. L'éloge de l'authenticité des costumes se comprend évidemment aussi dans la perspective du rejet de la richesse (baroque) des vêtements de scène, qui détourne l'attention du spectateur. Dans les passages où il aborde la question de la richesse de la scénographie, Schlegel, on l'a vu, formule un idéal de simplicité. Quand la vérité historique permet cette simplicité, cette sobriété, elle n'est pas à rejeter. La raison pour laquelle Schlegel apprécie tant le vêtement antique, est peut-être sa simplicité. Une telle conception n'est pas sans rappeler la caractérisation de l'art grec donnée par Winkelmann : une "noble simplicité et calme grandeur" (Edle Einfalt und stille Größe). On perçoit ici l'admiration de Schlegel, qui, avec son frère Friedrich Schlegel, était d'abord un connaisseur de l'Antiquité avant d'être un Romantique.

Schlegel, comme le signale déjà Edgar Gross dans son étude sur les Romantiques allemands et le théâtre, 451 fustige aussi plusieurs fois dans les critiques les costumes ridicules et mal choisis par les acteurs. Dans la critique de Rodogune citée plus haut, il tourne en dérision le costume de la reine Cléopâtre qui a choisi une robe noire ou bleu marine, sur laquelle elle a ajouté une jupe rouge relevée sur le devant, et un châle jaune-brun (en drap de laine, donc chaud et lourd) fixé sur la tête par un diadème.

‘Ce n'est pas le choix de couleurs sombres correspondant au caractère qu'il faut blâmer, mais ainsi associées elles étaient tout à fait disharmonieuses, et la coupe des vêtements était erronée et défigurante. Peut-on s'étonner alors du fait que la reine, avec la chaleur du climat qui règne là-bas en soit dérangée et en vienne à faire des projets insensés ? 452

On constate d'abord dans cet extrait que Schlegel approuve l'idée d'une présentation du personnage par la couleur ; nous reviendrons ci-dessous sur ce point. Dans un deuxième temps il se moque de la forme du vêtement ; et l'on voit bien qu'un parti-pris esthétique détermine son jugement, même si le terme "erroné" n'exprime pas clairement s'il s'agit d'une erreur scientifique ou d'une faute de goût. 453

Les critiques théâtrales nous indiquent encore que Schlegel exige du costume de scène qu'il soit adapté au rôle. "L'esprit du rôle était complètement déformé", reproche-t-il à une actrice pour le choix de son costume dans le drame Rollas Tod. 454 Dans la critique de Regulus, Schlegel reconnaît que le choix, certes erroné, de la toge rouge du consul a le mérite de faire ressortir le personnage au milieu du grand nombre de toges blanches. En disant cela, il renonce à l'exigence d'une authenticité rigoureuse, et la fonction dramaturgique du costume l'emporte sur le respect de l'histoire ou sur le réalisme. Plus précisément : par fonction dramaturgique nous entendons tout ce qui dans le costume donne des renseignements soit sur le statut du personnage, son caractère, voire son rôle dans la pièce, ou même (mieux) sur l'action tout entière. On en a un exemple simple dans le choix de la couleur sombre du costume de Cléopâtre, 455 auquel Schlegel donne d'ailleurs son accord. Mais tous ces éléments n'ont pas la même valeur pour Schlegel, qui privilégie les indications sur le caractère, les sentiments d'un personnage, les rapports de force, l'atmosphère d'une pièce. Schlegel se différencie d'Iffland qui travaille sur la fonction dramaturgique du costume en soignant les règles de bienséance et plus particulièrement l'indication du rang du personnage. Nous avons vu qu'Iffland se plaça délibérément du côté du réalisme. Schlegel, dans les cas où le non-respect de la réalité (de l'Histoire) contribue à renforcer la fonction dramaturgique du costume, privilégie le non réalisme plutôt que le réalisme. Mais il existe aussi des exemples où Schlegel reconnaît l'intérêt du respect de la vérité historique pour enrichir la fonction dramaturgique du costume. Schlegel cite un exemple qui lui plaît, et il est encore tiré de la pièce Regulus :

‘Le costume de Bodostor, l'envoyé d'une nation riche, mais barbare, créait un excellent effet de contraste avec la grandeur de la simplicité romaine, qui ne tolérait point d'enjolivures dorées, mais seulement des tissus de laine. 456
Valerius, un sénateur. Bodostor, envoyé de Carthage.(dans la tragédie Regulus d'Heinrich von Collin)
Valerius, un sénateur. Bodostor, envoyé de Carthage.(dans la tragédie Regulus d'Heinrich von Collin)

Costumes des Théâtres Nationaux et Royaux de Berlin […], 1802. N° 31 et 32.

Le respect de l'Histoire intéresse Schlegel ici parce qu'il produit un sens plus profond, le contraste entre deux nations, l'une civilisée, l'autre barbare. Bien sûr on a l'impression que c'est plus l'effet créé qui intéresse Schlegel que la vérité historique du costume. Ici, le costume historique est réussi parce qu'il parle de "l'esprit des peuples", du "costume essentiel". Schlegel semble d'accord avec le respect de la vérité historique toutes les fois où elle apporte quelque chose à l'action dramatique.

Nous pouvons tenter de préciser quelle est cette fonction dramaturgique que Schlegel accorde au costume, voire au décor. Nous l'avons vu, Schlegel souhaite que le costume (historique ou non) dise des choses essentielles sur le personnage ou sur l'action. Cette idée nous est confirmée par le travail effectué par Schlegel sur la "mise en scène" de son drame Ion prévue à Weimar et à Berlin en 1802. Cette expérience est hélas restée unique. Schlegel se concerta avec Goethe sur tous les aspects de la représentation, notamment sur les décors. Tous deux avaient convenu qu'ils devaient être en rapport avec l'action. Pour la représentation de Berlin, l'architecte Hans Christian Genelli peignit une aquarelle très détaillée selon les instructions de Schlegel, dans laquelle l'architecture, les ombres, la végétation étaient agencés en fonction de l'action, qu'ils commentaient. Ce décor à la fois très authentique et idéalisé était donc empli de symboles, et transmettait message philosophique, en lien avec le sujet. De même un travail eut lieu sur la couleur des costumes (qui ne fut pas toujours respecté par les comédiens). 457 Pour cette expérience d'Ion, on voit donc que Schlegel a choisi une scénographie à la fois réaliste et pleine de symboles, elle devait exprimer le sens profond, "l'esprit" (der Geist) de la pièce. On peut encore poser la question du jugement de Schlegel sur la caractérisation (hyper)réaliste très souvent pratiquée par Iffland dans le jeu et le costume. Pour Schlegel, cette caractérisation risque d'être trop superficielle ; elle donne de nombreux éléments sur un personnage, mais ne dit pas l'essentiel. Nous pensons ici à un passage des dernières pages du Cours sur l'art dramatique (37ème cours) où il est question du drame bourgeois (Familiengemälde) et de l'œuvre dramatique d'Iffland. Schlegel pense que les drames bourgeois (familiaux) sont pauvres en action.

‘[…] afin de pallier ce manque de mouvement, on aura recours à une caractérisation individuelle, qu'un acteur exercé peut mener à un certain degré de vérité, mais qui reste collée aux choses superficielles, de la même manière qu'un portraitiste médiocre cherchera à atteindre une ressemblance par les verrues et les marques de la petite vérole, et par la manière de s'habiller et de nouer le foulard. 458

Nous reconnaissons que la citation ne concerne pas le vêtement de scène (mais un genre pictural particulier, le portrait), mais elle nous semble quand même bien expliquer pourquoi Schlegel ne penche pas vers la caractérisation pratiquée par Iffland qu'il trouve trop "mesquine" (kleinlich), trop prosaïque. Par cette remarque Schlegel touche aussi du doigt le problème que nous évoquions plus haut des limites d'une reproduction réaliste qui doit s'en tenir à des détails individuels, au contraire d'un travail non réaliste qui offre plus de possibilités d'expression. Schlegel semble tout de même plus pencher vers l'emploi de symboles (par la couleur, les objets, les plantes, l'éclairage) que vers une reproduction scientifiquement vraie, mais cela ne l'empêche pas de louer une décoration réaliste, historique, si elle sert l'objectif d'exprimer "l'esprit" de l'oeuvre. Ici nous retrouvons tout à fait la réflexion théorique de Schlegel sur le respect de l'Histoire dans l'art en général, comme nous le verrons dans un instant. Le rapprochement entre pratique du costume et réflexion théorique sur la vérité historique dans l'art peut alors se faire, cette fois sans contradiction.

Edgar Gross écrit encore à propos de Schlegel dans Die ältere Romantik und das Theater :

‘C'est ainsi que son penchant pour le style classique le conduit, à l'encontre de son abnégation exprimée dans les "Cours", vers une exactitude presque érudite, au moins en ce qui concerne le costume antique. 459

L'idée d'une recherche d'exactitude érudite par Schlegel nous paraît tout à fait inexacte : dans ses critiques théâtrales, Schlegel est l'intellectuel cultivé qui regarde avec une certaine condescendance le manque de culture des comédiens, et même du directeur Iffland. En revanche l'idée d'un goût classique chez A. W. Schlegel nous semble plus juste. Pourtant Hermann Schaffner, qui place Schlegel parmi les opposants au costume historique, contredit E. Gross et propose encore une autre hypothèse concernant l'attention accordée au costume antique :

‘En effet, ce n'est pas le vêtement antique qui l'intéressait, mais le costume de théâtre antique. Il ne part pas de l'idée de l'authenticité historique, mais d'une idée esthétique, c'est-à-dire de l'effet de contraste du costume, qui constituait le fondement du costume de scène antique. 460

Il ajoute dans une note, reprochant à Gross de ne pas avoir vu que Schlegel parlait de costumes de théâtre et non de traditions vestimentaires :

‘Même si les costumes étaient historiquement exacts, ils procédaient d'abord d'une idée esthétique au côté de laquelle l'authenticité historique jouait seulement un rôle secondaire. 461

Ce que Schaffner désigne par "l'idée esthétique" est ce que nous appelons la fonction dramaturgique. Les deux interprétations ne sont peut-être pas contradictoires si l'on pose premièrement que Schlegel ne recherche en aucun cas l'authenticité pour elle-même ou pour un étalage d'érudition et deuxièmement que Schlegel est un passionné du théâtre de la Grèce antique. L'idée de Schaffner d'un intérêt pour le costume de théâtre antique nous paraît intéressante également dans le cas de la préparation des représentations d'Ion, dans la mesure où nous savons que l'architecte Hans Christian Genelli, qui secondait Schlegel, était l'auteur de recherches très poussées sur le théâtre des Grecs. Ion aurait été pour Schlegel une sorte d'expérimentation théâtrale, une tentative de faire revivre le théâtre antique (dans des conditions difficiles, étant données les pratiques théâtrales de l'époque).

Mais encore une autre idée sur le costume apparaît, dès fin 1801, dans les Cours sur les Beaux-arts, dans le chapitre consacré à la peinture et au respect de la vérité historique justement. Elle est liée à l'évocation de Shakespeare.

‘A l'époque de Shakespeare, on pouvait représenter son Jules César dans les vêtements de l'époque, comme cela s'est produit sans conteste, et personne ne s'en offusquait ; aujourd'hui cela ne serait plus possible. 462

L'affirmation sonne déjà plus comme un regret. Elle doit servir à démontrer que le respect de la vérité historique dans les arts n'est pas une nécessité. Dans cet exemple, que Tieck reprendra dans ses Dramaturgische Blätter en 1826, on trouve déjà cette idée d'une liberté possible par rapport aux contraintes qu'impose le respect de la vérité historique, dans le domaine de l'art, mais aussi dans la scénographie.

La position de Schlegel sur la vérité historique dans les arts.

La réflexion théorique d'August Wilhelm Schlegel sur la question du respect de la vérité historique dans les oeuvres d'art en général est exprimée dans Cours sur les Beaux-arts (automne 1801) plus particulièrement au sujet des arts plastiques et dans Cours sur l'art et la littérature dramatique (1808-1811) au sujet des œuvres littéraires et de l'art en général. Les passages les plus importants que nous voulons évoquer ci-dessous se trouvent respectivement dans le chapitre consacré à la peinture et dans le 26ème chapitre des cours sur l'art dramatique. En fait, les idées et les exemples développés dans les cours sur l'art ont été repris parfois textuellement quelques années plus tard dans les conférences sur l'art dramatique. Dans les deux cas, le contexte des extraits est très important.

Dans le chapitre du Cours sur les beaux-arts consacré à la peinture, Schlegel passe en revue et commente les différents genres : nature morte, peinture de paysages, portrait, peinture d'histoire. C'est ainsi, en abordant la peinture d'histoire (qu'il faut comprendre au sens large, c'est-à-dire tout sujet non contemporain, sujets mythologiques et bibliques compris), qu'il en vient à débattre du respect de la vérité historique, du "costume" dans les œuvres d'art. Ce faisant, Schlegel entre dans des débats esthétiques plus anciens apparus au XVIIe siècle en France puis poursuivis au long du XVIIIe siècle, que l'on peut formuler en substance de la façon suivante : Faut-il respecter strictement dans une œuvre d'art l'architecture, la végétation, le coloris, les vêtements des personnages tels qu'ils sont ou étaient à l'époque à laquelle se situe le sujet de l'œuvre ? Les représentants du style classique français choisirent le respect du costume 463 , parmi eux Nicolas Poussin (1594-1665) et Claude (Le) Lorrain (1600-1682). Mais, explique Schlegel, voilà que les Français "rejetèrent sans faire de distinction les tableaux qui étaient excellents par ailleurs, dès lors qu'ils pèchent contre le costume" 464 . Or, pour lui les tableaux respectueux du costume sont "froids" et "glacés" (kalt, frostig), comme Poussin est un peintre froid (kalt), manquant de génie (genielos) et savant (gelehrt), trois caractéristiques à l'opposé de la conception de l'artiste romantique. Schlegel estime que le jugement sévère des Français est dû à leur exigence de vraisemblance. Le respect du costume rend plus vraisemblable ce qui est représenté. Schlegel exprime son mépris pour une telle appréhension de l'art.

Cette vraisemblance ne peut avoir une telle importance que pour ceux qui s'avancent sans imagination et avec un cerveau raisonnant vers la contemplation d'une œuvre d'art. 465

Ce manque d'imagination que reproche Schlegel à l'observateur trop rationaliste et à l'artiste sans génie, est un thème récurrent de l'esthétique romantique, qui nous paraît revenir sous la plume d'autres auteurs au sujet du théâtre, notamment au sujet de l'illusion théâtrale produite par la scénographie. L'appel à l'imagination du spectateur, déjà lancé par Tieck, revient en 1810 dans un article anonyme des Berliner Abendblätter. La vérité historique de la scénographie, le réalisme, la copie de la nature tuent l'imagination. De telles affirmations éclairent évidemment différemment l'évaluation des pratiques scéniques et expliquent le scepticisme des Romantiques et de ceux qui leurs sont proches face au respect de la vérité historique sur la scène. Schlegel poursuit sa réflexion sur la peinture d'histoire :

‘J'ai déjà défini précédemment le costume dans l'art comme une extériorité caractéristique. En effet, que m'importent les vêtements, armes, ustensiles, habitations etc. que telle ou telle nation a eu à une époque donnée, si cela ne m'apprend pas à mieux comprendre l'esprit des hommes en lien avec l'Histoire représentée. Or, il est certes vrai que les hommes, sauf intervention de perturbations imprévues, se sont toujours exprimés eux-mêmes par la manière dont ils se constituaient leur environnement ; cependant pour nous [le] montrer, l'artiste doit s'y être immergé ; de cette façon la sèche information deviendra pour lui matière poétique, et il ne va pas ressortir indifféremment tout ce qu'il sait du costume, mais au contraire il créera un lien vivant entre un aspect du costume et l'essence de sa présentation. 466

On trouve déjà ici en résumé la pensée de Schlegel, qui sera reprise vers 1809-11 dans les cours sur l'art dramatique, mais on trouve également des concepts chers à l'ensemble des auteurs romantiques. Il est intéressant de voir que Schlegel reconnaît les possibilités d'expression du vêtement, des éléments du décor. On ne peut dire que les éléments historiques doivent être éliminés, mais Schlegel leur attribue une fonction, celle de transmettre une information qui doit être de nature plus profonde, plus "intérieure", sur laquelle il insiste parce que cette information sera alors véritablement poétique. On comprend bien le désir de Schlegel, le désir que cette attention à la réalité historique ne devienne pas une exposition d'antiquités… (ce qu'il réaffirme avec force quelques années plus tard dans le Cours sur l'art et la littérature dramatique). Le spectateur romantique aspire à trouver une spiritualité en plus d'une reproduction mimétique du réel. L'artiste, lui, devra entrer dans cette vie passée, s'en imprégner. Il lui est demandé de faire un choix, de ne pas adopter une attitude objective (celle de la vérité historique), mais subjective donc  une autre revendication des Romantiques. Schlegel réaffirme la distinction romantique entre vérité et vraisemblance, entre intérieur et extérieur, entre poésie et prosaïsme, au profit des premiers termes.

Le passage des Cours sur l'art dramatique consacré à la vérité historique dans l'art est sans conteste plus virulent. Il se trouve dans l'un des premiers chapitres consacrés à Shakespeare. Une nouvelle fois le contexte du passage auquel nous faisons référence est significatif, et donne une couleur particulière aux propos de Schlegel. L'entreprise de Schlegel est de réhabiliter Shakespeare, de réduire à néant une fois pour toutes les nombreuses critiques que l'on a faites à l'homme comme à l'œuvre. Schlegel s'engage donc dans un débat littéraire. Il recense les critiques faites à Shakespeare pour les reprendre l'une après l'autre, les contredire, en montrer l'absurdité. C'est ainsi qu'il s'échauffe contre l'argument du manque de culture (Bildung), de savoir (Gelehrsamkeit) du poète et des inexactitudes et anachronismes présents dans son œuvre. La distinction entre l'extérieur et l'intérieur (la vérité historique comme "extériorité caractéristique") que Schlegel faisait déjà, comme nous venons de le voir, en 1801 à propos des œuvres d'art, est appliquée maintenant à l'exemple de la littérature et plus particulièrement aux œuvres dramatiques. C'est à cet endroit que Schlegel effectue la distinction entre ce qu'il appelle le "costume essentiel" et le "costume extérieur".

Shakespeare a visé juste quant au costume essentiel qui est l'esprit des époques et des peuples, les critiques d'art anglais, tout au moins, le reconnaissent fréquemment ; quant au costume extérieur, on peut facilement relever toutes sortes d'inexactitudes. 467

Schlegel interrompt ensuite l'étude du cas de Shakespeare pour insérer une digression, une réflexion générale sur le respect du "costume" dans les textes et dans l'art en général.

‘Une remarque générale sur le costume dans l'art n'est pas ici déplacée. Jamais on ne l'a étudié avec autant d'exactitude qu'aujourd'hui ; l'art est devenu une pédantesque foire aux antiquités. Cela tient au fait que nous vivons dans un siècle d'érudition et de critique, mais nullement de poésie. 468

L'expression "foire aux antiquités" (Antiquitätenkrämerei)  l'image ne manque pas de force , qualifiée de surcroît de pédanterie est extrêmement péjorative et méprisante. Un peu plus bas, Schlegel poursuit en déclarant avec amertume que les artistes et les écrivains sont maintenant des sortes de valets qui doivent revêtir la livrée de l'Histoire pour se faire accepter. Schlegel pense à des productions précises (un répertoire oublié aujourd'hui), issues d'une évolution récente de l'art ou de la littérature. Le Regulus, une pièce pour laquelle l'auteur H. von Collin effectua des recherches historiques, en est un exemple ; nous le savons par la critique théâtrale rédigée par Schlegel en 1802. 469 Le drame Octavia d'A. von Kotzebue en est sans doute un autre  nous renvoyons aux didascalies très précises, voire érudites, rédigées par Kotzebue pour indiquer le vêtement antique des personnages. 470 Dans ce cas, c'est bien une querelle littéraire qui dicte les propos de Schlegel, l'opposition des Romantiques à certains auteurs à succès de l'époque (nous pensons à A. v. Kotzebue) dont il serait intéressant de préciser les prises de positions sur Shakespeare. Heinz Kindermann qui range Schlegel dans le camp de ceux "qui réclament expressément une stricte vérité des costumes (de scène)", cite justement la dernière phrase de l'extrait que nous avons choisi 471  : si Kindermann, paradoxalement, n'a pas tout à fait tort, puisque Schlegel dans la pratique ne rejette pas les costumes historiques, il nous faut tout de même nuancer son propos ; le choix de la citation était peu judicieux. En effet, outre le fait qu'il n'est pas question du costume de scène, la constatation de Schlegel sur l'aspect scientifique de son époque exprime le grand regret d'un manque de "poésie" qui empêche les écrivains de trouver l'inspiration dans les temps modernes. Cette soif d'une poésie que les Romantiques ne trouvent plus dans leur époque est l'une des causes de leur mal-être, de leurs révoltes. La digression de Schlegel se termine par le regret de l'impossible retour en arrière et la notion de liberté dans la création :

‘Il nous est hélas impossible de revenir à ce mode de pensée naïf qui s'en tient uniquement à la vérité intérieure de la représentation sans s'offusquer d'éventuels anachronismes et d'autres erreurs superficielles ; mais force nous est d'envier les écrivains auxquels s'offrait ce mode de pensée : il leur laissait une grande latitude, une grande liberté dans le maniement de leur sujet. 472

Schlegel souligne, en terminant cette digression, un aspect important : celui de la liberté de l'artiste face aux données du réel. Derrière le regret apparaît l'aspiration à cette liberté de l'auteur, contre la tyrannie du réel dans la création. On y voit aussi une protestation contre la tyrannie des règles, qui engendrent un jugement esthétique négatif sur de grandes œuvres comme celles de Calderon et de Shakespeare, qui empêchent donc la reconnaissance des œuvres romantiques anciennes (et nouvelles, bien évidemment). Schlegel met sans conteste le doigt sur l'une des limites du respect de la vérité historique. Les réformes du comte Brühl qui arrive en 1815, donc après les Cours sur l'art dramatique, en donnent des exemples appliqués à la scénographie. A l'aube de l'avènement du positivisme au XIXe siècle, les paroles de Schlegel prennent une résonance particulière. Mais le XIXe siècle a été le siècle de l'Histoire, en dépit du scepticisme que les Romantiques ont exprimé face à cette évolution.

Les trois premières sources citées (critiques théâtrales, dessins pour Ion, description du jeu de Mme de Staël) montrent que Schlegel ne dénigre pas les costumes (ni les décors) historiques et, plus encore, que Schlegel s'intéresse au costume  à la différence de Tieck, par exemple , car pour Schlegel, le costume a son importance dans la représentation. Par sa réflexion théorique sur la question de la vérité historique en général, Schlegel pose aussi abstraitement les bases théoriques d'un costume différent, un costume "poétique", différent de l'esthétique hyperréaliste proposée par Iffland : un costume tel que certains metteurs en scène le conçoivent aujourd'hui, qui reflèterait non pas en premier lieu une vérité historique extérieure, mais la vérité intérieure d'un personnage, voire la "vérité" d'une époque, d'un lieu, d'un événement. Ce n'est pas la vérité en elle même qui est remise en question ; c'est la manière de la retravailler, et cette vérité n'a pas besoin de s'exprimer par les moyens du réalisme. Les réflexions plus générales exprimées par Schlegel nous livrent des clés pour l'interprétation de la position des Romantiques, de leur rejet du réalisme à la Iffland considéré comme trop mesquin, trop prosaïque, anti-poétique parce qu'il constitue un frein à la liberté de création de l'artiste.

Concernant le domaine très concret de la scénographie, on peut regretter que Schlegel n'ait pas poursuivi le chemin qu'il indiquait, n'ait pas ouvert un volet supplémentaire, proposé des exemples de nouvelles possibilités d'utilisation du décor et du costume.

Néanmoins, la réflexion théorique de Schlegel reste extrêmement importante dans le cadre du débat sur la scénographie, parce qu'elle a livré des arguments aux détracteurs d'une scénographie historisante (Tieck, le critique anonyme des Berlinische Nachrichten). Mais l'histoire du seul théâtre de Berlin semble dire que sa parole est restée sans effet. Le comte Brühl s'est attaché à instaurer la vérité historique sur la scène avec une très grande rigueur, comme s'il n'avait pas perçu les voix et les arguments qui s'étaient fait entendre avant son arrivée contre le choix esthétique auquel il adhéra.

Notes
445.

Les variations internes des études critiques d'E. Gross et d'H. Schaffner sur le sujet en sont une preuve.

446.

Une remarque: nombre de mots de théâtre semblent être d'origine française et gardent pendant un temps la graphie française ou italienne (qui n'est d'ailleurs pas toujours respectée dans les éditions modernes !) : "Costüm", "Decoration", "Coulisse". De même, on l'aura remarqué, la graphie du terme "Kostüm", "Kostum", "Costume", est encore très variable.

447.

Schlegel envoyait ces critiques comme correspondant d'un journal paraissant à Dresde, la Zeitung für die elegante Welt. Elles ont été republiées dans l'édition complète éditée par E. Böcking : "Theater-Kritiken", Sämmtl. Werke, Band IX, 1847 / G. Olms Verlag (reprint), 1971.

448.

"[…] man sah wohl, daß dabei ein gelehrter Alterthumskenner, Hr. Hirt, und ein sehr wackrer Künstler, Hr. Hummel, ihren Rath erteilt hatten, sowie beim Anzuge der Rodogüne ; und es wäre eine ähnliche Vorschrift für den der Königin zu wünschen gewesen." ibid., p. 224.

449.

"Ueber einige tragische Rollen von Frau von Staël dargestellt", 1806. Sämmtl. Werke, Band IX, op. cit. "im echten Kostum der Antike", p. 276.

450.

"Jetzt ist man endlich auf einen reineren Geschmack zurückgekommen, auf einigen Haupttheatern, wird das Kostüm wirklich gelehrt und in einem strengen Stil beobachtet." Sämmtl. Werke, Band V, hrsg. von E. Böcking 1846/1971 (reprint), p. 319 ; ou encore Vorlesungen über dramatische Kunst und Literatur. Zweiter Teil, hrsg. von E. Lohner, Stuttgart 1967, p. 215, i. e. Vorlesungen (Lohner 1967) dans les pages suivantes.

451.

E. Gross, Die ältere Romantik und das Theater, Hamburg, Voss, 1910. Cf. p. 105-106.

452.

"Nicht die Wahl dunkler, zu dem Charakter stimmender Farben, war zu tadeln : aber in dieser Zusammenstellung waren sie ganz disharmonisch, und der Schnitt der Kleidungsstücke war verkehrt und entstellend. Ist es zu verwundern, daß die Königin, bei der Hitze des dortigen Klima verwirrt im Kopfe wird und auf tolle Pläne gerät ?" Sämmtl. Werke, op. cit., p. 223.

453.

La pointe satirique nous paraît pure moquerie, mais elle joue avec une idée intéressante : l'idée du respect de la réalité dans le costume, soit l'attention au climat, aux données géographiques et sociologiques, un principe développé à la fin du XVIIIe siècle jusque dans les costumes historiques du comte Brühl.

454.

"Der Sinn der Rolle wurde ganz entstellt". Sämmtl. Werke, op. cit., p. 225.

455.

Il est difficile de dire s'il s'agit d'une caractérisation réaliste selon les théories d'Iffland (le personnage de Cléopâtre apprécie les couleurs sombres) ou une couleur symbolique choisie par la comédienne ou le régisseur.

456.

"Die Tracht des Bodostor, als des Abgesandten einer reichen, aber barbarischen Nation, war vortrefflich gegen die römische einfache Großheit, die keinen goldnen Zierrat und nur wollene Zeuge zuließ, kontrastiert." Sämmtl. Werke, op. cit., p. 186.

457.

Je renvoie pour plus de détails à l'étude très intéressante de Georg Reichard, August Wilhelm Schlegels "Ion" : das Schauspiel und die Aufführungen unter der Leitung von Goethe und Iffland, Bonn, Bouvier 1987. Concernant le travail sur la couleur des costumes, Goethe à Weimar créa une version approfondie qui lui était propre, inspirée par ses recherches sur les couleurs.

458.

"[…] um diesen Mangel an Bewegung zu decken, wird man zu ganz individueller Charakteristik seine Zuflucht nehmen, die ein geübter Schauspieler wohl zu einer gewissen Wahrheit aufzustutzen mag, die aber an Äußerlichkeiten klebt, so wie ein schlechter Porträtmaler durch Pockennarben und Warzen und die Art sich zu kleiden und das Halstuch zu knüpfen die Ähnlichkeit zu erreichen sucht." Vorlesungen (Lohner 1967), p. 285.

459.

So führt sein Hang zur Klassizität selbst gegen die in den "Vorlesungen" ausgesprochene Abneigung zu einer geradezu gelehrten Genauigkeit wenigstens in bezug auf das antike Kostüm." Gross, op. cit., p. 106.

460.

"Allerdings interessierte ihn nicht das antike Gewand, sondern das antike Theaterkostüm. Er geht nicht von der Idee der historischen Echtheit, sondern von der einer aesthetischen Idee aus, nämlich der Kontrastwirkung des Kostüms, die die Grundlage des antiken Bühnen-Kostüms war." Schaffner, Die Kostümreform des Grafen Brühl […], Diss., Köln, 1926. p. 31.

461.

Selbst wenn [die Kostümierung] historisch genau war, so ging sie doch zunächst von einer aesthetischen Idee aus neben der die historische Echtheit nur eine untergeornete Rolle spielt." ibid.

462.

"Zu Shakespeares Zeit konnte man seinen Julius Cäsar in den damaligen Kleidertrachten ausführen, wie auch unstreitig geschehen ist, und niemand nahm Anstoß daran ; heutzutage wäre das nicht mehr möglich." Schlegel, Die Kunstlehre, hrsg. von E. Lohner, Stuttgart, Kohlhammer, 1963. p. 201.

463.

De Nicolas Poussin on a vanté la représentation exacte des paysages, l'attention à une végétation différenciée selon les lieux, le travail sur la lumière et l'authenticité des vêtements de personnages bibliques notamment. Karl von Brühl, l'administrateur des théâtres berlinois après 1815, fit reproduire plusieurs fois des tableaux de Poussin et du Lorrain comme décors, et cite les peintres dans la préface aux gravures de costumes (1819). Poussin a donc trouvé des admirateurs en dépit des propos dépréciateurs de Schlegel et en dépit de la remise en question de la vérité historique par les Romantiques.

464.

"sie verwarfen ohne Umstände die sonst vortrefflichen Bilder, wenn sie [gegen das Kostüm] verstoßen". Die Kunstlehre, op. cit., p. 199.

465.

"Diese Wahrscheinlichkeit kann aber nur für diejenigen so wichtig sein, die ohne Phantasie bloß mit raisonierendem Verstande zur Betrachtung eines Kunstwerks hinzutreten." ibid., p. 200.

466.

"Ich habe schon im Vorhergehenden das künstlerische Kostüm als die charakteristische Äußerlichkeit definiert. In der Tat, was kann es mir verschlagen, welche Kleidertrachten, Waffen, Geräte, Wohnungen usw. man unter der oder jener Nation in einem bestimmten Zeitalter gehabt, wenn ich den Geist der Menschen in bezug auf die dargestellte Geschichte nicht besser daraus begreifen lerne. Nun ist es zwar gewiß, daß die Menschen, wo nicht zufällige Störungen eintraten, in der Art, wie sie ihre Umgebung sich anbildeten, immer sich selbst ausdrückten : allein um uns zu zeigen, muß der Künstler sich selbst schon da hinein gefühlt haben ; auf diese Art wird die trockene Notiz für ihn poetischer Stoff, und er wird nicht alles, was er vom Kostüm weiß, gleichgültig auskramen, sondern eine Seite desselben in lebendigem Zusammenhang mit dem Wesen seiner Darstellung setzen." Die Kunstlehre, op.cit., p. 200.

467.

"Daß Shakespeare das wesentliche Kostüm, nämlich den Geist der Zeiten und Völker, richtig getroffen, wird wenigstens von den englischen Kunstrichtern häufig anerkannt; gegen das äußerliche Kostüm sind mannigfaltige Verstöße leicht zu bemerken." Sämmtl. Werke, Band V, op. cit., p. 180 ; ou encore Vorlesungen (Lohner 1967), op. cit., p. 124.

468.

"Eine allgemeine Bemerkung über das Kostüm in künstlerischer Hinsicht wird hier nicht am unrechten Orte stehen. Niemals ist man in dessen Beobachtung genauer gewesen als heutzutage ; die Kunst ist zu einer pedantischen Antiquitätenkrämerei geworden. Dies kommt daher, daß wir in einem gelehrten und kritischen, aber durchaus nicht poetischen Zeitalter leben." Sämmtl. Werke, Band V, op. cit., p. 180, ou encore Vorlesungen (Lohner 1967), op. cit., p. 125.

469.

Schlegel regrette l'impression pénible laissée par l'effort d'exactitude historique et le fait que "l'esprit" de la Rome antique ne soit pas toujours bien rendu.

470.

Cf. W. Klara, Schauspielkostüm […], Berlin, 1931, p. 104. Klara lui-même qualifie Kotzebue "d'auteur savant" ("gelehrter Autor").

471.

Voici le passage exact : "A. W. Schlegel begründete und verlangte in seinen "Vorlesungen über dramatische Kunst" ausdrücklich eine historisch getreue Kostümierung, weil man nun "in einem gelehrten und kritischen, aber durchaus nicht dichterischen Zeitalter" lebe. H. Kindermann, Theatergeschichte Europas, Band V, Salzburg, 1962, p. 252-253.

472.

"Zu jener einfältigen Denkweise, die sich bloß an innere Wahrheit der Darstellung hält, ohne sich an Anachronismen und Versehen in andern Äußerlichkeiten zu stoßen, können wir leider nicht zurückkehren ; allein wir müssen die Dichter beneiden, denen sie entgegenkam : sie gewährte ihnen eine große Breite und Freiheit der Behandlung." Sämmtl. Werke, Band V, op. cit., p. 180 ; ou encore Vorlesungen (Lohner 1967), op. cit., p. 126.