Première partie : de l’objet juridico-financier à l’objet sociologique. Principes d’une problématisation de la « question sociétaire »

Chapitre 1. Conceptions socio-juridiques et variations historiques de la société civile. propriété, contrat et groupement

L’exploration du cadre objectif de la SCI implique au préalable de réintégrer celui-ci dans le giron plus large de la société et des autres groupements, qu’ils soient civils ou commerciaux. Ou quand l’espèce se rattache au genre. Nous ne projetons toutefois pas de procéder à un tour d’horizon exhaustif de la loi, de la doctrine et de la jurisprudence. Ces matières sont tellement riches et dédaléennes pour ce qui se rapporte aux groupements juridiques, si ce n’est sibyllines pour un sociologue autodidacte du droit, que nous nous bornerons modestement à mettre en évidence les liens qui unissent la dimension juridique aux dimensions sociale et économique. A cet effet, nous nous arrêterons sur des points épistémologiques, pratiques et factuels incontournables.

La posture que nous adoptons alors ici voisine avec une « perspective externe » 28 , chère au sociologues et philosophes du droit, et pour laquelle la genèse et la nature du droit sont conçues comme le produit de causes ou de facteurs exogènes. Il nous incombe donc de relier le plus clairement possible le développement du concept sociétaire aux faits politiques, économiques et sociaux des époques marquantes qu’il a parcourues 29 , et de mesurer autant la prépondérance de certains vecteurs idéologiques que le poids de tendances sociologiques dans sa fabrication.

Notes
28.

Cf. Sheldon LEADER, « Perspective interne/externe » in André-Jean ARNAUD (dir.), Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, Paris, LGDJ, 2ème édition augmentée et corrigée, 1993, p. 312-313.

29.

Dans le sillage de Charles WRIGHT MILLS, nous postulons que toute action humaine lato sensu répond à un « principe de spécificité historique ». Cf. L’imagination sociologique, Paris, Maspero, 1967, p. 151-173. Dans la même veine, il n’est pas inutile de se référer à l’ouvrage de Jean-Claude PASSERON, Le raisonnement sociologique. L’espace non-poppérien du raisonnement naturel, Paris, Nathan, « Essais & Recherches », 1991, p. 78 sq. Pour lui, le raisonnement sociologique oscille entre un pôle de contextualisation historique et un pôle de raisonnement expérimental.