6.4 Personnalisation et délégation gestionnaires : rapports au temps, aux personnes et aux outils

Voyons dès à présent quelle allure peut revêtir la gestion matérielle promue par les enquêtés. Délégation ou personnalisation ? Les quelques aspects que nous allons exposer ici prépareront le terrain à l’analyse plus détaillée des interactions entre praticiens et porteurs de parts (cf infra, chapitre 9). Il nous a toutefois semblé pertinent d’amorcer le questionnement hic et nunc pour la bonne et simple raison que le choix de la délégation ou de la personnalisation renvoie à des considérations techniques et temporelles que nous retrouvons plus généralement dans la formulation des objectifs patrimoniaux et dans la perception des contraintes de gestion.

Avec la gestion des rapports locatifs, le lecteur a déjà pu avoir un premier aperçu du penchant de certains porteurs de parts pour la personnalisation. Néanmoins, l’examen des comportements gestionnaires dans leur ensemble nous incite à produire un constat moins arbitraire [cf. Graphique 10].

Graphique 10 – L’allure de la gestion adoptée par les enquêtés

En effet, nous remarquons que si 20 porteurs de parts sont tentés par la personnalisation, 8 seulement avouent tout déléguer et 18 s’évertuent à réaliser un partage. Cette distribution appelle tout de suite trois commentaires. Tout d’abord, tous les enquêtés sont ou ont été gérants de SCI, ce qui les poussent, naturellement ou artificiellement, à agir pour le compte de la société et de leurs associés (cf. infra, chapitre 10, § 10.2). De par leur responsabilité juridique, ils occupent a priori une position privilégiée dans le processus gestionnaire, à plus forte raison quand leur métier leur fournit des armes conceptuelles et pratiques adéquates. Ce positionnement gauchit un peu l’analyse car si nous n’avions rencontré de que simples associés, nous nous serions peut-être heurté à plus grande tendance à la délégation. Ensuite, les enquêtés qui optent pour une délégation exclusive sont en général ceux qui n’ont pas véritablement choisi le montage sociétaire au départ. Il se déclarent les plus « incompétents » ou « ignorants » du point de vue technique et juridique et digèrent plus ou moins bien l’obligation de recourir à des « subterfuges ». Enfin, il importe de préciser que le choix modal n’est pas définitif ; il existe des passerelles circonstancielles entre la délégation et la personnalisation, comme l’atteste en partie le troisième petit groupe d’attitudes. Faisant montre d’une rationalité limitée et ne maîtrisant pas tous les paramètres environnementaux, ils sollicitent ponctuellement des filières pragmatiques de spécialistes.