Les cessions de parts, à mi chemin entre droit coutumier, liberté contractuelle et situations imprévues

Comme nous l’avons déjà observé, le mécanisme des cessions de parts fournit aux porteurs de parts un moyen de recruter à bon escient ou de contrôler le casting sociétaire (cf. supra, chapitre 10, § 10.1). Sous cet angle, il surgit et agit, surtout dans les SCI familiales, comme un mode de « préservation de l’harmonie » [Notaire, PRAT 1] groupale. Cela étant, cette harmonie est fragile. Par exemple, par le jeu de l’alliance, de nouveaux membres – souvent qualifiés de « pièces rapportées » par les enquêtés – intègrent ou tentent d’intégrer avec peu ou prou de bonheur un nouveau cercle familial qui cultive ses propres normes, valeurs et codes et qui vit avec ses propres tourments. Il arrive en outre que l’attitude de certains associés, membres d’une lignée et/ou acolytes d’une aventure patrimoniale commune, dépare, que ceux-ci cherchent soit à se désister du montage, à se désolidariser d’un projet commun – à défaut d’être souvent collectif – auquel ils n’accordent plus le même crédit qu’au début, soit à s’y accrocher coûte que coûte et ce, au grand déplaisir d’autrui. Dans la première éventualité, les nouveaux membres par alliance, se situant dans l’antichambre du montage, sont perçus comme de potentiels « intrigants » tandis que, dans la seconde, qu’ils soient partants ou en instance de départ, leur statut d’« arriviste » ou de « comploteur » a déjà été repéré puis décrié.

Parmi nos enquêtés, 8 sont passés par des cessions de parts pour se délivrer de la mauvaise aura de certains associés, desserrer leur étreinte, ou bien pour essayer de se soustraire à des situations délétères qui, en l’absence de ce correctif, se seraient envenimées. 8 figures spécifiques de la défection ou de la démission peuvent ainsi être tracées, leur dénominateur commun étant leur caractère socialement salutaire :

  1. Une démission durement négociée. Préoccupé par la vente lucrative de sa société d’expertise-comptable, Bruno décide à la fin des années 90 de partir en quête d’un repreneur « valable ». Il préfère creuser la piste d’un acquéreur extérieur plutôt que celle de ses jeunes partenaires professionnels qui s’étaient déjà portés candidats. Ceux-ci en sont fort marris et font connaître leur agacement à Bruno qui n’en a cure ; leur jeunesse et l’insuffisance de leurs ressources financières lui ont paru rédhibitoires. A la suite d’âpres discussions, il réussit, en tant que gérant quasi majoritaire, à leur faire céder leurs parts dans la SA et dans la SCI à une PME auvergnate, société sur laquelle il fondait, à vrai dire depuis longtemps, de grands espoirs (cf.infra, § 11.2). La cession de parts a ici permis d’éviter une paralysie sociétaire et que des associés fâchés plombent les décisions gestionnaires par un recours mécanique à leur droit de veto.
  2. Une démission intimée. Quand le chiffre d’affaires de sa société de formation professionnelle a commencé à décliner, en raison d’une conjoncture économique défavorable, les relations entre Jean-Claude et son partenaire dans la SA et la SCI se sont dégradées. Ce dernier n’a pu se retenir de condamner les faiblesses de Jean-Claude durant cette période. S’il s’est résolu a quitter la SA, il n’a pas souhaité lâcher ses parts de SCI, en raison de la rente patrimoniale personnelle qu’elle pourrait lui rapporter. L’ayant bien compris, Jean-Claude ne l’a pourtant pas entendu de cette oreille. Il est parti du principe que si son associé abandonnait ses actions de la SA, il devait aussi abandonner ses parts de la SCI. Raisonnements désaccordés ! Il lui a donc intimé de céder ses parts – chose qui fut faite sans trop de complications – et a prié son épouse de les racheter. Cet épisode a franchement convaincu Jean-Claude du bien-fondé des seules SCI familiales (cf.supra, chapitre 10, § 10.1, sur l’assurance projective apportée par les proches et parents).
  3. Une démission proche du sacrifice. Dans le chapitre précédent (cf.supra, chapitre 10, § 10.1), nous avons vu que la solidarité amicale pouvait être une condition de l’entente sociétaire mais qu’elle pouvait être affectée par des aléas financiers individuels. Pour ne pas mettre en péril leur montage patrimonial et tomber dans un conflit douloureux, Dominique et Bernard n’ont pas eu d’autre choix que se séparer d’un de leurs amis-associés en proie à de sérieux problèmes d’argent. S’ils n’ont pas tergiversé pour l’aider au début, ils ont après coup préféré qu’il s’en aille et ce, avant que leur histoire d’amitié « tourne au vinaigre ». D’ailleurs, l’associé défaillant a bien reçu le message et a choisi de sacrifier ses parts plutôt que de perdre ses amisFrancesco ALBERONI place l’argent, l’envie, l’ambivalence et le pouvoir au rang des ennemis de l’amitié. Cf.L’amitié, op. cit., p. 121.. Il les leur a vendues après s’être arrangé sur la reprise de sa quote-part d’emprunt. Quelques semaines plus tard, Bernard trouvait un repreneur en la personne d’une société commerciale plus solvable.
  4. Une démission déchirante mais indispensable. Séparé de son épouse, Pascal a refait sa vie avec une jeune femme plus jeune de vingt-cinq ans. Pour sceller leur attachement mutuel, ils se sont lancés dans un investissement immobilier commun et ont crée une SCI. Quelques années plus tard, en raison notamment de son expatriation professionnelle, la jeune femme rompt au désespoir de Pascal qui ne s’attendait pas à une telle épreuve. Ayant peu à peu rebondi, il négocia le départ de la SCI de son ancienne compagne. Il n’était pas tenable qu’elle reste dans la SCI en tant que simple associée, partenariat ou amitié et amour ne semblant pas faire bon ménage à ses yeux. La cession de parts est donc apparue comme un moyen de reprendre la maîtrise du patrimoine et d’entériner la fin de leur histoire sentimentale. Si elle avait décidé de garder ses parts, la bataille se serait sûrement poursuivie en justice.
  5. Une démission provoquée. L’histoire de Solange ressemble un peu à celle de Pascal, en ce sens qu’elle tourne aussi autour du jeu de l’amitié et de l’amour. Elle s’en distingue car Solange n’a pas vraiment vu venir les avances d’un homme « pas très clair », qu’elle pensait davantage être un ami. Elle l’avait mandé, avec sa tante, son oncle et une amie, pour qu’il la sorte d’une situation délicate via un montage sociétaire. S’il s’est très bien comporté au début, ses avances se sont ensuite faites plus pressantes. Déconcertée et peu encline à rajouter des problèmes humains à ses problèmes matériels de l’époque, elle joua d’abord la carte de la discussion. Mais devant sa « surdité », son refus de voir la vérité en face, elle décréta qu’elle userait de l’acte de cession qu’elle avait fait signer en blanc au démarrage à chacun des associés. Elle jugea que c’était la meilleure solution pour restaurer le calme dans la SCI et prendre ses distances avec un homme qui l’avait déçue.
  6. Une démission augurée et pré-organisée. Pour soutenir l’installation résidentielle de son fils et de son ménage, le père de Sandrine avait organisé en 1985 la donation et l’apport à une SCI d’une maison familiale. Son fils et sa belle-fille en étaient les deux associés égalitaires. Pourtant, il leur avait bien signalé qu’en cas de séparation ou de divorce, il rachèterait par cession les parts de sa bru. Par sa connaissance fine des affaires et de la gestion du patrimoine, il se méfiait quelque peu des « pièces rapportées » ; il avait trop rencontré de chefs d’entreprise bloqués par des situations embrouillées. Pour autant, il ne souhaitait pas offusquer son fils aîné. Nous ne savons pas s’il avait prédit ce qui allait se produire, toujours est-il que le couple divorça trois ans plus tard. La bru aurait pu faire valoir son droit d’associée égalitaire mais elle se conforma au contrat tacite et moral qu’elle avait passé avec son beau-père, ou plutôt que celui-ci lui avait plus ou moins directement imposé – aux dires de Sandrine, son père avait beaucoup de charisme. Elle ne chercha pas à lui causer du tort, surtout dans la mesure où le divorce se fit par consentement mutuel. Elle vendit sa moitié des parts à son beau-père qui non content de « reconquérir » le bien familial, profita aussi de l’occasion pour intégrer dans la SCI ses deux filles, dont SandrineSandrine évoque cependant la « mauvaiseaffaire » faite par son père à cette époque. Le rachat des parts lui a permis de devenir associé majoritaire mais la redistribution capitalistique qui en dériva entraîna un coût économique imprévu. En fait, il a en quelque sorte été contraint de racheter une partie d’un bien qui lui appartenait auparavant. Nous ne pouvons pas parler d’une opération judicieuse, sauf si nous nous focalisons uniquement sur le retour du bien dans le giron familial..
  7. Une démission en forme d’apostasie. Le système d’investissement et de gestion élaboré par Frédéric a toujours été cautionné par ses nombreux associés ; ils ont toujours, pour le dire autrement, acquiescé à ses arguments et à sa politique financière. Sauf une fois où l’un des associés se déprit d’un nouvel appel à l’emprunt requis par Frédéric. Pour cet associé, pourtant proche et jusque-là irréprochable, c’était un apport de trop qu’il refusa par principe. Pour ne pas pourrir le climat et éviter que l’irritation se propage, tel un virus, aux autres associés, Frédéric et son associé convinrent d’un départ de gré à gré, avec, en plus du rachat de ses parts, un remboursement de sa quotité dans le compte-courant de la SCI. Le système fut sauvegardé mais Frédéric accepta amèrement ce départ. Un associé s’était « rebellé » (cf.infra, § 11.2 et 11.3). Nous pouvons suggérer que Frédéric perçut moins ce départ comme une lassitude ponctuelle –  ce qui semblait le cas a priori – que comme le reniement d’un système dont les règles n’avaient jamais été enfreintes par aucun associé, chacun d’entre eux vouant une véritable dévotion au travail de Frédéric et de sa petite équipe.

Le contrat sociétaire ne subvient parfois pas toujours, théoriquement, à la sécurisation ou à l’apaisement des relations entre associés. La cohésion sociale peut en pâtir. Les cessions de parts, notamment celles en blanc, se présentent pour le coup comme une solution de rechange, peu ou prou négociée. Le discours d’un avocat d’affaires, familier de cet usage technique, est à ce sujet très intéressant, surtout pour ce qui concerne les montages familiaux et leur évolution :

‘« Les problèmes familiaux existent. Au départ, tout est beau, tout est neuf. Et puis comme je vous le disais, dans notre société on n’est jamais sûr de rien. Aujourd’hui c’est comme ça mais qui vous dit que ça sera pareil dans un an ou 10 ans, qu’il n’y aura pas une altération des rapports familiaux. J’ai le cas. Au départ, il y avait un enfant qui faisait partie d’une SCI. Aujourd’hui il fait des siennes parce que c’est une jeune fille qui avait rencontré un mec et que le mec est en train de lui monter la tête : « Il n’y a pas de raison que je ne sois pas dans la SCI », etc. Bon c’est simple. La SCI elle a encore des emprunts – il lui reste deux tiers à payer – ce qui veut dire que pour le moment il n’y a pas de valorisation du patrimoine immobilier. Moi je dis à la fille « Ok, vous voulez ça mais qu’est-ce qu’on fait ? Je demande à un expert d’évaluer le bien pour savoir quelle est la valeur vénale de chaque part sociale ? Et pour en tenir compte, c’est quoi ? Il faut que je connaisse l’actif, c’est-à-dire la valeur vénale du bien, le passif et qu’ensuite je refasse le calcul. Il y a tant de parts et si je ramène ça, ça fait tant « . « Ok, je vous rachète vos parts : je vous donne 1 000 balles, un franc symbolique ou alors vous me payez le solde ». De toute façon, on trouve toujours des solutions […] ».
[Avocat d’affaires, PRAT 14]’

Dans l’exemple concret qu’il nous offre, une jeune femme, associée dans une SCI avec son père et ses frères, est pressée par son ami pour qu’elle le coopte dans la société patrimoniale et, plus largement, dans la structure familiale. Mais le père ne tolère pas l’intrusion de cette « pièce rapportée » dont les manœuvres semblent pour le moins douteuses. Mobilisé comme tiers médiateur et arbitre, le praticien, averti des incertitudes qui pèsent sur le devenir des structures familiales en général, se voit missionné par le paterfamilias pour négocier un compromis, dans la mesure où chaque partie campe sur ses positions. Il doit parvenir à une diminution des revendications de la fille et de l’insistance de son ami, à contrarier la réaction d’orgueil que pourrait avoir par la suite l’enfant lésé, c’est-à-dire, en réponse au veto paternel, une volonté farouche de faire barrage aux décisions collectives. Son argumentation se veut à la fois mathématique et psychologique. Dans la palette des solutions disponibles figurent soit une négociation amiable (cession de part symbolique, accord implicite originel), soit un marchandage pur et simple (départ moyennant indemnisation financière) – qui tiennent pour beaucoup aux capacités de persuasion et au talent du praticien –, soit enfin un recours au blanc-seing. Dans le contexte, le choix de l’avocat balance entre le rappel d’une règle du jeu initiale copartagée et la tractation financière (cf. infra). Il délaisse le blanc-seing qui est plus couramment utilisé dans les SCI partenariales. Lorsque des associés signent un acte en blanc, cela signifie qu’ils adhèrent très tôt à une tactique qui peut les desservir dans le futur. Si en cas de tension l’un d’eux refuse de restituer ou de vendre ses parts, il ne peut rien objecter et surtout pas un abus de confiance ; les tribunaux lui répondraient qu’il s’est jeté « dans la gueule du loup » et qu’il a tout de même consenti à cette méthode coupable (cf. supra, chapitre 7, § 7.2).

Le mécanisme des cessions de parts fait donc partie des remèdes qui permettent de surmonter les effets induits par des changements d’attitudes fortuits. Son utilisation raisonnée caractérise l’union conceptuelle et pratique entre prophylaxie et liberté contractuelle (cf. supra, chapitre 2, § 2.4). Ainsi, relativement aux attentes sélectives exprimées et aux traditions en cours, les entrées et les sorties, l’ouverture et la fermeture, paraissent maîtrisées. A coté des négociations ou des marchandages, le choix de la nature socio-juridique des cessions 701 , selon le type de SCI et sa configuration interpersonnelle, nous invite aussi à (ré)établir le lien entre stratégies d’anticipation des litiges et coutumes groupales [cf. Tableaux 51 et 52].

Tableau 51 – Nature socio-juridique des cessions de parts selon la « Destination » des SCI des enquêtés
NATURE DES CESSIONS (CP) SCI HAB SCI ICP TOTAL
A Libres entre associés, conjoints d’associés, ascendants et descendants 17 45 62
B Libres entre associés, ascendants
et descendants en ligne directe
(conjoints exclus)
6 3 9
C Libres entre ascendants et descendants
en ligne directe
3 - 3
D Libres au profit des descendants 1   1
E Libres entre associés 3 24 27
F Toutes cessions soumises à agrément 5 2 7
TOTAL 35 74 109

Source : Archives RCS

Tableau 52 – Nature des cessions de parts selon la configuration interpersonnelle des SCI des enquêtés
NATURE Amicale Amicale/parte-nariale Parte-nariale Fami-liale et amicale Familiale TOTAL
A 3 22 1 2 34 62
B - - - - 9 9
C - - - - 3 3
D - - - - 1 1
E 8 4 6 - 9 27
F 1 - 1 2 3 7
TOTAL 12 26 8 4 59 109

Source : Archives RCS

Que nous apprennent les résultats de l’enquête ? Dans près de 57% des SCI du corpus (62/109), les cessions sont libres entre associés, conjoints d’associés, ascendants et descendants (A). Le degré d’ouverture atteint ici un pic qui est notamment le lot des SCI familiales ; environ 55% de ces dernières ont en effet des statuts dans lesquels ce choix est clairement énoncé (34/62). Quand elle survient, la défection d’un associé familial, consécutive à une dissension persistante, est palliée par l’intégration d’un très proche parent ou par le rachat des parts par un associé encore en place – la plupart du temps le leader. Il l’est également pour les 22 des 26 SCI amicales/partenariales du corpus, à savoir, en particulier, pour celles de Frédéric, dont la politique de recrutement sociétaire n’exclut pas des substitutions intermittentes d’associés par ceux encore dans le capital, des membres du milieu, des proches ou encore des membres de leur famille.

Dans ces deux situations, une certaine continuité socio-patrimoniale axée sur l’appartenance est privilégiée, le partage de valeurs communes et le respect d’une règle du jeu étant érigés en coutumes. On peut même alléguer qu’en consignant le choix d’un type de cession, les statuts normalisent des principes gestionnaires prononcés expressément et oralement par un seul acteur ou par plusieurs qui ont réussi à négocier, a priori, cette résolution.

Toutefois, l’ouverture peut être restreinte, voire très restreinte. Trois autres situations en témoignent (B, C et D), même si elles sont marginales dans le corpus (13/109, soit 11,9%). Soit les cessions sont libres entre associés, ascendants et descendants en ligne directe (9), soit entre seuls ascendants et descendants en ligne directe (3), soit, enfin, au profit des seuls descendants (1). Ces trois choix ne concernent que les SCI familiales et accentuent par là-même la volonté des fondateurs sociétaires de voir les biens patrimoniaux rester entre les mains de la lignée. Toute tentative d’une prise de pouvoir extérieure est de ce fait cantonnée ; les conjoints, c’est-à-dire les membres par alliance, sont tout simplement écartés. Le repli cognatique traduit ici aussi la mise en place d’une stratégie d’évitement des conflits familiaux pour l’appropriation et la gestion d’un patrimoine imprégné d’une forte valeur affective. Nous pensons de manière évidente aux SCI d’Alain, de Robert, de Pierre et de Sandrine (cf. Annexe I)

Un glissement (gradué) de l’ouverture vers la fermeture advient par conséquent. Il est encore possible de s’en rendre compte en ciblant les situations où les cessions sont libres entre associés (E) et celles où, bien sûr, toutes sont soumises à agrément (F). Les premières touchent près d’un quart des SCI du corpus (27/109) tandis que les secondes demeurent plus exceptionnelles (7/109). Chaque option contractuelle symbolise certes une fermeture mais la deuxième frappe davantage par sa rigueur socio-juridique. Dans notre corpus, le type de configuration interpersonnelle est indifférent à cette exclusivité ; l’assemblée des associés serait en l’espèce souveraine pour décider d’une cession, y compris à un associé (cf. infra). Les montages organisés par Didier, Pascal et Raymond s’inscrivent dans cette veine restrictive. Regroupant enfants et/ou conjoints, ils s’appuient sur le choix d’une ligne stratégique hyper-prudente où, bien que mûrement réfléchie, la présomption d’une éventuelle adversité conjugale ou filiale ne nuit en rien à l’amour et à la tendresse ressentis pour son conjoint et ses enfants. Au contraire, il semblerait que cette forme d’autorité raffermisse les liens socio-affectifs.

Si nous revenons sur les cessions libres entre associés, nous constatons qu’elles aussi se répartissent de façon homogène ; elles concernent presque autant les montages familiaux qu’amicaux et partenariaux. Lorsque ce choix est effectué dans les SCI familiales, c’est très souvent au profit des deux conjoints. D’une part il leur permet de mettre sur la touche leurs enfants sans mépris [Rémi, Colette] et, d’autre part, d’installer une soupape de sécurité en cas d’ennuis conjugaux ultérieurs ; la défection est rendue malaisée, si ce n’est irréalisable [Colette, cf. infra]. Quand ce choix est fait dans les SCI amicales et partenariales, c’est pour insister sur la solidité d’un cercle dont les membres, difficilement interchangeables, possèdent non seulement des intérêts patrimoniaux communs, mais se retrouvent aussi sur le terrain des valeurs d’entraide, de sincérité, de fidélité et de confiance réciproque, remparts supposés contre les conflits relationnels [Hervé, Bernard et Dominique, Richard].

Notes
701.

Hormis dans les cas où celui-ci n’en est pas vraiment un, c’est-à-dire quand des statuts sont copiés sans une réelle réflexion « politique » derrière.