Le bébé fonctionnel

Nous venons de présenter deux façons de percevoir son enfant : l’enfant imaginaire du fantasme et l’enfant réel.

Lorsque la mère n’arrive pas à faire coïncider le fantasme d’enfant imaginaire et son identification aux besoins du nouveau-né, elle met en place un troisième niveau de fonctionnement. Le fonctionnement sur un mode opératoire. Il est alors parlé de nouveau-né théorique ou fonctionnel.

Ces trois types d’enfants peuvent co-exister. Il y a parfois tendance à privilégier un des trois enfants. Lorsque le troisième domine, les parents parlent d’un bébé théorique, abstrait ou conventionnel. Il y a déshumanisation du nouveau-né qui devient seulement biologique. Ce mode de fonctionnement serait mis en place afin d’éviter une dépression avec abandon des soins.

‘« Un élément du réel inacceptable y entraîne un retrait global du monde extérieur. L’enfant, méconnu comme réel, retrouverait le statut de poupée, d’enfant du rêve, ne nécessitant de soins qu’en fonction des besoins propres de sa mère ou n’en nécessitant pas. » (Godard, 1979). ’

Au travers de cette modeste présentation, nous possédons un aperçu de la manière dont l’enfant est pensé et représenté en interaction avec son environnement.

De ces modes interactionnels peuvent en ressortir des pathologies. B. Wright (1986) décrit les malformations de la relation mère-enfant sous trois formes : l’évitement, la symbiose et le rejet.

La naissance d’un enfant à troubles autistiques entraîne des comportements aberrants.

D’une part, du côté de l’enfant, par ses troubles du sommeil, alimentaires, des réponses négatives aux sollicitations parentales par le regard périphérique, le détournement du visage…

D’autre part, pour s’en protéger, le parent applique des mécanismes défensifs. Le plus fréquent est la fusion symbiotique pathologique. La mère peut faire comme si l’enfant n’était pas né mais aussi exclure le père de cette relation.

Dans le cadre de pathologies à caractéristiques autistiques, où l’un des principaux troubles se situe dans l’interaction, la question du lien avec cet enfant « étrange ou étranger » peut être posée.

L’influence psychique et environnementale est présente dans toutes les pathologies. Ses conséquences sont d’autant plus importantes dans une pathologie qui touche le système des interactions. Les difficultés des recherches actuelles sur l’étiologie de ces pathologies résulteraient de la complexité de ce fonctionnement exposé dans ce chapitre.

De plus, la consultation tardive des parents sur leurs inquiétudes par rapport au développement de leur enfant peut être due à la difficulté qu’ont eu ces parents à percevoir la pathologie de leur enfant lors de ses premiers mois de vie, voire ses premières années. L’idéalisation des parents vis-à-vis de leur enfant peut leur faire refouler toute perception pathologique chez celui-ci.