Vers une cohésion étiologique

« Finalement, toute souffrance n’est que sensation, elle n’existe que dans la mesure où nous l’éprouvons et nous ne l’éprouvons que du fait de certaines dispositions de notre organisme. »
Sigmund FREUD Le malaise dans la culture, 1929.

Les travaux actuels sur l’étiologie des troubles schizophréniques évoquent certaines hypothèses pouvant se rapprocher des nôtres :

Il existerait trois réactions princeps face à ce type de pathologie :

Parmi les études illustrant cette thèse nous pouvons citer l’étude conduite par une équipe de généticiens et de psychiatres des Hôpitaux de Paris à propos de la transmission de troubles schizophréniques (Jacquard, 2001). Cette étude regroupait 1300 patients classés selon trois phénotypes : Sains, Schizoïdes et Schizophrènes. Deux gènes hypothétiques ont été proposés : n et x. Chaque patient possédait l’un des trois génotypes (nn), (nx), ou (xx). Selon ce modèle, les premiers étaient tous sains et les deux autres porteurs de probabilités. Les (nx) étaient soit sains (à 90 %), soit schizoïdes (à 10 %). Les (xx) pouvaient posséder l’un des trois phénotypes avec la probabilité d’être sains à 35 %, d’être schizoïdes à 40 % et d’être schizophrènes à 25 %. L’étude a donc établi un lien probabiliste entre un génotype hypothétique et sa manifestation. Ce modèle a donc conclu que la possession de deux exemplaires de ce gène serait nécessaire pour développer des troubles schizophréniques mais qu’elle ne suffirait pas à elle seule à déclencher une pathologie (les trois-quarts des individus qui en seraient dotés échapperaient à ce destin).

Afin de modérer nos hypothèses et du fait que nous ne sommes pas spécialistes du domaine de la biologie, nous préférons parler de susceptibilité, de vulnérabilité ou de fragilité et ne pas nous limiter au seul modèle génétique. Toutefois, cette étude évoque précisément nos orientations actuelles sur une multiplicité de facteurs.

Nous ne sommes pas très éloignés des théories de Spitz (1968) sur les périodes de vulnérabilité rencontrées par l’enfant au cours de son développement biologique.

‘« Les effets avec l’extérieur seront toujours un élément important même si un jour on découvre une origine génétique à l’autisme. » (Golse, 2001)’

M. Mahler (1952) a évoqué des hypothèses relativement proches au niveau de la psychose symbiotique. Pour elle, bien que la pathologie apparaisse après un développement normal, certains troubles apparemment non précurseurs étaient préalablement présents à son déclenchement. La pathologie se déclencherait à la suite d’une « expérience courante ». « Expérience courante » car la valeur du facteur déclencheur serait proportionnellement inverse à la valeur de la fragilité du sujet. Un événement même minime peut être précurseur d’une pathologie si la personne est porteuse d’une fragilité psychique importante.

De manière générale nous pouvons supposer une combinaison de réactions conceptuelles diverses et variées dans le développement d’une pathologie. La vision polyfactorielle de l’Autisme Infantile intègre, selon les dispositions individuelles, des caractéristiques neurologiques, affectives, cognitives et psychosociales.

L’emploi par Frances Tustin (1981) de termes tels que « neuromental » et « psychochimique » explique ce lien permanent entre l’intérieur et l’extérieur. Une information peut susciter l’expression de certains gènes et la production de protéines intervenant dans la construction du système.

‘« [Il y a] phénomènes de stimulation et de réaction dans le tissu où il [le symptôme] est installé » (Freud, 1926).’

Cette définition polyfactorielle du trouble explique l’impossibilité de dissocier les différents facteurs d’influence : biologique, phylogénétique et psychologique.

‘« …tous les enfants qui ont une mère déprimée et des difficultés à se nourrir ne deviennent pas autistes, bien qu’ils puissent avoir d’autres problèmes. Je suis convaincue qu’il doit y avoir quelque chose dans la constitution génétique ou dans le vécu intra-utérin de l’enfant autiste qui le prédispose à recourir à la "mise en capsule" autistique comme mode de protection exclusif. Un syndrome aussi rare que l’autisme infantile précoce est probablement le résultat d’une exceptionnelle combinaison de facteurs, et nous ne les connaissons en tout cas pas tous. Ces enfants représentent encore une énigme. Mais si nous nous efforçons de mieux discerner ce qu’est l’autisme et ce qu’il n’est pas, nous pouvons ainsi mieux saisir les facteurs impliqués dans son développement. » (Tustin, 1990)’

Il parait important de travailler à cette catégorisation, non seulement telle que la présente Frances Tustin en terme d’Autisme et de non-Autisme, mais également de sillonner la diversité de ce trouble pour mieux explorer ses étiologies.

Grâce à la distinction nosographique de l’Autisme Infantile nous pourrons appréhender ses étiologies afin de découvrir les dominantes factorielles selon la sous-catégorie autistique établie.