Les étiologies des Autismes

Pour résumer, l’étiologie des symptômes autistiques est complexe et les mécanismes pathologiques sous-jacents ne sont pas encore connus. Ces comportements très hétérogènes sont diagnostiqués en fonction de multiples critères. Des recherches récentes ont porté sur des aspects génétiques, les agressions in utero et le fonctionnement du cerveau, de même que sur des facteurs neurochimiques et immunologiques. Des études sur des membres de la famille et des jumeaux semblent indiquer qu’il existe des causes génétiques d’un vaste « syndrome autistique ». Dans environ un quart des cas, un lien a été établi entre les troubles autistiques et des troubles génétiques comme le syndrome de l’X fragile ou des maladies infectieuses comme la rubéole congénitale. (Bailey et al, 1993, 1995 ; Hallmay et al, 1996 ; Fombonne et al, 2001).

Nous sommes dans un mouvement de pensée qui penche vers une causalité physiopathologique issue de l’interaction entre une agression environnementale précoce et une prédisposition génétique.

Les premiers travaux tâtonnaient également dans ce sens. Dans ses premières recherches, Kanner alternait entre une approche psychopathologique et une approche biologique. Plus tard, Tustin a défini deux étiologies de l’Autisme Infantile, l’une organique liée à une liaison cérébrale et l’autre psychogène avec une fragilité de départ. A cette époque, une forme de clivage interdisciplinaire était encore bien présente. Ce n’est que récemment que le concept de pluridisciplinarité a été accepté.

Dans les propos de Tustin, la flexibilité de la nature humaine est intégrée. Elle expose le fait que le choix thérapeutique ne dépend pas de la cause puisqu’une psychothérapie peut modifier des éléments d’origine organique.

A l’inverse, pour Asperger (1944), les états décrits étaient certainement polymères dans le sens où ils étaient liés à plusieurs unités de l’hérédité. Selon la description d’Asperger, comme celle de Kanner, les parents avaient un bon niveau intellectuel, ils étaient issus d’une classe sociale élevée et possédaient des troubles névrotiques ou autistiques. Asperger parle d’une transmission de la pathologie par le père, et reste sur des conceptions héréditaires et non psychologiques. Il s’interroge déjà sur la distinction au niveau sexuel (faible prégnance de filles) qui confirme son étiologie.

Il refuse l’origine psychogénétique de la pathologie. Pour lui, les causes environnementales ne sont pas valables :

‘« Le fait que ces enfants soient autistiques n’est pas dû à des influences d’éducation défavorables d’un enfant unique, mais à des dispositions héritées des parents, lesquelles sont aussi autistiques. » (Asperger, 1944).’

Asperger parle d’autisme congénital.

En 1971, Van Krevelen, lors de son travail sur la distinction entre la "psychopathie autistique" de Hans Asperger et l’Autisme de Kanner, émettait l’hypothèse que l’Autisme Infantile serait le résultat d’une combinaison de facteurs. Selon lui, l’Autisme de Kanner peut être considéré comme une pathologie du développement mental. Le comportement décrit par Asperger correspondrait à un trait familial de personnalité transmis par la lignée masculine.

U. Frith (1989) a expliqué que la distinction étiologique entre Asperger et Kanner provenait d’une perception différente de la pathologie. Cette distinction serait due au constat que les deux chercheurs ne travaillaient pas sur la même pathologie :

‘« …la définition donnée par Asperger de l’autisme, ou, selon ses propres termes, de la "psychopathie autistique", est bien plus large que celle de Kanner. Asperger y inclut des cas présentant des lésions organiques graves ainsi que des cas frisant la normalité. De nos jours, l’appellation "syndrome d’Asperger" tend à être réservée aux rares enfants autistiques presque normaux, qui sont intelligents et dont les aptitudes linguistiques sont très développées. Il est clair que telle n’était pas l’intention d’Asperger, mais l’existence de cette catégorie s’est avérée utile du point de vue clinique. Quant à l’expression "syndrome de Kanner", elle est aujourd’hui souvent utilisée à propos des enfants qui présentent une constellation de caractéristiques classiques, "nucléaires", étonnamment semblable – jusque dans les détails – à celles que Kanner avait identifiées dans sa première et brillante description. Cette catégorie s’avère également utile du point de vue clinique, puisqu’elle fournit une image type. » (Frith, 1989)’

Nos travaux iraient dans le sens de ces propos : nous ne pourrons approfondir l’étiologie de l’Autisme Infantile qu’une fois que nous aurons identifié des sous-groupes à caractéristiques développementales précises, tels que ceux que nous avons établis dans le cadre de notre méthodologie.