Le langage

Les troubles du langage, comme l’a indiqué dès le début L. Kanner, font partie de la symptomatologie de l’Autisme Infantile. Leur étude semble permettre de porter un pronostic sur le devenir de la personnalité de l’enfant au diagnostic d’Autisme Infantile. La sévérité de ces désordres varie selon les cas : soit le langage ne se développe pas, soit il apparaît précocement mais reste peu communicatif, soit il apparaît tard plus ou moins altéré et pauvre.

La moitié des enfants porteurs d’un diagnostic d’Autisme Infantile ne possédera jamais un langage à valeur communicative, même si certains répètent en écho certains mots, voire certaines phrases. Un petit nombre seulement possédera un langage évolué à l’âge adulte. Des anomalies persisteront cependant : utilisation et compréhension littérales des mots et des expressions, difficultés en général à comprendre l’abstraction, très gros problèmes avec les mots polysémiques, ou qui expriment des nuances. L’inversion pronominale est très fréquente de même qu’une confusion entre les mots et les concepts qui vont par paire : dessus-dessous, avant-après, cuillère-fourchette, etc. Les néologismes sont également fréquents chez l’enfant et peuvent persister chez l’adulte. Enfin, certains enfants parlent par mots isolés, par bouts de phrases ou par langage gestuel et par écrit (lorsque ceci leur a été enseigné).

Certains spécialistes ont tenté de mettre en place des valeurs pronostiques quant au lien entre l’évolution du langage et l’adaptation ultérieure. Eisenberg & Kanner (1956), dans une étude de 63 cas (pour lesquels L. Kanner avait posé un diagnostic d’Autisme Infantile dix ans auparavant), ont observé que 31 de ces cas ne possédaient pas de langage intelligible à l’âge de cinq ans. Parmi ces derniers, 30 n’ont fait preuve d’aucune adaptation sociale, et un seul a fait quelques progrès. Sur les 32 qui parlaient au même âge, 3 se sont relativement bien adaptés tout en présentant un caractère psychotique, 13 se sont adaptés médiocrement, et 16 ont présenté une évolution très défavorable. B. Bettelheim (1969) confirme l’importance pronostique du langage. En revanche, le mutisme n’est selon lui pas suffisant pour poser un pronostic défavorable.

Quelques limites sont à apporter quant à ces données pronostiques. Il est probable que le pronostic de l’Autisme Infantile soit défavorable chez un enfant qui n’a pas acquis le langage malgré une rééducation et une psychothérapie. Et réciproquement, il semble délicat de dire que le fait d’acquérir le langage de façon précoce ou de parler plus ou moins bien avant l’âge de cinq ans permet d’établir un pronostic favorable.