Cadrage et paramétrage de la tragédie : les bons offices de Cocteau, Dante et Marlowe

Under the Volcano est, selon son auteur, le pan infernal « d'une sorte de Divine Comédie ivre » (ADV, 25)500. Dans la lettre exégétique qu'il adresse en janvier 1946 à Jonathan Cape, Lowry explique son projet littéraire dans les termes suivants :

‘[I] conceived the idea of a trilogy entitled The Voyage That Never Ends for your firm (nothing less than a trilogy would do) with the Volcano as the first, infernal part, a much amplified Lunar Caustic as the second, purgatorial part, and an enormous novel I was also working on called In Ballast to the White Sea (which I lost when my house burned down as I believe I wrote you) as the paradisal third part, the whole to concern the battering the human spirit takes (doubtless because it is overreaching itself) in its ascent towards its true purpose. (SL, 63 / CL1, 503-504)’

Cette organisation tripartite de son œuvre, quoique remise en question par son « working project » de 1951, n’en demeure pas moins intéressante, dans la mesure où elle révèle l’importance qu’accordait Lowry au patronage de Dante dans la conception même de l’ensemble de son œuvre, et dans celle de son roman infernal en particulier. Toutefois, le triple parrainage de Dante, Marlowe et Cocteau (nous en respectons provisoirement l’ordre chronologique) annoncé plus haut, et corroboré par Lowry lui-même, quoique de manière dissociée, permet d’affiner l’interprétation du tragique moderne à l’œuvre dans Under the Volcano, et d’en sonder la spécificité. L’ordre de passage retenu est dicté par la nature même des apports de chaque hypotexte. Ainsi, La Machine Infernale de Jean Cocteau installe Under the Volcano dans une dimension tragique en le pourvoyant d’un mécanisme sollicité par le roman sur le plan structurel, diégétique et métaphorique ; l’Enfer de Dante lui procure essentiellement une toponymie qui balise le parcours du Consul et des autres protagonistes, tout en se laissant subvertir pour ne pas entraver l’aboutissement tragique du roman ; enfin, le Doctor Faustus de Marlowe fournit en quelque sorte l’habillage de la tragédie consulaire.

Notes
500.

Préface de l'auteur à la première traduction française du roman datant de 1948, intitulée Au-dessous du volcan, et parue en février 1949 au Club Français du Livre. La traduction est l'œuvre de Stephen Spriel, en collaboration avec Clarisse Francillon et l'auteur lui-même. La réédition que nous utilisons est celle parue en 1987 chez Gallimard dans la collection « Folio » en format de poche. Les références à cette traduction , ou à la préface, seront faites sous la mention ADV, comme ci-dessus.