Rapport de pouvoir

Le rapport de pouvoir s’établit entre les élèves et l’enseignant mais également entre les pairs. Dans l’expérience de Margargee (1969) rapportée par Lorenzi-Cioldi (1988) 115 , une dyade composée d’une fille dominante et d’un garçon peu dominant permet d’observer qu’au cours de l’activité proposée, dans 80% des cas, les stéréotypes de sexe sont activés : la fille dominante accepte de déléguer la tâche dirigeante au garçon.

Une étude plus récente de Fabienne d’Arripe-Longueville (1998) 116 présente d’autres résultats toujours pour une dyade. Les garçons débutants montrent des attentes d’efficacité, de la persévérance et des apprentissages plus élevés que ceux des filles. Par contre, les filles adoptent davantage de conduites de tutelle et de coopération que les garçons. Dans la gestion collective de la classe, les filles sont plus sensibles à la situation globale, elles ne souhaitent pas écraser les autres, ce qui conduit les meilleures d’entre elles à adopter, par solidarité, un comportement effacé. Pour les garçons, c’est la question du pouvoir qui est dominante et les conduit à des transgressions afin de dominer l’espace, l’enseignant ou les pairs. Pour Mosconi (1994) 117 ces comportements font partie des « effets d’attente » : l’observation des interactions en classe montre que les enseignants recourent souvent aux oppositions entre garçons et filles comme technique de « management » de la classe.Dans l’enquête sur la mixité lancée par le CRIS 118 , les annotations libres à propos de ce thème montrent que les enseignants, autant les hommes que les femmes, attribuent aux filles et aux garçons des rôles différenciés de management de la classe. Les filles, souvent appréciées dans leur rôle d’aide de l’enseignant, contribuent à apaiser le climat de la classe, à faire accéder les garçons au travail technique et aux apprentissages. Les garçons sont décrits comme apportant aux filles (et à l’enseignant) une stimulation, un dynamisme et leur permettant un accès à la compétition.

Le tableau ci-dessous illustre de manière synthétique quelques différences générales résultant des interactions reçues par les filles et les garçons à l’école.

Tableau 1: Différences résultant des interactions pour les filles et les garçons
Indicateurs Filles Garçons
Résultats scolaires Meilleurs résultats  
Attention de l’enseignant Inférieure (1/3) Supérieure (2/3)
Questions Plus simples Plus nombreuses
Réponses Ne reçoivent pas toujours de réponse  
Encouragements et critiques Peu nombreux Plus nombreux
Félicitations Sur le respect des directives Sur les compétences
Travail Appréciation sur la présentation Appréciation sur le contenu
Identification Groupe indifférencié Individus nommés

La réussite des filles et des garçons a partie liée avec les stéréotypes de sexe, les enseignants qui adhèrent eux-mêmes à des stéréotypes sexués exacerbent ces positions et contribuent sans le vouloir au maintien de l’asymétrie des sexes dans la classe.

Notes
115.

Lorenzi-Cioldi, F. (1988). Individus dominants et groupes dominés. Images masculines et féminines. Grenoble : PUG, Collection « vies sociales ». (p.50).

116.

D’Arripe-Longueville, F. (1998). Contribution à l’identification de processus cognitifs et de mécanismes interactifs impliqués lors de l’acquisition en dyade d’une habilité motrice complexe. Thèse de doctorat non publiée, Université Paris V-Sorbonne.

117.

Mosconi N. (1994). Déjà cité. (p.244). 

118.

CRIS Lyon I, enquête sous la direction de T.Terret et G.Cogérino (2002).