II.6. Gestion de l’apprentissage

Le curriculum de l’EPS est teinté de masculinité. Pourquoi en changer puisque les filles adhèrent facilement aux activités masculines alors que les garçons sont réticents aux activités féminines ?

Globalement elles sont peu motivées car nombre d’entre elles se trouvent « nulles » en EPS et estiment que cette discipline « fait baisser leur moyenne » de plus, il faut convenir que l’apprentissage d’une habileté motrice ne requiert pas les mêmes compétences que l’apprentissage d’une leçon. En EPS, les filles se trouvent confrontées à la nécessité du faire : elles sont mises en situation de fragilité surtout lorsqu’en contrepartie elles réussissent mieux dans les autres disciplines. Pour se rassurer, elles sont sérieuses dans leurs apprentissages, répétant avec application alors que les garçons retiennent l’exploit comme un signe de réussite et comme un acquis dû à leurs capacités physiques.

Une autre différence dans les apprentissages provient des situations elles-mêmes. Filles et garçons n’accepteront de se motiver pour la situation d’apprentissage que si celle-ci ne bouscule pas les normes de sexe et ne met pas en danger leur identité sexuée. On sait qu’à l’adolescence, les garçons se conforment davantage aux stéréotypes de sexe que les filles, ce qui peut être une explication de leur refus de pratiquer la danse alors que les filles acceptent des pratiques masculines. Il revient donc à l’enseignant de jouer sur la différenciation des modes d’entrée dans la culture de l’activité sélectionnée afin de stimuler les apprentissages de tous. Dans ce but Garnier 193 montre que l’enseignant peut intervenir sur la programmation des activités :

sur la durée des cycles : on sait que les groupes faibles ont besoin d’un temps d’apprentissage plus long

sur les modes de groupement et l’évaluation : laisser aux élèves la possibilité d’exprimer leur différence sur la notion d’exploit en gymnastique amène à construire des codifications uniques sur l’ensemble des postures valorisées par les filles ou les garçons.

On regrette alors que les activités connotées féminines soient moins programmées, elles conviennent aux apprentissages des élèves des deux sexes lorsque l’enseignant permet à chacun d’y entrer par des situations que l’on jugera acceptables sans renier son sexe.

L’analyse anthropologique de l’activité en s’appuyant sur les logiques d’action et en tenant à l’écart la construction de l’APSA codifiée et normée par l’histoire et les valeurs sociales 194 permet d’accéder à des situations d’apprentissage moins connotées sexuellement.

La gestion de l’espace, du temps, des groupes et des apprentissages sont des dispositifs dont dispose l’enseignant pour permettre à tous les élèves d’accéder aux apprentissages en EPS dans les meilleures conditions.

Notes
193.

Garnier, A.(2004). Filles-garçons, une différence parmi tant d’autres. La mixité en question. Contre pied. EPS sports cultures, 15, 53-57.

194.

Le travail de Paul Goirand dans ce domaine constitue une œuvre de premier plan, servant de référence.