III.2. Nouvelles approches sur le genre

De nouvelles approches émergent dans différents champs grâce au concept de genre (Fougeyrollas-Schwebel, 2003).

Par exemple en STAPS, Menesson 305 explore les modes de construction de l’identité sexuée des femmes qui s’engagent dans des sports très masculins comme le football, la boxe ou l’haltérophilie et repère comment leur présence questionne et modifie les rapports de sexe. Biache analyse la sexuation féminine au sein des clubs de handball, et les rapports qu’entretiennent joueuses et joueurs (Biache, 1996) 306 .

Une autre approche explore les processus de socialisation dans les interactions.

Vigneron (2004) 307 explore les différences d’évaluation en EPS en comparant les notes des filles et des garçons selon le sexe de l’enseignant.

D’autres travaux s’intéressent aux perceptions différenciées des filles et des garçons par rapport au soutien du professeur et aux notes obtenues (Lentillon, 2004) 308 ou aux perceptions à partir des feed-back de l’enseignant (Nicaise, 2004) 309 .

Ces études effectuées dans le cadre du sport ou de l’EPS prennent en considération non plus le sexe qui conduit à une observation dichotomique selon les deux « natures » biologiques mais le genre qui permet de multiplier le repérage non plus sur deux pôles exclusifs l’un de l’autre (soit femme, soit homme) mais simultanément sur les pôles féminin et masculin. « prendre en compte leur genre conduit à sortir du schéma stéréotypé et volontiers caricatural » (Cogérino, 2004) 310 . D’ailleurs Hurtig et Pichevin (1985) 311 font remarquer que la variabilité entre les sexes est moins importante que la variabilité au sein d’un même groupe de sexe. Le genre permet également de prendre en considération le poids culturel et social de l’individu qui transparaît à travers les croyances, valeurs, attitudes, stéréotypes qu’il véhicule. Le sport et l’éducation physique sont intégrés dans cet environnement social, le genre marque aussi bien les enseignants que les élèves dans leurs rapports à ces pratiques.

Les analyses sur le genre se doivent de demeurer dynamiques. Ainsi elles éviteront de s’enfermer dans la seule exploration de l’identité féminine mais s’intéresseront à l’action individuelle et collective des acteurs. Certains auteurs proposent de mettre en débat les différentes perspectives et de faire le point sur les apports des différentes recherches issues des différents champs disciplinaires.

‘« Partir d’une analyse des diverses terminologies en usage dans les enseignements et les recherches : études sur le genre, études sur les rapports sociaux de sexe, rapports de genre, inégalités entre les genres, inégalité de genre. Ou encore faire l’historique du développement du domaine et procéder à l’examen raisonné des enseignements » (Fougeyrollas-Schwebel 2003) 312 .

Le concept de genre est aujourd’hui polysémique et polémique. Pourtant il possède des atouts en tant que concept tout d’abord par la richesse qu’il permet dans la lutte contre les inégalités dont les femmes sont l’objet, mais aussi par son évolution dynamique, constructive, par sa reconnaissance institutionnelle et universitaire 313 .

Le genre est un construit social qui permet de dépasser le modèle binaire et exclusif du sexe. A partir de la conceptualisation du genre on ne naît plus seulement femme ou homme mais on construit son identité comme femme masculine, féminine ou androgyne, de même que l’homme peut se construire comme féminin, androgyne ou masculin. Ce concept controversé ouvre néanmoins de nouvelles perspectives de recherches notamment dans les pratiques sportives et l’éducation physique. Si les approches féministes tout d’abord situées aux Etats-Unis étaient initialement centrées sur la construction sociale de la féminité, de nouvelles approches s’intéressent aujourd’hui aux masculinités.

En EPS, les problématiques amorcent des analyses sur les constructions des inégalités ou sur les discriminations liées au genre.

Notes
305.

Menesson C. (2001). « Rapports sociaux de sexe et identités : le cas des femmes engagées dans des sports « masculins », le football et la boxe. In UTINAM, 5, Revue de sociologie et d’anthropologie, « Le genre : de la catégorisation du sexe ».

306.

Biache, M-J. (1996). Déjà cité.

307.

Vigneron, C. (2004 a). Déjà cité.

308.

Lentillon, V. (2004). Privation, justice, inégalités : perceptions différenciées chez les filles et les garçons au niveau des notes et du soutien obtenu en EPS ? In G. Cogérino. Filles et garçons en EPS. (pp.181-198). Paris : Revue EP.S.

309.

Nicaise, V. (2004). Les feed-back : perceptions différenciées chez les filles et les garçons ? In G. Cogérino. Filles et garçons en EPS. (pp.199-220). Paris : Revue EP.S.

310.

Cogérino, G. (2004a). Sexe et genre en EPS. In G. Cogérino. Filles et garçons en EPS. Paris : Revue EP.S. (p.41).

311.

Hurtig, M.C. et Pichevin, M.F. (1985). La variable sexe en psychologie : donné ou construit. Cahiers de Psychologie cognitive, 5/2, 187-228.

312.

Fougeyrollas-Schwebel (2003). Déjà cité.

313.

Le colloque « Le genre comme catégorie d’analyse » tenu à l’Université Paris 7 Denis Diderot en mars 2002 constitue la première manifestation publique du RING : Réseau Interdisciplinaire et Inter-Universitaire National sur le Genre.