I.3. Discussion

D’une manière générale, on note une discrimination sexuée des interactions selon le sexe des élèves : les garçons reçoivent plus d’interactions et d’une durée plus longue que les élèves filles conformément aux résultats des recherches antérieures effectuées sur les observations en classe. Ce sont bien les interactions initiées par les enseignants qui déterminent l’avantage du nombre et de la durée en faveur des garçons et non les interactions à l’origine des élèves. On remarque d’ailleurs qu’il y a moins d’interactions à l’origine des élèves pour les groupes masculin et androgyne.

• L’effet du sexe de l’enseignant est significatif, les femmes interagissent plus avec les filles et moins avec les garçons que les hommes, ce qui contrarie les résultats des recherches antérieures dans lesquelles les femmes et les hommes interagissent tous deux en faveur des garçons.
• L’effet de genre n’est pas significatif sur la quantification des interactions pour l’ensemble des trois APSA. Ce résultat invalide notre hypothèse du point de vue statistique.

Cependant il doit être nuancé par divers arguments.

On note un effet de genre significatif quand il est croisé avec l’effet de sexe de l’enseignant.

Par exemple pour les deux groupes les plus hauts sur l’échelle de masculinité (masculin et androgyne) on note une distinction entre les femmes et les hommes. On note le même effet pour le groupe le plus haut sur l’échelle de féminité (groupe de genre féminin).

• Un effet s’opère sur l’APSA : la gymnastique montre des effets plus marqués que les deux autres activités.

Si l’on n’obtient pas de résultat significatif ni pour la variable genre de l’enseignant ni pour la variable sexe de l’enseignant dans les deux activités badminton et handball, pour l’activité gymnastique l’effet est singulièrement marqué. Il semble que l’on puisse se questionner sur la connotation de l’APSA. Ainsi que nous l’avons montré dans l’étude épistémologique notamment au niveau de l’analyse des contenus scolaires, les contenus présentés dans les activités sont susceptibles de produire un effet non neutre qui serait apparent dans ces analyses statistiques. Ainsi pour les 3 APSA les effets sont différents.

• En gymnastique, les enseignants hommes et les femmes féminines favorisent les garçons comme s’il fallait particulièrement les aider et les soutenir pour qu’ils accèdent à cette activité connotée féminine.
• En badminton, les filles reçoivent légèrement plus d’interactions que les garçons ⁴⁴⁹ comme si les enseignants estimaient que les filles puissent accéder à cette activité connotée neutre, sans trop de difficulté. Les apprentissages seraient à leur portée dans cette activité considérée comme facile pour des débutant(e)s en milieu scolaire.
• En handball, le nombre et la durée des interactions des filles sont très proches de celles des garçons ⁴⁵⁰ . On peut objecter que l’on n’observe pas dans cette activité connotée masculine, la même stimulation pour les filles que celle accordée aux garçons pour l’activité gymnastique. Dans cette dernière, les enseignants aident particulièrement les garçons, alors qu’en handball, ils n’aident pas particulièrement les filles. Il faut remarquer en sus que le nombre des interactions n’est pas le gage d’un contenu visant à aider dans l’apprentissage ou à motiver. Par exemple, on peut entendre à l’intention d’une fille les remarques suivantes :
• • De la part d’un homme : « tu l’as regardé (prénom fille) est-ce que tu vas l’empêcher de tirer en le regardant, tu vas le faire fondre ? »
  • De la part d’une femme : « (prénom fille), pour attraper la balle sort les mains de tes poches. » (en lui touchant la main et en mimant le geste) »

La série d’analyses statistiques a permis de tester l’existence de différences liées au genre de l’enseignant, à son sexe et au sexe de l’élève, tout en activant ces variables en fonction des APSA. Il s’avère que pour les enseignants l’effet du sexe paraît plus marqué que l’effet du genre.