7.2. Les conceptions de l’enseignant : une définition

Les conceptions de l’enseignant nous semblent pouvoir être caractérisées de la façon suivante :

• Les conceptions des enseignants concernent le monde éducatif, ses acteurs et les apprenants.
• Les conceptions se manifestent par ce que font et disent les enseignants. Elles servent de cadre de référence. Une partie des conceptions naît d’une certaine prise de distance de l’action, et en partie d’une observation réfléchie. Elles ont des conséquences sur les schèmes d’action.
• Ce sont des modèles partiels, provisoires et largement implicites.
• Elles expriment une grande part de subjectivité. Elles ne sont pas absolues, et ne peuvent être vérifiées expérimentalement, mais le sont « très souvent » dans la tête d’un enseignant qui reconnaît souvent dans sa pratique une validation de ses conceptions, d’où un renforcement avec l’expérience plutôt qu’une remise en cause.
• Au lieu d’évoluer pour unifier les contradictions, elles peuvent au contraire les rationaliser et tenter de les faire disparaître. Par exemple, un certain discours sur les classes hétérogènes va dans ce sens : l’hétérogénéité est un problème, donc il faut l’éliminer, et donc former des classes homogènes car « on ne peut enseigner que dans des classes où les élèves ont un niveau voisin ». Cette conception résout le problème en le supprimant. Une autre attitude serait de trouver un modèle qui intégrerait l’hétérogénéité dans le processus d’apprentissage, ce qui conduirait à modifier une conception.
• Elles sont souvent en porte-à-faux avec des modèles venus des sciences de l’éducation ou produits par les didactiques des disciplines. Par exemple, le constructivisme entraînerait des conséquences sur l’organisation de la classe, qu’on n’observe pas très souvent dans la réalité. On peut supposer que les conceptions des enseignants ne sont pas très souvent « constructivistes » alors que les institutions de formation semblent l’être.
• Les conceptions des enseignants peuvent s’opposer aussi aux conceptions de certains acteurs, comme les hommes politiques, les administrateurs, les parents. Ces différences de conceptions se peuvent se traduire par des jugements de valeurs : par exemple, pour un ministre, les enseignants pourraient être conservateurs ou même paresseux, parce qu’ils ne voudraient pas s’adapter, évoluer, bref, aller dans le sens des conceptions du ministre. Les conceptions dépendent largement de la position que l’on occupe dans la pyramide éducative.

Interviennent aussi dans la constitution des conceptions :

• Les valeurs personnelles: une idée de l’homme, de l’organisation sociale sinon idéale, du moins souhaitable.
• Les habitudes, les préjugés, les pesanteurs culturelles.
• Les modèles et les réflexions théoriques. Certains de ces modèles sont rencontrés lors de la formation initiale, mais des conversations, des stages, des rencontres ont aussi leur importance.
• Les instructions officielles, les modes. Les instructions officielles peuvent être perçues comme une expression de certaines modes qui vont durer une dizaine d’années, puis passer et être remplacées par d’autres instructions qui vont correspondre à d’autres modes.