5. L’évolution du système

5.1. Les contradictions du système le font évoluer

Une activité n’est pas isolée des autres, et il y a constante interaction. À l’intérieur même du système, l’apparition de contradictions va contraindre l’activité à évoluer. Engeström distingue 4 niveaux possibles de contradiction. Une activité, dite « centrale » peut être en relation avec des activités « périphériques ».

  • Niveau 1 : contradiction concernant chacun des nœuds du réseau. Par exemple, dans l’activité du médecin, celui-ci peut avoir à sa disposition une grande quantité de médicaments. Chaque médicament, outre son efficacité médicale, a un prix, il fait l’objet d’une publicité, il rapporte de l’argent à l’industrie pharmaceutique. Le médecin doit faire face à des contradictions entre son souci de prescrire un médicament efficace, et les publicités provenant de l’industrie pharmaceutique. Dans une classe, des outils peuvent conduire à des démarches contradictoires ou entraîner vers des pistes sans issus.
  • Niveau 2 : ces contradictions concernent les rapports entre deux nœuds du réseau. Des patients peuvent se présenter avec de nouvelles formes de maladies, c’est-à-dire avec un objet un peu différent. Les instruments à la disposition du médecin peuvent être inefficaces, les règles en vigueur peuvent ne plus s’appliquer. Il faudra alors trouver une approche nouvelle et de nouveaux instruments. Dans une classe, un outil peut être efficace pour certains élèves, mais pas du tout pour d’autres parce qu’ils ont des habitudes mentales très différentes. Une contradiction peut apparaître entre des règles qui induisent des façons de faire en contradiction avec l’utilisation de certains outils. Un outil peut demander la construction pratique de solides volumineux alors que les règles édictées dans la classe exigent que rien ne doit se trouver dans la classe après la fin du cours. Comme il n’est pas possible d’entreposer les solides, leur construction se révèle impossible.
  • Niveau 3 : ces contradictions apparaissent quand un objet culturellement plus avancé est introduit dans l’activité. Un médecin peut utiliser des méthodes mises au point dans un autre établissement, en considérant par exemple une approche de la médecine plus globale. Ceci peut entrer en contradiction avec les convictions développées dans l’établissement et entraîner des tensions, et même bloquer le déroulement de l’activité parce qu’on vient de modifier l’objet de l’activité initiale. Dans une classe, l’utilisation d’ordinateurs demandant une approche très différente peut perturber les élèves. Ils pouvaient considérer que l’objet de l’activité était, auparavant, d’utiliser un modèle pour produire une analyse littéraire. Tout d’un coup, il va s’agir de construire le modèle qui permettra de produire l’analyse littéraire.
  • Niveau 4 : ces contradictions concernent les interactions entre l’activité et des activités voisines qui interagissent avec l’activité principale. Cette fois c’est un patient traité dans un hôpital utilisant des méthodes reposant sur une conception beaucoup plus globale de la médecine qui est envoyée dans un hôpital beaucoup plus traditionnel. Là encore, des conflits peuvent émerger et concerner directement la santé du malade. Dans une classe, un élève peut se trouver en contradiction parce que l’activité développée dans une discipline est beaucoup plus complète que dans une autre discipline, activité pouvant se résumer à un cours magistral. Cette différence dans les approches peut conduire à des contradictions pour les élèves.