I.3. L’évolution de l’enseignement du français en Chine

Avant 1949, date de la naissance de la Chine nouvelle, le français s’enseignait seulement dans quelques écoles catholiques dont les professeurs étaient le plus souvent des missionnaires français. A cette époque-là, le nombre d’apprenants était très limité. La plupart d’entre eux sont devenus professeurs de français après la fondation de la Chine populaire en 1949. Ils ont travaillé et travaillent encore dans les universités et instituts de langues étrangères. Depuis plus de quarante ans, de 1949 à aujourd’hui, la didactique du français langue étrangère a connu de grands changements en Chine.

Au début des années cinquante, seuls l’Université de Pékin et l’Institut des Langues étrangères de Pékin enseignaient le français. Plus tard, surtout depuis 1964, année où la France et la Chine ont établi des relations diplomatiques, d’autres universités et instituts de langues étrangères ont fait leur apparition: les Instituts de Langues étrangères de Shanghaï, de Guangzhou, de Xian, de Dalian, du Sichouan, de Tianjing, l’Institut de Diplomatie de Pékin, l’Université d’Economie et de Commerce extérieur de Chine, l’Institut des Relations Internationales, l’Institut des Langues de Pékin, l’Ecole normale de la capitale, l’Université des études internationales de Pékin, etc.

En ce qui concerne la didactique de l’enseignement du français, on a assisté au début des années soixante, à l’apparition de la première méthode française, Français fondamental. Cette méthode a été utilisée jusqu’en 1984.

Dans l’enseignement du français, la méthode traditionnelle, grammaire-traduction était le plus souvent utilisée par les enseignants chinois. Pourtant, certains ne se sont plus contentés de cette méthode et ce, pour des questions d’efficacité d’enseignement et de comportement des apprenants durant leur apprentissage. Ils ont tenté de chercher une nouvelle méthodologie pour faire progresser la didactique du FLE en Chine. C’est à ce moment-là que la méthode audio-visuelle a été introduite dans les écoles chinoises. Au départ, on n’était pas sûr de l’efficacité et de la qualité d’enseignement de cette nouvelle méthodologie.

Au début de l’introduction de la méthode audio-visuelle dans le cadre universitaire en Chine, on a utilisé deux méthodologies différentes (méthode traditionnelle et méthode audio-visuelle) dans deux classes différentes afin de comparer la qualité et l’efficacité de l’enseignement. Les résultats des essais ont montré que la méthode audio-visuelle était meilleure que la méthode traditionnelle, surtout au niveau de l’expression et de la compréhension orale. Les apprenants formés par la méthode audio-visuelle parlaient mieux que les apprenants formés par la méthode traditionnelle. C’est la première fois que l’on mettait au premier plan la compréhension et l’expression orale des apprenants, dans l’enseignement du français langue étrangère.

Dans certains instituts de langues étrangères, Voix et images de France est devenu le principal manuel des apprenants. Le niveau de français des apprenants s’est considérablement élevé. A cette époque-là, le gouvernement chinois a accordé une grande importance à l’enseignement des langues étrangères. Chen Yi, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, a été nommé Directeur de l’Institut de Diplomatie de Pékin. Il a prononcé, lors de la fondation de l’Institut, un discours d’inauguration dans lequel il a demandé aux enseignants de mettre au premier plan la formation de la compétence linguistique et celle de la communication. Ces orientations sont déjà significatives des préoccupations du gouvernement chinois. Et c’est dans ce contexte que la didactique du français langue étrangère a réaliséde grands progrès.

Pendant 10 ans (de 1966 à 1976, toute l’éducation scolaire, et parmi elle l’enseignement des langues étrangères dont celui du français), ont connu des pertes irréparables, provoquées par la Grande Révolution culturelle qui était en réalité un mouvement de destruction culturelle. Pendant cette période, toutes les écoles étaient pratiquement fermées et l’enseignement du français comme celui de tout autre enseignement a été presque supprimé. Les écoles supérieures ont arrêté tout recrutement et toutes activités pédagogiques. Il était impossible par conséquent de continuer à faire des recherches sur la didactique et sur la méthodologie d’enseignement du français.

A partir de 1972, les établissements supérieurs ont repris partiellement leur fonction sociale avec des apprenants choisis parmi les ouvriers, paysans et soldats. L’enseignement du français y était vraiment très difficile parce qu’il était interdit d’utiliser une méthode française et d’introduire des éléments culturels français. Dans les textes appris, il n’y avait que des termes politiques. Les apprenants n’avaient pas l’occasion de pratiquer le français avec des natifs pendant leur apprentissage car il n’y avait pas de lecteurs français à l’institut des langues étrangères. C’est ainsi que les apprenants parlaient le français à la chinoise.

A partir de 1977, l’enseignement chinois a été placé sous de meilleurs auspices, le système du concours national ayant été restauré. Les écoles supérieures ontrecommencé à recruter les étudiants parmi les lycéens ayant réussi au concours national. L’enseignement du français s’est alors déroulé normalement avec de nouvelles discussions sur le manuel, le programme d’enseignement, la structure des cours et les activités didactiques en classe. On a sans cesse conçu et amélioré le programme d’enseignement, bien qu’il soit resté traditionnel et administratif. Les cours nécessaires ont été élaborés: cours de lecture analytique, cours d’oral, cours d’audio-visuel, de lecture rapide, de civilisation française, de littérature française, de presse française, de traduction, etc. Désormais, les apprenants ont en général quatorze à seize heures de français par semaine. A la fin de chaque année universitaire, ils sont soumis à des examens. Les conditions de travail des enseignants se sont améliorées. Ils échangent souvent leurs expériences pédagogiques et discutent de la didactique des langues étrangères. Des colloques sont parfois organisés. Au cours du Colloque de Pékin qui a eu lieu en mars 1989, des représentants venus d’une quinzaine de pays ont présenté des conférences traitant de la didactique de la langue et de la culture française.

La plupart des enseignants commencent à étudier la théorie et la pratique des nouvelles méthodologies afin d’améliorer leur travail et d’élever plus rapidement le niveau de français de leurs élèves. On ne se contente plus de la méthode traditionnelle. Depuis ces dernières années, certains enseignants ont commencé à prêter une attention particulière à la formation de la compétence de linguistique et de celle de communication des apprenants en langue étrangère. C’est à partir de làque la didactique de française langue étrangère a fait beaucoup de progrès en Chine.