VII.3.4. La pratique langagière et le langage non verbal des enseignantes

A partir des années cinquante, certains chercheurs américains ont contribué à l’enrichissement de la réflexion théorique sur la communication, en indiquant que le langage gestuel peut varier considérablement selon les couches socioprofessionnelles, les régions et surtout les nations. Chaque individu participe à la communication avec un comportement différent selon ses codes culturels et personnels. Cette méconnaissance du langage des gestes peut engendrer et alimenter des malentendus tenaces. C’est pour cette raison que le langage gestuel est beaucoup étudié ces dernières années, non seulement dans la communication quotidienne, mais aussi dans l’événement d’enseignement / apprentissage, car « on ne peut pas parler sans bouger » 26 , y compris dans la classe de langue étrangère. Nous limiterons le langage gestuel au domaine d’animation des activités didactiques dans la classe de langue étrangère.

Dans l’organisation de la classe, le discours de l’enseignant joue un rôle important, mais il nous faut ne pas négliger les éléments non-verbaux qui sont indispensables à l’organisation des activités en classe. Selon C. Kramsch (1984 :20), « tous les éléments non-verbaux (hochements de tête, gestes de mains, expressions du visage, mouvements du corps), ainsi que les signaux acoustiques (intonation, ton, timbre de voix, accentuation) [qui] accompagnent cet échange et lui donnent un sens ».

Exemple issu du corpus EFp :

L’enseignante souhaite mettre les apprenants au niveau de la transposition, par le langage gestuel, après la pratique d’un élément linguistique « être né(e) + la date ». Le geste de l’enseignante se charge d’une fonction de communication en signalant que l’exercice linguistique est terminé pour le moment et que chacun doit répondre à la question en donnant son âge réel.

Dans l’animation des activités didactiques en langage non verbal, (comme cette étape se consacre à l’apprentissage de la culture française portant sur la fête de Noël,) l’enseignante française a indiqué la différence religieuse entre la France et la Chine : « vous » signifie ici la Chine, on y pratique le bouddhisme ; la marque « mais » annonce l’opposition et le pronom « je » représente ici la France où l’on pratique plutôt le  catholicisme. L’enseignante se sert du langage gestuel en faisant la croix pour assurer la compréhension de tous. Nous pouvons dire que dans l’enseignement de la langue étrangère, le langage non verbal, tel que le regard, le rire, le déplacement de l’enseignant, peut jouer un rôle important dans l’animation des activités didactiques.

En classes (1) et (3), il n’existe presque pas de langage non verbal dans la stratégie interactionnelle des enseignantes chinoises. Nous observons seulement et rarement le déplacement de l’enseignante dans la classe, pour mieux entendre ce que l’apprenant va dire.

La communication prend plusieurs formes, elle s’exerce dans plusieurs types de situations, avec plusieurs types de partenaires. Ces différences de formes sont toutes significatives dans l’interprétation du sens : la communication peut se réaliser par la voix, les signes en écriture, les gestes du corps, le rire, etc. Tous ces phénomènes donnent une constance à la relation entre les deux interlocuteurs.

Comme fonction interactionnelle, le rire peut jouer un rôle de communication dans l’interaction entre l’enseignant et les apprenants en classe de langue étrangère ; nous consacrons la partie suivante à l’analyse du rire dans l’animation des activités didactiques.

Notes
26.

J. Cosnier cité par C.Foerster, In  Variations et rituels en classe de langue  , page 73, Hatier-Credif, 1990, Paris.