2.3.5. Aspect métalinguistique

Le développement de l'interlangue est soumis à un processus de construction lexical qui peut être initié et surveillé par l'enseignant de langues. Mais appartient-il seulement à l'enseignant d'expliquer les règles de l'utilisation syntaxique et contextuelle des unités lexicales ? Est-il la seule personne qui peut savoir quel travail lexical peut être adapté dans une situation d'apprentissage ? Ou pourrait-on faire participer les apprenants à la réflexion sur la langue et sur les actions d'apprentissage effectuées par eux ? L'approche constructiviste, dans laquelle s'insère la construction de l'interlangue, se prête particulièrement à une réflexion de l'apprenant sur la langue, ainsi que sur les stratégies à adopter. Par ailleurs, en mentionnant la réflexion de l'apprenant sur la langue, nous sommes à l'aspect principal du concept métalinguistique. Le dictionnaire "Le Robert Méthodique" (1989 : 877) indique que le métalinguistique traite les éléments qui relèvent du métalangage, c'est-à-dire le langage avec lequel on parle d'une langue. Dans un discours métalinguistique, l'apprenant s'exprime alors sur le fonctionnement de la langue (cible) et il est amené à repérer des régularités ou irrégularités dans la langue.

Comme la métalinguistique, la métacognition renvoie à un comportement d'observation de la part de l'apprenant. Au lieu d'observer cependant la langue elle-même, on observe son propre processus d'apprentissage. La métacognition regroupe ensuite les connaissances métacognitives et les sentiments métacognitifs (Brink, 1997 : 38) : les sentiments métacognitifs concernent les représentations subjectives que les apprenants possèdent par rapport à leurs propres capacités. Les connaissances métacognitives comprennent à la fois le savoir sur sa propre personne et sur les stratégies d'apprentissage, ainsi que sur les processus cognitifs ayant lieu pendant la mémorisation.

Un développement des compétences métalinguistiques et métacognitives peut permettre à l'apprenant de travailler d'une manière plus autonome et d'influencer consciemment son processus d'apprentissage afin de faire évoluer son interlangue. Néanmoins, comment un enseignant peut-il développer la réflexion métalinguistique et métacognitive ? Il existe des apprenants qui assimilent le contenu sémantique d'un terme et les structures de la langue cible sans se poser des questions particulières par rapport au fonctionnement de la langue ou concernant les stratégies d'apprentissage. D'autres apprenants, possédant un style cognitif opposé, travaillent probablement mieux avec une grande réflexion métalinguistique et un degré de conscience plus élevé. Giaccobbé (1992 : 147) remarque à ce sujet que "la disparité des résultats nous fait penser à des processus différents".

Face à la disparité des apprenants, il convient certainement de trouver dans la pratique de l'enseignement quotidien des ajustements individuels, mais nous pouvons mentionner ici quelques actions générales : pour développer la réflexion métalinguistique, il paraît important d'inciter les apprenants à détecter eux-mêmes des mécanismes sous-jacents à la langue. Des fiches de travail comprenant des questions peuvent guider leurs réflexions. De plus, pour rendre plus efficace les activités métacognitives, celles-ci doivent être engagées dans un cadre préétabli (par exemple, un projet personnel). Après l'établissement d'un bilan de connaissances linguistiques, l'apprenant construit, avec l'aide de l'enseignant, un parcours personnel qui mentionne à la fois les outils et la méthode de travail envisagés ainsi qu'un planning de la périodicité du travail. Après l'accomplissement des activités, l'apprenant doit s'auto-contrôler afin de s'assurer de la réalisation du but fixé. Enfin, une attitude critique face à ses progrès personnels lui permet de constater ses acquisitions lexicales, mais aussi d'apercevoir d'éventuelles stagnations. Celles-ci pourront l'amener à changer de stratégie d'apprentissage, voire à abandonner un exercice mal adapté à ses besoins.