3.2.2. Mémorisation du vocabulaire

L'expérience montre que le statut de disponibilité des unités lexicales peut être très variable. Les unités lexicales peuvent être accessibles dans des tâches de rappel direct ou encore être seulement reconnaissables à partir de leur forme graphique ou auditive. De plus, leur enregistrement dans la mémoire a lieu pour des durées différentes (mémoire à court terme, mémoire à long terme). En proposant des activités langagières et des exercices de vocabulaire, l'enseignant vise généralement une ou plusieurs formes d'enregistrement des unités lexicales. En fonction du travail effectué par l'apprenant, il réagit avec un comportement de renforcement positif ou négatif.

Pour maintenir une unité lexicale dans la mémoire active, il convient de l'activer à plusieurs reprises. Les exercices constituent pour cela un bon moyen. Castellotti (1995 : 46) postule par ailleurs que "l'exercice s'avère fondamental pour la plupart des processus d'apprentissage". Ensuite, on peut distinguer d'une part, les exercices cognitifs faisant appel aux opérations de classification, les exercices de hiérarchisation et de construction de règles et d'autre part, les exercices non cognitifs comme les mnémotechniques, les associations par paires et les "pattern-drills" (Roher, 1990). Ces derniers visent à obtenir une réponse bien précise de la part de l'apprenant et on pourrait argumenter que cette forme d'exercice ne contribue pas à rendre une unité lexicale disponible pour un emploi libre. Néanmoins, il existe dans chaque langue des structures fixes qui ne peuvent être rendues disponibles en s'y habituant (Roher, 1990 : 70) :

‘"Es gehört heute fast zum guten Ton in der Fremdsprachendidaktik, den sogenannten behavioristischen Pattern-Drill abzulehnen. Dabei wird jedoch übersehen, daß es in der Grammatik jeder Sprache eine ganze Menge starrer assoziativer Systeme (patterns) gibt, die nur durch Habitualisierung abruffähig gespeichert werden können. (Roher, 1990 : 70)’

Lorsqu'il convient de retenir des structures langagières fixes comme, par exemple, les co-occurrents d'une unité lexicale, la solution idéale semble donc être de compléter les exercices cognitifs (visant une interaction sémantique avec le système d'interlangue) par des "pattern-drills". De cette manière, on peut favoriser d'une part, la création de plusieurs types de traces mnésiques et d'autre part, procéder à un entraînement des connaissances procédurales. En outre, on peut supposer que le sens d’un mot n’est pas toujours complètement saisi à partir d’une seule exposition à un mot. Ainsi, un seul contact avec une unité lexicale apprise nouvellement paraît insuffisant et l'apprenant devrait avoir besoin d'un contact répété avec l'unité lexicale nouvelle.

La mémorisation à long terme des unités lexicales nécessite un déroulement en plusieurs étapes de différents processus. Afin de pouvoir intégrer de nouvelles connaissances dans la mémoire, O'Malley et Chamot (dans : Bange et Jisa, 1994 : 30) supposent un processus d'encodage par quatre étapes successives : la sélection, l'acquisition, la construction et l'intégration. Pendant la sélection, l'apprenant fixe son attention sur une information lexicale particulière. Cette information est transférée, au cours d'un processus d'acquisition, de la mémoire de travail vers la mémoire à long terme. La construction consiste "à construire des liens internes entre les idées contenues dans la mémoire à court terme et à le structurer éventuellement à l'aide d'autres informations puisées dans la mémoire à long terme" (Bange et Jisa, 1994 : 30). Pendant la phase d'intégration, l'apprenant intègre les informations nouvelles dans les connaissances d'un domaine concerné. Le travail de l'enseignant consiste à amener les apprenants à parcourir ces différentes étapes. Il peut alors veiller à ce que l'apprenant sélectionne les éléments langagiers pour un traitement cognitif et qu'il les organise et les intègre dans sa base de connaissances.

Cette intégration provoque dans un premier temps un déséquilibre cognitif que l'apprenant va essayer de rétablir en développant des structures cognitives nouvelles. L'enseignant peut soutenir ce processus par des réactions face aux productions langagières des apprenants. Par ailleurs, Castellotti (1995 : 46) postule que "le renforcement ou une information sur la qualité du comportement améliorent l'apprentissage" et elle distingue deux moments différents pour l'intervention de l'enseignant : avant et après la réaction du sujet. Ainsi, l'enseignant peut, par exemple, anticiper un comportement spécifique de l'apprenant (la peur, par exemple) devant un exercice nouveau en proposant des explications. Après la production de l'apprenant, l'enseignant peut le féliciter ou encore critiquer la réponse donnée. Le renforcement fournie par l'enseignant peut être positif ou négatif et il va provoquer deux réactions différentes chez l'apprenant : avec un renforcement positif, on obtient une augmentation de la fréquence d'un comportement une fois qu'il s'est produit et la motivation du sujet est stimulée grâce au succès obtenu. Le renforcement négatif affaiblit un comportement ayant pris une direction non satisfaisante.