4.1. Le rapport pédagogique

Une relation pédagogique s'avère toujours très complexe puisque l'on note des influences multiples entre les personnes et les groupes. Aussi la place occupée par l'enseignant dans la classe est-elle en relation étroite avec le "rapport pédagogique", c'est-à-dire le comportement de l'enseignant, ses méthodes de transmission du savoir et les réactions des apprenants. Nous présenterons ci-dessous trois rapports pédagogiques différents et nous discuterons leur intérêt pour un apprentissage avec les produits multimédia.

La relation traditionnelle est basée sur une conception "verticale", c'est-à-dire l'information est transmise hiérarchiquement vers l'apprenant :

Figure 4 : conception "verticale" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 20)
Figure 4 : conception "verticale" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 20)

L'enseignant expose le sujet, l'apprenant écoute, prend des notes et répond éventuellement aux questions du maître. D'un point de vue psychanalytique, l'autorité institutionnelle se substitue ici à l'autorité parentale et le maître concentre inévitablement sur lui l'agressivité des élèves (Galisson, 1982 : 22). Ainsi, son action de transfert du savoir se situe dans un espace traversé de tensions et "il n'y a pas de véritable communication, puisque le transfert d'information s'opère à sens unique, du maître vers l'élève" (Galisson, 1982 : 20). L'apprenant reste passif quant à la gestion de son apprentissage et il se contente de mémoriser les informations langagières fournies par le maître. Sachant que le travail dans un environnement multimédia demande la prise d'initiative et une discussion entre l'enseignant et l'apprenant, ce rapport pédagogique classique ne peut donc pas être adapté pour un travail en autonomie guidée.

Dans une relation de type horizontale, le maître se positionne au même niveau que les apprenants :

Figure 5 : conception "horizontale" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 21)
Figure 5 : conception "horizontale" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 21)

Cette conception s'appuie sur les travaux de C.R. Rogers qui a étudié les attitudes dans les rapports maître-élève. En effet, les rapports entre le maître et l'élève sont caractérisés par des conflits opposant les apprenants au maître. Il convient de les accepter et même de les considérer positivement puisqu'ils sont des facteurs dynamiques de la relation pédagogique. Dans cette conception, l'enseignant est prêt à écouter les apprenants et à intégrer leurs éléments personnels dans la relation pédagogique. Ainsi, grâce à l'instauration d'un échange et d'une réciprocité, une communication devient possible. C'est une pédagogie de la négociation qui se base sur un échange et une discussion entre l'enseignant et les élèves. Les apprenants déterminent avec le professeur leurs besoins d’apprentissage et ils évaluent le déroulement des séances d'apprentissage. Il peuvent même se servir de la langue étrangère comme moyen de communication. Le cours de langue gagne alors "en authenticité et le processus d'apprentissage devient un sujet important en classe de langues. En outre, l'enseignant peut prendre le rôle de conseiller puisqu'il prend en compte les difficultés individuelles d'un apprenant. Cette relation est donc tout à fait possible dans un cadre de travail en autonomie guidée. Néanmoins, elle exclut un échange entre les apprenants eux-mêmes qui peut être précisément important lorsque les élèves travaillent devant un ordinateur.

  • Dans une relation "multipolaire" (Galisson, 1982 : 22), le maître se confond avec les élèves:
Figure 6 : conception "multipolaire" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 21)
Figure 6 : conception "multipolaire" de la relation pédagogique (dans : Galisson, 1982 : 21)

Ce modèle se base sur les recherches de K. Lewin (dans : Galisson, 1982 : 22) concernant la dynamique des groupes et l'idée du déterminisme du champ où chaque point du champ (c'est-à-dire chaque individu du groupe est en interaction avec les autres). Le maître perd de son pouvoir directif par rapport à la "relation verticale". La pression que chacun exerce dans le groupe est l'un des plus remarquables agents de transformation des individus. Il convient certes de tenir compte de la "vie affective des groupes" qui est souvent à l'origine des troubles qui perturbent les relations pédagogiques. Ainsi, l'enseignant doit travailler sur "l'ouverture à l'autre" et amener les apprenants à se respecter mutuellement. L'intérêt de ce modèle réside dans l'échange entre les apprenants. Lorsque ces derniers parviennent à s'ouvrir à l'autre, ils peuvent communiquer entre eux et traiter des questions et thèmes qui les intéressent particulièrement. Ils ont aussi l'occasion de faire part de leur propre opinion et de développer une réflexion sur les processus d'apprentissage. En salle multimédia, cette communication peut servir à une aide mutuelle. Enfin, cette relation multipolaire peut se traduire par une discussion virtuelle dans un forum de discussion où l'enseignant (en tant qu'animateur) se confond dans le groupe des participants.