3.2.3. Bilan

L'analyse des différents types d'exercices nous conduit à faire des remarques par rapport à sept points essentiels : le problème de la décontextualisation des exercices, le travail peu systématique, la difficulté de trouver des réponses justes, le guidage de l'apprenant, le traitement superficiel des informations lexicales, l'impossibilité d'un entraînement à l'encodage libre et l'enjeu de l'entraînement aux connaissances procédurales.

Dans notre analyse, il ressort qu'un grand nombre d'exercices sont présentés soit "en contexte réduit", soit "hors contexte", ce qui a des conséquences sur les conditions d'activation des unités lexicales. En effet, moins un exercice contient de liens contextuels, moins l'apprenant peut se baser sur des processus d'association avec une situation présentée et moins les processus perceptifs (anticipation du contenu) sont mis à contribution. Aussi les exercices présentent-ils une double lacune : la proposition d'un travail lexical peu systématique et la difficulté de trouver des réponses justes. Nous observons à ce sujet que, sans présentation préalable des unités lexicales, le choix des unités lexicales pour une révision systématique du vocabulaire est difficile. Indépendamment des connaissances de l'apprenant, la difficulté pour trouver des réponses justes peut provenir également du fait que plusieurs réponses soient possibles. De plus, il convient d'évoquer la nécessité de prévoir d'éventuels problèmes des apprenants en fournissant des règles sous-jacentes aux exercices.

Concernant le guidage de l'apprenant pour la recherche de la solution, nous avons constaté un manque de cheminement progressif vers la solution et un manque de participation de l'apprenant dans la recherche de la solution. Ainsi, les programmes présentent trop d'éléments en affichant, par exemple, tout de suite les unités lexicales à renseigner dans les champs vides des "exercices à trous". Dans le cas de propositions de solutions à choix multiples, l'attention de l'apprenant est même détournée de la tâche de rappel vers une activité d'élimination des réponses incorrectes.

L'ambition des concepteurs de créer des produits motivants et ludiques implique le risque de guider trop l'utilisateur dans le travail de recherche des unités lexicales. Le faible effort cognitif engagé a alors comme conséquence un travail relativement superficiel qui laisse peu de traces mnésiques. En outre, les apprenants sont plus amenés à procéder par tâtonnement que par réflexion et recherche de solutions. Suite à ces constats, nous préconisons donc une observation consciente et réfléchie des exemples proposés dans les exercices et une incitation vers un travail métacognitif. De plus, on pourrait critiquer une certaine "insuffisance des exercices structuraux" (Galisson, 1980 : 130) et mettre en avant le besoin des élèves de confronter leurs acquisitions implicites dans le cadre d'une démarche explicite.

Enfin, la correction automatique proposée par les cédéroms n'a pas que des avantages. Ainsi, l'apport de la machine consiste plutôt dans la rapidité de la vérification des réponses et la simulation de l'existence d'un enseignant. Cela peut être un facteur de sécurité pour l'apprenant. Par rapport au travail possible sur un support papier, la vérification automatique des exercices fermés n'est cependant pas une invention spécifique puisque l'apprenant pourrait lui-même effectuer la correction des exercices à l'aide d'une solution sur support papier. En outre, lorsque la machine barre seulement la réponse erronée, l'apprenant ne peut plus comparer les deux réponses pour chercher l'origine de son erreur. L'apprenant n'est pas invité à un travail métacognitif et il est tenté de traiter la correction d'une manière superficiel.

Il semble donc important que l'apprenant ait l'occasion de s'exercer dans l'emploi libre des unités lexicales, ce qui pose évidemment des problèmes de correction des erreurs. Or, plus la tâche de l'exercice est ouverte et laisse de liberté à l'utilisateur, plus il faut prévoir par avance les réponses possibles si on souhaite proposer une correction par la machine. Il semble n'y avoir qu'une solution pour sortir de ce "cercle vicieux" : ouvrir les exercices pour laisser plus de possibilités au développement lexical et accepter que la machine ne corrige pas l'ensemble des réponses des apprenants. En complément, l'apprenant peut participer à l'évaluation de sa production. Enfin, l'enseignant de langues peut intervenir comme correcteur supplémentaire.

L'intérêt des exercices de rappel se trouve alors dans les possibilités d'entraînement des connaissances procédurales en visant la vitesse d'activation des unités lexicales. De plus, les exercices de rappel peuvent prévenir le passage des connaissances lexicales de la mémoire active vers la mémoire passive. Pour cela, une insertion contextuelle semble par contre indispensable afin de réunir l'ensemble des possibilités de travail lexical.