4.1. Les tâches assumées par l'enseignant de langues

Le travail avec les cédéroms commence nécessairement par une phase de préparation qui concerne le matériel (cédéroms et fiches méthodologiques), la formation des apprenants et l'organisation d'un scénario de travail. Quant au matériel, il convient d'équiper le centre de ressources avec des cédéroms susceptibles de correspondre au public utilisateur. Afin de guider les apprenants, l'enseignant peut aussi rédiger des "fiches d'accompagnement" pour chaque cédérom : il y fait apparaître le niveau linguistique requis, les compétences langagières visées, des indications sur le contenu et une méthodologie conseillée. Cette fiche peut par la suite servir de support pour des rédactions libres en langue cible qui seront corrigées par l'enseignant. Une rubrique où l'apprenant note les difficultés rencontrées permet de préparer un échange avec l'enseignant lors des entretiens individuels de conseil. En ce qui concerne les apprenants, l'enseignant doit les former à la méthodologie du travail en autonomie ainsi qu'aux stratégies de décodage et d'encodage des unités lexicales. Cette formation à l'autonomie peut prendre une forme plus ou moins soutenue, mais l'expérience montre que "les pré-requis en terme d'autonomie chez les étudiants ne sont pas très élevés au départ" (Mangenot, 2003). En outre, il convient de déterminer un scénario de travail dont nous distinguons deux phases : premièrement, le travail en présentiel, c'est-à-dire en présence de l'enseignant de langues, et deuxièmement, le travail en autonomie guidée, c'est-à-dire sans la présence directe de l'enseignant de langues.

  • Le travail en présentiel assure une régularité de travail, mais sans liberté d'horaire. C'est un scénario d'apprentissage relativement guidé (par l'enseignant) qui peut se justifier comme introduction à une phase de travail en autonomie guidée pendant laquelle l'apprenant peut avoir besoin de l'assurance technique, "humaine" et méthodologique de l'enseignant. A cette fin, on peut imaginer deux possibilités : dans une première forme, tous les apprenants travaillent, en avançant à leur rythme, individuellement ou en dyade devant les machines. L'échange entre deux apprenants du même binôme encourage leur réflexion sur la langue puisqu'ils peuvent formuler leurs difficultés langagières en même temps que la difficulté se produit et se concerter pour trouver une solution. A ce sujet, Mangenot (2000 : 200) rapporte, après une expérience menée avec des dyades d'étudiants, que "la collaboration est un des principaux apports des séances en salle informatique". Dans une deuxième forme, la classe est partagée en deux groupes effectuant un travail différent (un groupe travaille sur les cédéroms alors qu'un autre groupe effectue un travail d'expression orale). Le temps d'écoute relativement long qui est nécessaire dans un cours classique est transformé en un travail individuel sur cédérom. De cette manière, on obtient une variation des activités et une intensification du travail de l'expression orale.
  • Pour le travail en autonomie guidée, l'apprenant travaille sans la présence directe de l'enseignant de langues en organisant lui-même ses séances d'apprentissage avec les cédéroms. Il sélectionne les thèmes et les activités l'intéressant personnellement et correspondant à ses besoins individuels. L'apprenant travaille dans un environnement d'apprentissage constructiviste qui est "centré sur l'élève". C'est un apprentissage cumulatif puisque les connaissances sont construites sur la base des acquis, il est autoréglé grâce à l'aspect métacognitif, il est orienté vers un but défini par l'apprenant, et il est situé parce que les situations d'apprentissage sont ancrées dans des contextes de la vie sociale (Legros et Crinon, 2002 : 40).

Par ailleurs, l'enseignant accompagne le travail des l'apprenants en se tenant à leur disposition pour répondre à leurs questions. Dans la première forme du "travail en présentiel", il circule dans la salle et répond aux questions posées par les apprenants : lorsque les apprenants ne parviennent pas, par exemple, à expliquer la raison d'une erreur signalée par le cédérom, l'enseignant les aide à trouver la raison de l'erreur et proposer une démarche de remise à niveau. Ainsi, l'enseignant prend le rôle d'un conseiller qui est à l'écoute des problèmes individuels des apprenants, tout en risquant de devoir répondre plusieurs fois à la même question. En cas de résultats insatisfaisants, l'enseignant réoriente le travail de l'apprenant en suggérant un changement de méthode ainsi que des activités différentes et l'encourager à continuer ses efforts. Quand les apprenants ont acquis des habitudes de travail nécessaires, la présence de l'enseignant n'est plus nécessaire pendant la totalité du travail avec le cédérom. C'est ce que montre une observation d'étudiants ayant déjà travaillé quelques heures avec les cédéroms. En effet, l'enseignant n'est sollicité que pour quelques questions de non compréhension d'unités lexicales. Il est cependant apparu que les étudiants n'ont pas entamé de réflexions sur l'utilité du travail lexical proposé par le cédérom.

Dans la deuxième forme du "travail en présentiel", l'enseignant profite du temps dégagé par la machine pour encadrer un petit groupe d'apprenants (restant dans une partie de la salle) pour un travail d'expression orale qui peut avoir un lien thématique avec le travail proposé par les cédéroms. Néanmoins, les déplacements des apprenants entre les deux activités méritent d'être bien organisées pour éviter une perte de temps due au démarrage de l'activité. Ainsi, les apprenants doivent savoir manipuler les cédéroms et avoir un but précis à atteindre, voire un travail spécifique à accomplir.

En outre, les apprenants travaillant dans un scénario de "travail en autonomie guidée" peuvent le joindre par correspondance électronique ou lors des rendez-vous individuels de conseil (par une permanence au bureau). Pour les apprenants travaillant "en présentiel", le travail de l'enseignant change en fonction du scénario choisi.

Enfin, il appartient à l'enseignant de corriger les productions libres que la machine ne sait pas traiter. Avec les corrections, l'apprenant obtient un feedback constructif sur lequel il se base pour poursuivre son travail et pour développer son interlangue. Enfin, pour répondre aux exigences institutionnelles, l'enseignant évalue le travail lexical dans son ensemble.