3.8. Bilan par rapport au décodage des unités lexicales

Nous avons étudié différentes stratégies de décodage des unités lexicales où l'apprenant peut utiliser l'image d'une part, comme référent direct vers le concept mental auquel renvoie une unité lexicale inconnue et d'autre part, pour se faire une idée de la situation générale évoquée dans le texte accompagnant l'image. Les images rencontrées sur les sites "grand public" doivent parfois être interprétées lorsqu'elles jouent le rôle d'une métaphore. L'activation des connaissances du monde a ici toute son importance. En effet, les connaissances de l'apprenant aident au décodage des unités lexicales lorsque leur activation est possible, mais il existe des situations où leur manque devient nuisible : nous avons vu à ce sujet le cas du manque de connaissances générales et l'inexistence du concept mental chez l'apprenant ainsi que le cas de l'activation de connaissances n'ayant pas de rapport avec l'unité lexicale à décoder. Dans le dernier cas, l'apprenant risque d'être induit en erreur. Nous avons aussi remarqué que les informations proposées sur les pages des sites "grand public" ne correspondent pas toujours aux besoins d'un apprenant. Ainsi, les concepteurs de ces pages supposent la compréhension des termes utilisés et ne fournissent que des informations spécifiques qui n'aident pas toujours à la compréhension des unités lexicales inconnues. Nos observations rejoignent ainsi les remarques de Brink (1997 : 45) qui rapporte les conclusions de différentes théories concernant le rôle des connaissances préalables de l'apprenant :

‘"Allen Ansätzen ist dabei gemeinsam, daß das Vorwissen des Lerners im Vorfeld der Gestaltung computergestützten Lernens zu erheben und stärker zu berücksichtigen ist, um die Integration neuen Wissens zu erleichtern". (Brink, 1997 : 45)’

Par ailleurs, l'organisation hiérarchique des pages des sites Internet "grand public" ouvre la voie à des stratégies de décodage particulières à ce type de support. Nous avons vu que le rapport entre la structure hiérarchique des sites Internet et la structure lexicale ressemble étroitement (avec son organisation par catégories lexicales et l'existence d'hypéronymes et d'hyponymes) à l'emboîtement des informations sur les sites Internet. Grâce à cette ressemblance des structures, nous avons pu présenter trois types de stratégies de décodage : le transfert d'un terme vers un co-hyponyme, le transfert d'un hyponyme vers un hypéronyme et le transfert d'un hypéronyme vers un hyponyme. Même si cette stratégie reste moins efficace parce que les informations sémantiques transférables restent trop générales, il est apparu que la structure de l'hypertexte contribue à la construction des connaissances lexicales. Notre étude fournit alors quelques données concrètes pour soutenir les hypothèses évoquées dans la littérature par rapport à la ressemblance de la structure hypertextuelle et l'organisation des connaissances dans la mémoire :

‘"Die Bedeutung von Hypertext liegt vor allem in seiner Ähnlichkeit zu den in den Schemaansätzen beschriebenen Wissensstrukturen." (Brink, 1997 : 85) ’

De plus, il est possible de se servir des actions déclenchées par le programme et d'une aide technique faisant apparaître en entier les unités lexicales abrégées. La technique numérique sert ici directement pour le décodage des unités lexicales.

Les aides didactiques sous forme d'explications de vocabulaire fournissent également un soutien appréciable pour le décodage des unités lexicales : elles permettent de diminuer le degré de difficulté en proposant des termes plus courants ou encore des paraphrases. De plus, le recours aux images s'avère d'une grande utilité pour décoder des unités lexicales qui renvoient à des objets concrets. Néanmoins, en raison de l'inexistence de synonymes absolus et de la nécessité d'utiliser dans certains cas des termes moins courants, la rédaction de ces aides lexicales n'est pas toujours adaptée pour expliciter clairement l'ensemble des traits sémantiques. Ces aides pourraient certes être présentées sur un support papier, mais l'utilisation des liens hypertextuels et leur affichage dans un cadre en bas de l'écran rend leur consultation plus rapide, plus aisée et plus pratique puisque l'apprenant voit parallèlement la phrase contenant l'unité lexicale inconnue et l'explication de vocabulaire.

Nos enquêtes auprès des étudiants ont pu confirmer que les explications de vocabulaire ne correspondent pas toujours aux besoins des apprenants français. Il en ressort donc d'une part, l'importance de précéder la conception des aides lexicales d'une étude spécifique des difficultés des apprenants et d'autre part, la difficulté de concevoir une aide adaptée à un large public d'apprenants ayant des langues maternelles différentes et différentes cultures et connaissances du monde.

En ce qui concerne les stratégies de décodage, nous avons obtenu différents résultats au sujet de la capacité des étudiants à utiliser ces stratégies. Cela peut être dû à la diversité des apprenants, mais il semble malgré tout nécessaire de former les étudiants à l'utilisation des stratégies possibles pour le décodage des unités lexicales.