4.2.2. Intégration dans le système d'interlangue

L'intégration des unités lexicales demande une fixation des informations lexicales dans la mémoire à long terme. Roher (1990 : 62) évoque à ce sujet trois stratégies différentes : la reproduction, la reconstruction et la construction. Il s'agit là des processus qui se déroulent simultanément pendant une communication et qui sont interdépendants. Au cours de l'apprentissage d'une langue étrangère, il peut cependant être utile de s'entraîner d'une manière séparée à l'utilisation de ces stratégies. Les exercices d'association et de reconstruction de textes font partie du travail de reproduction et nous verrons par la suite leur intérêt pour l'apprentissage lexical.

La technique des associations pour la mémorisation des informations est connue depuis l'Antiquité et on peut distinguer les associations cognitives et non cognitives (Roher, 1990 : 65). Les associations cognitives se basent sur des liens sémantiques par classification, hiérarchisation ou encore l'établissement de règles. L'association de deux éléments lexicaux est un exemple pour ce type d'exercice. Dans le cas de l'unité n° 7, les paires "nom-verbe", l'utilisateur voit à l'écran un élément de la paire et il doit sélectionner le deuxième dans une liste comportant dix unités lexicales différentes :

Figure 46 : exercice "associer un nom avec un verbe"
Figure 46 : exercice "associer un nom avec un verbe"

Dans l'exercice "Körper" présenté ci-dessus, il convient d'appliquer les relations de fonctionnalité entre un nom et un verbe. Il rentre donc dans la catégorie des exercices d'associations cognitives et il peut de ce fait constituer un moyen intéressant de mémorisation. Malgré tout, cet exercice fait resurgir deux problèmes qui se situent au niveau de l'intégration des informations lexicales dans un système de référence et concernent l'effort cognitif engagé. S'agissant de l'intégration des informations lexicales, nous remarquons que cet exercice est dépourvu d'un contexte sémantique situationnel permettant un lien des unités lexicales avec une situation de production langagière utile. Même si cet exercice est présenté dans une leçon traitant la description des membres du corps humain, la création des associations comme "Ohr-hören" a peu de sens dans la mesure où ces paires ne correspondent pas à une situation de production. Dans cette perspective, une association comme "Musik-hören" refléterait mieux le besoin d'activation des unités lexicales puisque ces deux termes peuvent facilement devenir des co-occurrents dans une phrase. En ce qui concerne l'effort cognitif à fournir, nous notons que la présence de la liste facilite le travail de l'apprenant parce qu'il n'a besoin ni de chercher lui-même l'unité lexicale, ni de réfléchir sur la forme graphique, ni de l'écrire. Faute d'effort cognitif, la création de traces mnésiques ne devrait pas être importante. Il faudrait donc émettre des réserves par rapport à l'utilité de cet exercice pour une préparation à une production libre. En contrepartie, cet exercice pourrait gagner en intérêt lorsque l'auteur y intègre des effets amusants que l'apprenant retient grâce à leur originalité.

Dans ce type d'exercice, l'apprenant doit reconstituer un texte qu'il a lu auparavant. En cas de difficulté, il est possible de cliquer sur le bouton "Hilfe" qui permet l'affichage du texte lettre par lettre. Pour chaque lettre affichée, l'apprenant perd cependant des points :

Figure 47 : exercice de reconstruction d'un texte
Figure 47 : exercice de reconstruction d'un texte

Ce texte, relativement long et sans cohérence séquentielle, ne permet pas au lecteur de retenir un fil conducteur. Certaines unités lexicales peuvent être mémorisées à court terme, mais l'apprenant devrait avoir du mal à reconstituer le texte complet sans aide. Ensuite, la mémorisation du texte suffit-elle pour un travail lexical efficace ? Roher (1990 : 59) évoque la nécessité d'une mémorisation complexe à l'intérieur d'un système de référence :

‘"Um jedoch eine Information konkret abrufen zu können, reicht das Speichern einzelner Details nicht aus. Wir müssen die Informationen insgesamt gespeichert haben, um sie insgesamt wieder abrufen zu können; und, was noch wichtiger ist, sie bleibt auch dann nur unter der Bedingung abruffähig, daß sie in ein sinnhaftes Bezugssystem verankert worden ist. Das Bezugssystem muß mitgelernt worden sein." (Roher, 1990 : 59)’

La mémorisation du texte "Auf der Autobahn" se réduit pratiquement à un enregistrement de plusieurs détails par rapport aux circonstances de circulation sur l'autoroute. Il s'agit ici plutôt de liens d'association entre des phrases qui restent abstraites et spécifiques au concepteur de l'exercice. Cet exercice difficile présente donc une utilité réduite pour la mémorisation des unités lexicales.