II.2 Questionnement écologique

C’est dans ce cadre global que le questionnement écologique nous semble à propos. Nous nous baserons sur [Artaud, 1997] pour expliquer l’écologie des organisations mathématiques et didactiques.

D’abord, Artaud (1997) souligne que les premières études sur les processus transpositifs, et la théorie de la transposition didactique identifiaient déjà deux grands ensembles de conditions permettant aux mathématiques d’exister dans le système d’enseignement :

‘« D’une part, les mathématiques enseignées doivent être compatibles avec leur environnement social, soit en particulier avec la sphère de production des mathématiques et l’institution des «parents». D’autre part, les mathématiques enseignées doivent pouvoir être présentées séquentiellement, les notions mathématiques se succédant selon un axe temporel linéaire, celui du temps didactique (chronogénèse), et définir deux rapports institutionnels, l’un en position de professeur, l’autre en position d’élève (topogénèse). » (Artaud, 1997, p.3) ’

De façon équivalente, le processus même de transposition didactique, soit de transfert du savoir d’une institution à une autre est intimement lié au point de vue écologique. En effet, le savoir mathématique dans l’institution de production des mathématiques (sphère savante), dans la noosphère (sphère où le savoir mathématique est manipulé à des fins de transposition), dans l’institution où il se trouve et dans la sphère scolaire (où le savoir est enseigné) est soumis à des conditions spécifiques dont le respect lui permet de se maintenir en vie. Et son transfert d’une institution à une autre impose sa manipulation et sa transformation (on parle alors de transposition), seules garantes de son maintien en vie dans l’institution où il est destiné.

Ensuite, la théorie de l’anthropologie didactique est également propice au questionnement écologique. En effet, la description de toute activité humaine, et donc de l’activité mathématique en particulier, à l’aide du modèle praxéologique s’inscrit très nettement dans une perspective écologique. Pour analyser un savoir mathématique dans une institution donnée selon cette théorie, il faut déterminer l’organisation mathématique, soit le système de tâches, techniques, technologies et, éventuellement, théories, qui le décrit. Or, une fois ce système déterminé, on se rend compte de l’existence de certains types de tâches et de l’absence d’autres. « Pourquoi tel type de tâche existe-t-il et pas tel autre ? » est assurément un questionnement d’ordre écologique.

Notre problème est de déterminer quelles sont les conditions qui ont amené à faire vivre et évoluer le tableau de valeurs et le tableau de variations dans l’écologie de l’enseignement du concept de la fonction en classe de seconde en France. Notre souci est donc d’examiner les possibilités d’existence et les manières d’exister de ces objets de savoir. Pour cela, nous allons déterminer les différents objets qui sont amenés à vivre dans l’enseignement du concept de fonction, ainsi que les organisations mathématiques dans lesquelles ils vont se trouver impliqués. Les objets d’enseignement liés au concept de fonction, les relations entre eux, la façon dont ils sont sollicités dans les organisations mathématiques sont en effet caractéristiques d’un environnement donné.

Nous nous posons donc les questions suivantes dans les termes de cette analyse :