VII. Origine : brûler pour être prêt à revenir à l’in-fans

Dans l’œuvre de l’écrivain, le lecteur envisage souvent cette volonté de se débarrasser de tout pour revenir aux stades refoulés de son enfance. Cela s’explique soit par des images directes qui expriment cette volonté de retour, soit par une écriture violente qui impose au lecteur une attitude passive, donc dépendante. Ainsi, son écriture entend défaire les pressions de la langue en restituant les impressions décisives qui se jouent avant l’acquisition des mots, au stade de la pré-conscience : au temps de la non-parole. Par conséquent, son texte se définit par une double hésitation de la langue : d’un côté, il la ramène au silence, et de l’autre, il la tend vers un point originaire dont par principe elle est exclue. Dénudant ainsi le langage usuel, Quignard nous permet d’approcher la scène sexuelle toujours originaire, impossible et interdite au langage. Cela remet en cause les notions d’identité et d’image de soi. Contrairement à la structure attendue de chaque individu, dans l’œuvre de l’auteur, l’identité et tout ce qui s’associe à elle – le moi, l’image et le corps - s’éclipsent face à la volonté de retrouver l’origine perdue 11 . Par ce retour vers l’origine, le lecteur va s’interroger sur sa propre identité de lecteur et sur la place qu’il doit occuper lors de la réception du texte.

Notes
11.

Il est intéressant de souligner que dans la préface des actes du colloque international de Besançon, novembre 2000, intitulé « Ecritures de soi : secrets et réticences ». Vie secrète figure comme exemple d’une écriture qui reflète les « Réticences du moi ». Textes réunis et présentés par Bertrand Degott et Marie Miguet-Ollagnier, L’Harmattan, 2001, p. 7.