1. Sur l’écriture en milieu carcéral

Aucune étude approfondie sur la question de l’écriture en milieu carcéral ne semble avoir été menée, tout au moins dans le domaine de la psychologie clinique et de la psychanalyse.

C’est par le biais des travaux et publications sur la spécificité de l’intervention thérapeutique en prison – nous devons l’une des premières études importantes sur ce sujet à J. Hochmann : La relation clinique en milieu pénitentiaire (1964) – que peu à peu la dimension de la création a été plus précisément envisagée.

C. Balier, notamment, qui a développé les psychothérapies d’inspiration psychanalytique en milieu carcéral, consacre le dernier chapitre de son ouvrage Psychanalyse des comportements sexuels violents (1996), à « la restauration du fonctionnement métapsychologique » par la créativité. Il y évoque les diverses activités proposées en prison sous la forme d’ateliers qui conjoignent processus groupaux, mise en jeu du corps et activité de création : « elles concourent à favoriser une mise en forme métapsychologique : dans un cadre donné imposant des limites, ayant de ce fait une capacité de pare-excitation, les motions pulsionnelles peuvent s’exprimer et se figurer. Le Moi peut y trouver son développement par l’effet de restauration narcissique, d’encouragement à un rôle, actif de confortement d’une identité, de jeu des identifications, d’un rapport tendant à l’harmonie avec le Surmoi et l’Idéal du Moi sans esquive des conflits « (ibid., p. 237). Il prend soin de distinguer entre sublimation et idéalisation, citant à ce propos un écrit de C. Legendre.

Cette dernière, psychologue clinicienne, a écrit de nombreux articles dans le domaine de l’art-thérapie ; nous pensons notamment à l’ouvrage collectif Création et prison (1994) Elle y pose une question qui a aussi été la nôtre lors de notre confrontation à la population carcérale : « Comment éviter que « l’expression » ne soit pas exhibition ou complaisance narcissique, que l’œuvre ne soit qu’un objet fétiche visant à dénier le manque, la séparation, mais puisse fonctionner comme objet transitionnel menant à la constitution d’objets internes ? » (ibid., p. 39).