2.2.2. La confrontation à l’œuvre.

Si je parle de « confrontation » c’est parce que la lecture de ces écrits a parfois été difficile ; douloureuse parfois au point de m’empêcher de poursuivre le travail commencé. Pourtant, j’avais ressenti le besoin de lire une grande partie de l’œuvre de ces deux auteurs, comme s’il fallait que je m’immerge le plus possible dans ce vécu pour tenter d’en saisir quelque chose. Ce n’est qu’après un temps de latence, que j’ai pu prendre la distance nécessaire pour pouvoir analyser ce matériel.

Ces deux écrivains ont beaucoup écrit, apparaît la nécessité pour eux de travailler dans et par l’écrit sans cesse les mêmes thèmes comme si l’œuvre était toujours à recommencer, jamais achevée. De plus, leur production présente l’avantage de comporter un discours sur l’écrit en train de se faire, une autoreprésentation du processus de l’écriture à l’œuvre.

Un autre intérêt majeur réside dans le fait que J. Semprun comme P. Levi parviennent à condenser dans une seule scène – de l’écriture – différents moments de l’histoire de leur psyché et à les intégrer en partie. Contrairement aux détenus évoqués plus haut qui vont diffracter sur différentes scènes – dans les passages à l’acte, dans la relation au clinicien, dans l’écriture – leurs contenus psychiques, ces écrivains vont transférer l’ensemble dans l’appareil d’écriture. C’est aussi ce qui va donner à l’œuvre cette coloration esthétique particulière qui transmet des affects. Cette manière particulière dont l’enfermement se donne dans l’écrit, nous nous efforcerons de la mettre en évidence dans ce travail de thèse.

Nous aborderons le traitement spécifique de ce matériel littéraire, plus loin, dans une réflexion méthodologique spécifique.