3.3.3. Fantasme de toute-puissance et vécu primaire de radicale impuissance

Se pose maintenant une fois de plus la question de savoir si le fantasme de toute-puissance et d’immortalité que nous avons pu mettre à jour dans cette clinique de l’enfermement carcéral, ne rendrait pas compte d’un vécu primaire de radicale impuissance.

Le sentiment de grandiosité sur lequel nous avons insisté ne pourrait-il pas aussi se comprendre dans ce contexte en référence à « la position d’exception » théorisée par S. Freud (1916)? Pour nos précédentes cliniques nous nous étions en effet appuyés sur la « position d’exception » (1916, pp. 140-146), concept freudien repris notamment par R. Roussillon (1999f).

Il semblerait que cette défense « paradoxale » se combine avec une autre défense très proche, celle qui consiste à utiliser la violence antisociale pour tenter de traiter un noyau traumatique primaire. Ainsi avec R. Roussillon pourrions nous dire que « la violence et l’antisocialité se trouvent alors justifiées par le caractère exceptionnel et « hors la loi » du sujet, sa forclusion. Culpabilité et castration ne sont plus à redouter, le sujet a « payé d’avance », comme sa laideur ou un quelconque handicap le montre : il a déjà « donné ». Dès lors, la violence et l’antisocialité servent à la fois à maintenir le contre-investissement du sentiment primaire de culpabilité et alimentent une boucle de rétroaction qui confirme le sujet dans son postulat existentiel ». (1999f, p. 85-86)