1.1.2. … et usage différencié des modes de déplacements pour atteindre les activités du panier de biens entre quartiers riches et pauvres

L’objectif est d’évaluer les différenciations d’usage des modes de transports entre les habitants des différents types de quartiers pour accéder aux activités du panier de biens. En se basant sur l’enquête ménages déplacements de l’agglomération lyonnaise de 1995, nous estimons alors la répartition modale des déplacements effectués par les individus, depuis leur lieu de résidence, pour les motifs du panier de biens (commerces, santé, démarches / aide à la personne et loisirs).

Pour cela, nous devons identifier les zones de l’enquête ménages qui correspondent aux quartiers – IRIS-2000 - très défavorisés ou très aisés mis en évidence dans le chapitre 3. Or, le découpage en IRIS-2000 et le zonage fin (découpage en 444 zones) de l’enquête ménages déplacements ne se superposent pas. Par conséquent, nous avons uniquement mené l’analyse sur les zones du découpage fin de l’enquête ménages, qui correspondent géographiquement et exactement à des quartiers identifiés comme très défavorisés ou très aisés. Lorsque des zones de l’enquête ménages correspondent à des IRIS très défavorisés, nous les nommons « quartiers très défavorisés ». De même, pour les zones correspondant à des IRIS très aisés.

D’autre part, l’enquête ménages déplacements de l’agglomération lyonnaise fournit le nombre de voitures particulières possédées par ménage. Ainsi, pour les différents types de quartiers, nous avons pu établir la répartition modale des déplacements correspondant aux motifs du panier de biens pour les individus appartenant à un ménage qui déclare :

Dans le cas des quartiers très défavorisés, nous observons que 38% des ménages n’ont aucune voiture (Tableau 59). Ce résultat est du même ordre de grandeur que celui obtenu à partir des données du Recensement Général de la Population (Tableau 58). Dès lors, les individus de ces ménages se déplacent principalement à pied (65% des déplacements qu’ils réalisent) ou en transports collectifs (25,6%) pour atteindre les activités du panier de biens (Figure 28). Ils sont tributaires de l’offre en transports collectifs ou de la localisation des activités, biens et services à proximité de leur lieu de résidence pour pouvoir accéder à la structure moyenne du panier de biens et répondre ainsi à leurs besoins.

Tableau 59 : Nombre de ménages et nombre de déplacements du panier de biens en fonction de la possession d’une voiture particulière pour les quartiers très défavorisés
Quartiers très défavorisés (I) 0 VP 1 VP possédée ou plus
Nombre de ménages 8 812 [37,8%] 14 502 [62,2%]
Nombre de déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens 12 961 [30,6%] 29 330 [69,4%]
(I) Compte tenu des découpages IRIS-2000© et du zonage fin de l’E.M.D., nous avons considéré les zones fines correspondant aux quartiers : La Saulaie (Oullins), La Trinity-Mermoz (Lyon 8ème), Saint-Jean (Villeurbanne), La Sauvegarde (Lyon 9ème), Parilly Nord et Sud (Bron), Ecoin-Vernay, Pré de l’Herbe, Mas du Taureau Nord et Sud, Sauveteur Nord, Grolières–Noirettes, Grappinière (Vaulx-en-Velin), Charles Perrault, Jean Moulin, Anatole France, Amstrong et Léo Lagrange (Vénissieux).

Sources : d’après EMD de l’agglomération lyonnaise de 1995

Dès que les ménages des quartiers très défavorisés déclarent posséder au moins une voiture (62% des ménages des quartiers très défavorisés), celle-ci est utilisée au détriment des transports collectifs. En effet, la moitié des déplacements pour un motif du panier de biens est assurée en voiture particulière, contre à peine 6% en transports collectifs. La marche à pied reste par ailleurs largement utilisée, avec 43% des déplacements. Cela peut s’expliquer par le fait que les ménages des quartiers très défavorisés sont, pour l’essentiel, mono-motorisés (Tableau 58). Dès lors que plusieurs personnes d’un même ménage se déplacent, elles n’ont donc pas toutes recours à la voiture particulière. De plus, même s’ils peuvent parfois faire appel aux réseaux informels sociaux ou familiaux d’entraide pour utiliser une autre voiture, cela est loin d’être la règle [Mignot et al, 2001] et ils se déplacent avec un autre mode de transports.

Figure 28 : Répartition modale des déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens sur les quartiers très défavorisés

Sources : d’après EMD de Lyon de 1995

Dans le cas des quartiers très aisés du centre, ce sont 37% des ménages qui ne possèdent pas de voiture particulière (Tableau 60). Les déplacements, réalisés par les individus de ces ménages, se font pour plus des deux tiers à pied et pour 26% en transports collectifs, la part de la voiture passager étant négligeable (Figure 29).

Tableau 60 : Nombre de ménages et nombre de déplacements du panier de biens en fonction de la possession d’une voiture particulière pour les quartiers très aisés du centre
Quartiers très aisés du centre(I) 0 VP 1 VP possédée ou plus
Nombre de ménages 16 222 [37,2%] 27 287 [62,8%]
Nombre de déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens 20 636 [29,1%] 50 282 [70,9%]
(I) Compte tenu des découpages IRIS-2000 et du zonage fin de l’E.M.D., nous avons considéré les zones fines correspondant aux quartiers des 1er, 2ème, 5ème et 6ème arrondissements de Lyon.

Sources : d’après EMD de l’agglomération lyonnaise de 1995

Tout comme dans le cas des quartiers très défavorisés, les individus des ménages motorisés (63% des ménages vivant dans les quartiers aisés du centre) utilisent très largement l’automobile au détriment des transports collectifs. Cependant, la marche à pied reste le mode de transports principal pour les déplacements correspondant à un motif du panier de biens (Figure 29). La voiture n’est utilisée qu’à hauteur de 29% de l’ensemble des déplacements correspondant à l’accès aux activités du panier de biens. Nous retrouvons et précisons les résultats obtenus dans la section précédente. Le fait qu’une part importante des ménages n’ait pas de voiture particulière n’est donc pas nécessairement une contrainte subie (pour des raisons financières). Cela peut être l’expression d’un choix, compte tenu de la diversité et de la densité des activités à proximité de leur lieu de résidence et accessibles à pied ou en transports collectifs.

Figure 29 : Répartition modale des déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens sur les quartiers très aisés du centre

Sources : d’après EMD de Lyon de 1995

Enfin, dans le cas des quartiers très aisés de la périphérie de l’agglomération lyonnaise (Tableau 61), ce sont 91% des ménages qui possèdent au moins une voiture particulière [92% selon le Recensement de 1999 (Tableau 58)]. Ce mode de transports est largement utilisé (84% de l’ensemble des déplacements) pour atteindre les activités du panier de biens (Figure 30). La marche à pied ne représente que 12% des déplacements et les transports collectifs ne sont quasiment pas utilisés.

Tableau 61 : Nombre de ménages et nombre de déplacements du panier de biens en fonction de la possession d’une voiture particulière pour les quartiers très aisés de la périphérie lyonnaise
Quartiers très aisés de la périphérie lyonnaise(I) 0 VP 1 VP possédée ou plus
Nombre de ménages 2 975 [9,1%] 29 802 [90,9%]
Nombre de déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens 2 122 [3%] 69 168 [97%]
(I) Compte tenu des découpages IRIS-2000 et du zonage fin de l’E.M.D., nous avons considéré les zones fines correspondant aux quartiers : Tassin la Demi-Lune, Charbonnières les Bains, Ecully Charlie, Ecully les Serres, Ecully Pole enseignement recherche, Vourles, Charly, Sainte Foy Les Lyon Chavril, La Tour de Salvagny, Limonest, Saint Dider au Mont d’Or, Saint-Cyr au Mont d’Or, Collonges au Mont d’Or, Poleymieux au Mont d’Or, Caluire-et-Cuire, Montchoisi, Saint Bernard, Fontaines Saint Martin et Sathonay Village.

Sources : d’après EMD de l’agglomération lyonnaise de 1995

Par opposition, seulement 9% des ménages déclarent ne pas posséder de voiture particulière. Compte tenu du faible nombre de déplacements réalisés par les individus de ces ménages, la représentation détaillée des modes de transports utilisés n’est pas significative. Nous pouvons seulement affirmer que plus de 90% des déplacements pour un motif du panier de biens, se font alors soit à pied, soit en transports collectifs. Cela signifie que les individus de ces ménages, à l’instar de ceux des ménages non-motorisés des quartiers pauvres, sont tributaires de l’offre en transports collectifs ou des services à proximité de leur lieu de résidence. Ou bien, ils peuvent, dans une certaine mesure, bénéficier des réseaux sociaux et familiaux pour utiliser une voiture particulière, même si cela reste très limité.

Figure 30 : Répartition modale des déplacements pour les motifs de déplacements du panier de biens sur les quartiers très aisés de la périphérie lyonnaise

Sources : d’après EMD de Lyon de 1995