Chapitre V : Les transformations dans le travail de refoulement dans l’idéogramme 

Nous avons repéré la présence massive du corps et des parties de l’humain dans l’écriture idéographique, ce qui constitue la spécificité de l’écriture chinoise. Ce chapitre sur le refoulement nous permettra de comprendre comment s’effectue le refoulement dans l’écriture idéographique. Nous avons déployé toutes les figures de transformation de l’intrapsychique à l’intersubjectivité. Ces transformations décrivent des procédés, des modalités qui permettent à l’idéogramme d’accéder à une forme symbolique tout en gardant les images visuelles en lui. Certaines transformations sont des processus de refoulement. Ce chapitre sur le travail de refoulement permet de visualiser le parcours de ce travail de refoulement par l’étude des mécanismes de défense et des stratégies d’effacement d’image, des éléments de la chose.

Le concept de refoulement selon J. Laplanche et J-B. Pontalis 17  :

« …Au sens propre : opération par laquelle le sujet cherche à repousser ou à maintenir dans l’inconscient des représentations (pensées, images, souvenirs) liées à une pulsion. Le refoulement se produit dans les cas où la satisfaction d’une pulsion – susceptible de procurer par elle-même du plaisir – risquerait de provoquer du déplaisir à l’égard d’autres exigences. »

« …Le terme de refoulement est parfois pris par Freud dans une acception qui le rapproche de celui de « défense », d’une part en tant que l’opération du refoulement prise au sens A se retrouve au moins comme un temps dans de nombreux processus défensifs complexes (la partie est alors prise pour le tout), d’autres part en tant que le modèle théorique du refoulement est utilisé par Freud comme prototype d’autres opérations défensives.

« …Enfin, d’emblée le refoulement est décrit comme une opération dynamique, impliquant le maintien d’un contre-investissement et toujours susceptible d’être mise en échec par la force du désir inconscient qui cherche à faire retour dans la conscience et la motilité… »

Freud utilise plus tard le terme de refoulement plus proche des mécanismes de défense ou des transformations permettant d’éviter que les représentants-représentations arrivent à la conscience. Dans son article sur le refoulement (Die Verdrägung, 1915), Freud présente le refoulement au sens large il comprend trois temps : le « refoulement originaire » ; « le refoulement après-coup » et enfin le « retour du refoulé ».

Pour ce qui nous concerne ici, le refoulement est employé pour désigner le travail de séparation de la représentation de chose, des traces de la chose pour accéder à la représentation de mot qui est dans le registre des processus secondaires, tandis que la représentation de chose est au registre des processus primaires. Le refoulement dans l’écriture s’effectue par des transformations opérées pour manier les images, les images de choses, ces choses du primaire qui envahissent le moi. Dans cette visée, le refoulement est très proche de ce que la psychanalyse désigne comme l’opération psychique qui vise à refouler ou transformer les les images que contiennent les représentations de chose. Nous abordons les modèles de défense dans l’accomplissement du travail de refoulement dans l’idéogramme.

Pour ce travail de déconstruction qui passe par la description des caractères, nous allons être amenée à utiliser les notions et les termes spatiaux tels que devant, derrière, avant, après, à côté de, face. Pour cela un éclaircissement semble nécessaire. L’idéogramme est pensé comme un espace tridimensionnel qui se présente pourtant comme une représentation bidimensionnelle ; l’espace tridimensionnel contient le mouvement de la vivance de la chose, comme nous l’avons constaté dans le passage de la représentation de chose à la représentation de mot. Nous utiliserons devant, derrière, avant, après dans la description de ce cadre tridimensionnel et gauche, droite, au-dessus, en-dessous dans le cadre de la bidimensionnalité.

Notes
17.

J.Laplanche et J-B. Pontalis, vocabulaire de a psychanalyse, pp.393-396