4.5.1. Le concept d’homéostasie.

Pour pouvoir développer notre réflexion quant à la nécessaire fonction de la crise il convient d’abord de définir ce qu’est un état stable pour un système et nous parlons alors d’homéostasie. Un bref rappel théorique sur le concept d’homéostasie. Ce concept, fut défini par le biologiste W. Cannon (1932) 74 comme étant la nécessité pour une cellule de maintenir stables les constantes physiologiques de son milieu intérieur. Ce concept sera repris par L. Von Bertalanffy (1968) 75 qui, en montrant l’importance des mécanismes de feed-back (régulation par rétroaction négative) pense pouvoir l’étendre à tous les systèmes. Cela attira l’attention des thérapeutes familiaux qui s’interrogeront sur la nécessité pour les familles de se réguler à travers des normes de fonctionnement. Ce modèle fondamental décrit un modèle circulaire dans lequel une partie de l’output est reconduit dans l’input en tant qu’information sur le résultat de la réponse. Ainsi le système est auto-régulé au sens du maintien de certaines variables. Ce concept intègre aussi, de fait, la notion de temporalité car pour qu’un équilibre homéostatique puisse se maintenir, il est indispensable que les rétroactions aient le temps de jouer. C’est un processus qui s’inscrit donc dans la durée, même si la lecture qui le pointe s’inscrit, elle, dans l’instantané d’un moment donné. Ce fut historiquement Don Jackson D. qui en 1957 suggéra, le premier, l’idée selon laquelle une famille s’autorégulait de manière homéostatique, c’est-à-dire que l’ensemble de ses membres ajustent continuellement leur positionnement de façon à maintenir une norme de fonctionnement. Cette impérieuse nécessité de maintenir un équilibre se solde parfois par l’apparition d’un symptôme, d’un comportement singulier chez l’un de ses membres appelé alors « patient désigné ». La personne porteuse du symptôme est ainsi désignée non par sa famille mais par les services qui sont alors sollicités pour tenter de trouver une réponse que la famille n’est plus à même d’élaborer en son sein. Ainsi, le symptôme n’est pas le problème mais il témoigne de la difficulté qu’ont les membres de la famille à maintenir leur fonctionnement homéostatique. De plus, le comportement symptomatique joue parfois un rôle de soupape qui permet d’éviter le pire, à savoir une décompensation d’autres membres de la famille et surtout une implosion du système familial.

Toutefois, il ne faudrait pas faire l’erreur de penser que l’homéostasie familiale est une réalité, c’est une métaphore qui permet de parler du fonctionnement autorégulé d’une famille à un moment donné. En effet, le propre d’une famille ce n’est pas l’immobilisme mais au contraire un équilibre dynamique, témoin d’une activité intense, qui nécessite d’incessants changements pour que l’équilibre entre ses membres soit maintenu.

Notes
74.

Cannon, W., « The wisdom of the body », 1932.

75.

Von Bertalanffy, L, « Théorie générale des systèmes », 1968.