5.1.1. La question de l’évolution de la maladie d'Alzheimer dans le temps.

La première question à laquelle nous avons été confronté est celle du temps. En effet, d’une part, la maladie d'Alzheimer est une pathologie qui évolue sur une période allant de cinq à dix ans. D’autre part, les familles venant parfois consulter pour la première fois alors que la maladie évolue depuis plusieurs mois quand ce n’est pas plusieurs années, il ne nous était guère possible de penser un travail sur le principe de la cohorte, c’est-à-dire de réaliser une enquête qui interrogerait les patients à partir d’un jour J, puis à intervalles réguliers.

Faire une présélection des sujets pour les inclure dans l’étude en fonction d’un score au MMSE * ou d’une autre échelle standardisée nous semblait aussi être un biais. Nous n’apprécierions plus alors l’impact de la maladie d'Alzheimer au sein de la famille mais nous aurions évalué différentes situations familiales à un moment donné. De plus, ce moment n’aurait pas été aléatoire puisque prédéterminé par la référence à l’échelle choisie et par l’endroit où nous aurions rencontré les malades et leurs familles.

Pour apprécier les limites d’une telle démarche, nous avons étudié la population accueillie et suivie par le centre mémoire du centre hospitalier d’Alès en prenant le score au MMSE comme référence (cf. point 5.1.1.1.)

Par ailleurs, la notion d’un ou de plusieurs critères d’inclusion dans une étude est un postulat qui induit, par voie de conséquence, celui d’un ou de plusieurs critères d’exclusion et, en regard de notre sujet d’étude, nous avons écarté toute idée d’exclusion.

Nous avons donc pris le parti d’interroger les patients et les aidants à l’instant T de notre rencontre mais de resituer ce temps dans la chronologie de la maladie en demandant à l’aidant depuis combien de temps la maladie de son parent évoluait. Nous savons les objections qui peuvent être faites quant à la « fiabilité » des réponses que nous avons obtenues. Il y a effectivement toujours un décalage entre le moment où les aidants perçoivent les troubles de mémoire ou du comportement de leurs aînés et le moment où ceux-ci ont commencé. Nous ne reviendrons pas, non plus, sur la problématique dont nous avons déjà parlé des situations de déni de la maladie par les aidants.

Toutefois, notre expérience clinique nous a appris qu’en prenant le temps d’interroger précisément les aidants, ceux-ci se souviennent toujours d’anecdotes ou de plusieurs détails qui les ont fait s’interroger quant à l’à propos ou la qualité des agissements de leur parent. D’ailleurs, la très grande majorité des aidants reconnaissent alors aisément avoir banalisé les premières anicroches en les attribuant à une bonne cause et nous avons fait remonter le début de la maladie à cette date.

Notes
*.

MMSE : Mini Mental State Evaluation de Folstein