Comme nous venons de le dire au cours du paragraphe précédent, il est impossible de rencontrer tous les types de patients à partir d’un seul lieu et ce même si nous avons la chance de travailler à la fois au sein d’une consultation mémoire et dans un service de court séjour gériatrique. Si, par définition, ces deux structures accueillent des patients à différents stades de la maladie, il n’en demeure pas moins qu’un grand nombre de malades ne fréquentent pas ce type de structures. En effet, d’une part, ce n’est qu’un nombre très limité d’Alzheimériens qui, suite à une pathologie intercurrente, sont hospitalisés au sein du service de court séjour gériatrique et, d’autre part, comme nous l’avons déjà dit, un certain nombre d’entre eux bénéficient d’un suivi au sein de leur structure d’hébergement ou auprès de praticiens qui exercent dans le secteur libéral.
De plus, nous n’avons pas voulu limiter notre recrutement de personnes âgées au seul bassin alésien. Cela aurait induit le travers de la spécificité géographique qui est celle de ce bassin cévenol au particularisme certain. La population des soixante cinq ans ou plus représente près de 35% de la population totale du bassin alors que la moyenne nationale est de 16,2% au 1er janvier 2004 * .
Nous avons donc sollicité, dans un premier temps, deux autres sites hospitaliers du Gard, d’une part, ainsi que trois maisons de retraite, dont une en Basse Ardèche pour essayer d’interviewer des familles aux différents stades d’évolution de la maladie.
Sachant aussi que la structure des familles a un fort impact sur l’aide, nous avons fait le choix de sélectionner une zone géographique pour mener notre étude afin d’avoir un panel de familles assez homogène.
En nous centrant sur une région semi-rurale, nous avons fait le choix de la disparité familiale. Nous avons donc mené notre étude dans la région qui s’étend des Cévennes à l’ouest, à la vallée du Rhône à l’est et du Vivarais au Nord, à la Camargue au sud. Cette région géographique se répartit donc entre les villes de Nîmes, Alès et Uzès dans le Gard et Aubenas en Ardèche.
Cette région à l’avantage de regrouper :
Cette hétérogénéité présente donc l’avantage de recruter une population très diverse. En revanche, le comparatif avec une population urbaine appartenant à une grande métropole nous semble être un sujet possible et intéressant de développement à notre travail.
Toutefois, quel que soit le type de famille auquel appartient une personne âgée, l’ensemble des situations que nous avons rencontrées, et celles que nous continuons à voir dans le cadre de notre pratique professionnelle, nous incline à penser que la désignation de l’aidant est plus en lien avec une problématique de vulnérabilité de l’aidant ou de l’ensemble du système familial qu’avec celle d’une typologie de famille. Nous préciserons d’ailleurs que cela n’exclut pas le respect de règles transgénérationnelles, bien au contraire.
Nous connaissons de nombreuses situations où un enfant a arrêté son travail pour devenir un aidant alors qu’il vit à plusieurs centaines de kilomètres de son parent et ce alors qu’un frère ou une sœur réside à côté de la personne âgée. Au-delà donc de toute considération professionnelle ou géographique, nous pensons, avec J. Gaucher (2004) 84 , que : « Le devoir du service à rendre à l’institution familiale prime. » pour les enfants et que le jeu des loyautés invisibles prime amenant certains à endosser le rôle d’aidant et d’autres à le refuser.
Bien que notre travail présente un lien évident avec la question de la désignation de l’aidant, nous avons volontairement exclu toute question qui aborde cette problématique autrement que par le fait de savoir s’ils étaient reconnus dans leur mission ou suspecté de bénéficier d’avantages du fait de leur rôle. L’approche des jeux relationnels conduisant à la désignation d’un membre de la famille en tant qu’aidant nous semble pouvoir faire, à elle seule, l’objet d’un sujet de recherche. Nous nous sommes donc contenté de considérer les aidants rencontrés comme tels.
Bien que ceci ne soit pas directement en lien avec notre travail, nous rappellerons simplement qu’en tant qu’intervenant, lorsque nous formulons de « bonnes » interprétations en lien avec l’histoire des personnes, quant à leur rôle d’aidant, ce n’est généralement que pour tenter de nous affranchir de l’impasse relationnelle dans laquelle nous nous retrouvons…
Source INSEE
Sayad, A., « La double absence », 1999.
Gaucher, J., « Je suis obligé de t’aider », 2004.