7.2.2.1. Les malades connus.

L’expérience nous a appris qu’au moment où les aidants informels ou les aidants décideurs accompagnent la personne âgée en consultation mémoire, ceux-ci ont conscience des troubles et ils viennent chercher confirmation ou infirmation d’une réalité qu’ils observent depuis plusieurs mois voire années. Toutefois, qu’ils entendent ou non le diagnostic, lors de cette première consultation la désignation de l’aidant naturel, elle, est toujours entendue et c’est souvent d’ailleurs ce que les membres de la famille sont venus chercher, inconsciemment ou non d’ailleurs. Ainsi, même si, après cette consultation, elle demeure seule à son domicile pendant plusieurs mois, la personne âgée n’est plus considérée comme étant en mesure de vivre seule.

C’est cette différence qui fait la différence et qui constitue le germe qui générera un premier temps de crise, lequel s’exprime d’ailleurs rarement sur le modèle de la crise.

La consultation mémoire n’est pas une étape obligatoire à cette désignation de l’aidant naturel, mais l’avis d’un tiers qui appartient au réseau relationnel de la famille, lui, est indispensable au processus de désignation. Celle-ci peut donc se faire via le médecin traitant ou des amis. Ce tiers est l’élément aléatoire du système familial élargi qui est convoqué dans l’interaction pour renforcer le processus de traction à l’écart de l’équilibre du système familial. En annonçant ou confirmant l’impossibilité qui est celle de la personne âgée de vivre seule, il va provoquer, plus ou moins rapidement mais inévitablement une crise du système familial qui ne se jouera qu’à travers un processus d’amplification. Nous parlerons alors de crise mutation si celle-ci débouche sur la désignation de l’aidant naturel. Le système passe d’une situation où les troubles sont connus à une situation où l’aide est reconnue.

Nous ne reviendrons pas sur ce que nous avons dit (cf. 4.2.1.) sur les enjeux de la désignation de l’aidant naturel et l’attitude éthique des professionnels, généralement convoqués dans ce rôle de tiers, qui doit offrir à tout aidant informel la possibilité de ne pas être l’aidant naturel. Cette ouverture nous semble indispensable quand l’aidant informel est déjà un aidant informel naturel pour d’autres membres de la famille comme ses propres enfants par exemple.

Et, quand l’aidant informel s’engage en pleine conscience sur le chemin de l’aidant naturel, il devrait alors se voir proposer de réelles possibilités d’accompagnement et de soutien psychologique.

Force est de constater que pour l’instant, en France, cela n’est pas considéré comme un soin nécessaire, puisque non pris en compte par les organismes de sécurité sociale, et ce même si nous retrouvons ces prérogatives dans l’ensemble des notes ministérielles qui traitent de la question…