7.2.3.1. Seconde crise et changements.

Si la première crise entraîne une mutation du système familial et parfois un « recalibrage », ce qui va ouvrir une période de souffrance émaillée de « petites » crises, la seconde crise va permettre de quitter cette période en permettant au système familial de trouver un nouveau fonctionnement.

Ce retour à un fonctionnement moins douloureux est nettement perceptible au niveau de la qualité des interactions qui lient les protagonistes. Que celles-ci soient bonnes ou mauvaises, elles sont stables et acceptées. Nombre d’aidants du groupe 3 nous ont confié, avec tristesse mais aussi beaucoup de fatalisme, ne plus avoir de relation avec un frère ou un enfant suite aux décisions prises à l’endroit de la personne âgée. Cette attitude tranche avec celle des aidants du groupe 2 qui sont révoltés quand ils sont en prise avec ce même genre de perturbation des relations intrafamiliales.

De même, la différence d’attitude et de réactions envers les autres membres de leurs familles que nous avons pu noter entre les aidants appartenant aux groupes 2 ou 3, face au placement de leur parent en maison de retraite, nous semble significative de l’existence et de l’impact de cette seconde crise. Alors que la situation est la même, les fonctionnements relationnels, eux, sont très différents. Les aidants du groupe 2 se mobilisent pour que d’autres membres de la famille interviennent auprès de la personne âgée ou de l’institution pour des raisons aussi diverses que multiples. Cette attitude est d’ailleurs décrite comme étant la cause des conflits qu’ils vivent et donc de la souffrance qu’ils éprouvent.

En revanche, les aidants du groupe 3 nous sont apparus résignés. Ils n’acceptent pas forcément la situation familiale qui est la leur mais ils ne nourrissent plus de conflits.

Ainsi que la personne âgée soit grabataire à domicile ou déambulante, parfois attachée, en maison de retraite, ses troubles du comportement n’ont plus d’impact sur l’ensemble du système familial.

S’il pourrait sembler que cette évolution se fasse naturellement, nous ne sommes pas enclin à le penser. Notre modèle a classé dans le groupe 2 des familles dont le parent était en maison de retraite depuis plusieurs années. Ceci nous avait surpris lors de la prise de connaissance des résultats mais, aujourd’hui, après avoir analysé la qualité des interrelations familiales relatées, le classement nous semble effectivement correct et nous lions cela à la non existence, dans ces situations, de la seconde crise.

La seconde crise permet un changement qui, s’il ne se solde pas forcément par une modification importante de la structure de la famille et des rôles de ses membres, n’en demeure pas moins majeur car elle modifie la qualité des interrelations intrafamiliales.