II. Le Photolangage

Le Photolangage est une méthode qui a été créée en 1965 par un groupe de psychologues et psycho-sociologues lyonnais. Cette méthode propose aux sujets une « médiation » et, comme le préfixe lui-même nous l’indique, utilise la photographie, pour accéder autant à des processus psychiques (soit pour connaître, transformer, soit pour soigner) qu’à des formations.

La photographie sert à produire un effet de langage, de parole, d’une parole souffrante qui se confronte à la non-liaison formant l’essentiel de la pathologie et des problèmes psychiques contemporains. Elle fait lien entre le vrai et le semblable à cause de son pouvoir de captation imaginaire qui la distingue d’autres représentations en images, comme la peinture ou le dessin. Elle est trace de l’éphémère, avec un code qui se construit et se transmet dans le collectif, elle est donc un langage.

Le Photolangage, fondé sur l’induction, nous conduit de l’image à la parole à partir du travail psychique en appui sur le processus groupal, mais il y a aussi un travail de l’intersubjectivité par la règle de libre association où la photographie est la vertu liante pour parler ensemble.

La fonction du clinicien « est d’établir et de maintenir les conditions de l’aire de jeu entre les participants, entre les images, ce qu’elles représentent et ce qui peut en être dit, entre le discours de l’un et celui des autres » 1 .

Le champ d’application est divers, il peut s’agir de pratiques d’animation sociale, d’intervention en institutions, de groupes de formation, ou d’équipes de recherche et, bien sûr, dans les centres de soins, où les cliniciens ont eu des expériences pour soulager et traiter la souffrance narcissique ou des liens institutionnels, les troubles d’identité et des identifications, les effets des traumatismes, etc…

En général, la situation clinique du Photolangage et la subjectivité qu’il génère, rétablissent le sujet dans l’aire de jeu et ouvrent un accès aux processus élémentaires de symbolisation, dans cette notion de transitionnalité. Cet espace de transitionalité ne peut exister que sous deux conditions préalables :

La première concerne : l’installation de l’auto-conservation ; le lien groupal, la construction d’un discours qui à partir de l’objet intermédiaire peut représenter l’absence, le manque, la défaillance. La seconde condition est : que l’objet survive à la disparition et aux attaques destructrices.

Le dossier de Photolangage se compose de 48 photos présentant trois thèmes :

  1. Corps et communication.
  2. Des choix personnels aux choix professionnels.
  3. Santé et Prévention.

C’est une méthode qui favorise les liens entre l’imaginaire groupal et l’imaginaire individuel, ainsi qu’entre les représentations dont le sujet est porteur et les représentations du groupe.

C. VACHERET dans son ouvrage : Photo, groupe et soin psychique nous dit : « Il est demandé au sujet de regarder attentivement les photos, dans le silence, et de choisir simplement du regard, mais aussi de choisir celle qui lui parle le plus, c’est-à-dire, s’introduit une nouvelle dimension, celle de la communication qui correspond à une partie de l’être qui est sensible aux images ».

La photo, dans cette méthode, accède à un statut d’image, de ce fait, elle contribue à servir de supportà notre « pensée en images », comme S. FREUD, dans « le Moi et le ça », propose d’appeler cette sorte de pensée, qui réfère davantage au mode de pensée du processus primaire, dans notre appareil psychique. 

Le choix de la photo provoque des perceptions sensorielles, Il n’est pas rare qu’une photo évoque une musique, un parfum ou une sensation. Ce choix s’impose à nous pour deux raisons :

Dans les principaux aspects du dispositif, se trouvent :

  1. « le nombre des participants : Cinq à huit patients constituent un groupe hebdomadaire d’une heure quinze, alors qu’en formation d’adultes le groupe est de douze à quinze participants, sur une durée de deux heures minimum par séance »VACHERET, C. Op. Cit. p. 19..
  2. «Le nombre de soignants : (…) En formation, est nécessaire un animateur pour un groupe restreint, deux animateurs pour un groupe large (25 à 30 personnes) alors qu’avec les patients, le psychologue s’assure que deux ou trois infirmières, toujours les mêmes, garantiront avec lui la continuité du travail du groupe »Ibidem..

Les groupes hebdomadaires ont lieu à une heure fixe dans l’institution, situation qui donne au groupe sa dimension thérapeutique.

« La diversité des pathologies est un souci partagé par tous les soignants (…) ce n’est pas rare que ce lieu soit le seul moment de la semaine où certains patients grand chroniques semblent s’animer et s’impliquer quelque peu » 3 .

Au fil des années et à partir de l’expérience, les cliniciens ont vu l’importance de la façon de formuler la consigne qui sert à lancer la séance, pour essayer d’avoir le moins de risque possible d’induire les effets, selon les différentes équipes, la construction et le degré d’implication qu’elle suscite. Chaque fois qu’un nouveau thème est abordé dans le groupe une question est proposée.

D’après le travail avec des patients, il a résulté que les trois grands thèmes de photos que nous avons mentionnés, se sont mélangés. Il est bien que le dispositif change selon les expériences auprès de nouveaux groupes ; maintenant les dossiers comprennent environ cinq cents photos. Il s’agit notamment de : femmes en devenir, groupes, travail, économie, loisirs, relations humaines et situations limites entre autres.

La séance se déroule en deux temps :

  1. Le temps du choix individuel des photos.
  2. Le temps de l’échange en groupe.
Notes
.

Droits réservés aux Presses Universitaires de Lyon, 2000.

1.

VACHERET, C. Photo, groupe et soin psychique. Presses Universitaires de Lyon. Lyon, France, 2000. p. 8.

3.

Ibidem. p. 23.