1e partie
cadres d'intelligibilité;

chapitre 1. l'objet-population

En France, les migrants représentés majoritairement par les pères des enquêtées ont vécu en célibataires dans un premier temps, en famille dans un second. Le pays d'émigration est devenu pays d'immigration. Dans la France des «Trente glorieuses», la famille modale réduite à un couple de salariés et à leurs enfants, s'identifie à un «ménage», unité économique de base de production-consommation. Rien de tel dans les sociétés restées à l'écart de l'économie capitaliste. En simplifiant, la famille paysanne est indivise, elle s'inscrit spatialement dans une communauté de voisinage et elle est perçue comme un groupe transgénérationnel. Les choix pratiques réalisés dans l'immigration, en particulier dans la sous-population d'origine algérienne, donnent l'occasion d'observer comment s'organise empiriquement le passage de la grande famille indivise à la petite cellule familiale conjugale. L'analyse comparative de ces choix devrait mettre au jour quelles grandes lignes de clivage structurent les schèmes de conduites et de représentations.

Dans cette partie inaugurale, on étudiera donc selon quelles modalités différenciées le passage d'un mode de vie à un autre s'est opéré. Dans quelles conditions et à quelles dates les pères des enquêtées ont-ils émigré, vers quels emplois se sont-ils orientés, comment et avec qui se sont-ils mariés, à quels moments la vie conjugale a-t-elle commencé, comment se sont logés les couples? Au terme de l'analyse, on élargira la focale de façon à situer la population d'origine algérienne par rapport à la population globale de l'enquête.