chapitre 4. la socialisation primaire

Selon les familles, la socialisation des filles est prise en charge par la mère seule ou par la mère et le père. Plus précisément, dans certaines familles, il est exclu que les filles soient en rapport d'interaction directe avec le père, à plus forte raison en tête-à-tête, alors que c'est possible dans d'autres. C'est à partir de cette variable qu'on a organisé l'étude comparée de la socialisation primaire. Revenons en arrière. Ce trait distinctif, repéré dans les premières analyses empiriques, a été l'un des éléments maîtres dans la construction de l'objet-population. Il fait partie de la constellation de traits conceptualisée par l'opposition organisation familiale «acéphale» vs «autocéphale». Mais on aurait tort de réifier cette opposition, dont la validité est restreinte. L'organisation «autocéphale» suppose la souveraineté du chef de famille indépendant et se réfère à la famille-communauté. Logiquement, dans les conditions du salariat, en particulier dans celles du salariat ouvrier, c'est-à-dire de la famille-association, elle est amenée à dépérir, elle est supplantée par une division du travail entre les conjoints homologue à celle de l'organisation «acéphale». Mais on sait quels décalages entre les conduites individuelles et les structures sociales en place peut provoquer l'hysteresis des dispositions intériorisées.

L'étude de la socialisation primaire a été organisée à partir de ces considérations. Elle est ordonnée par deux grands axes homologues de niveaux différents. L'opposition «socialisation maternelle» vs «socialisation paternelle-maternelle», corrélat de l'opposition «gouvernement maternel» vs «autorité paternelle» du schéma de la population à l'échelle de la forme familiale s'articule avec l'opposition équilibrages «archéomodernes-milieux antéindustriels» vs salariat d'industrie» à l'échelle de la formation sociale.