6.2. logiques de différenciation à l'œuvre

6.2.1. les débuts dans l'emploi

Les enquêtées entrées en 2de de second cycle long représentent une population féminine d'un niveau de formation variant du niveau IV (sortie en terminale) au niveau II (diplôme de 2d cycle universitaire), arrivant majoritairement sur les marchés du travail entre 1980 et 1990, donc dans un contexte de crise économique structurelle. Le rapport salarial corrélé à l'équilibrage de "l'Etat de croissance" a commencé à se défaire au cours des années 1970. La fin du plein emploi rend visible la frontière entre les travailleurs stables et les autres, tracée jusqu'alors en pointillé 455 . On se propose de repérer empiriquement si les débuts dans l'emploi orientent vers l'occupation durable d'emploi(s) stable(s), vers des emplois intermittents, vers l'inactivité. On désigne par le termes de «débuts» l'étape de l'activité professionnelle qui succède à la formation initiale, et dont la fin est corrélée à un tournant, soit du parcours professionnel lui-même, soit de l'équilibrage de vie. La durée des «débuts» varie donc selon les cas. Le parti pris contraint à articuler des approches plurielles — rapport entre type d'emploi, mode de socialisation et titre scolaire; cosmos de rapports dans lequel l'activité professionnelle prend sens. On terminera l'étude sur un récapitulatif de la distribution dans les catégories d'«employé», d'«intermédiaire», de «cadre», et des situations en décalage avec l'embauche dans un emploi stable.

On a divisé l'ensemble des «débuts» (n=32) en trois sous-ensembles qu'on analysera tour à tour, les débuts modaux (n=18), les débuts incertains (n=9) et les débuts dans le travail social (n=5) 456

Notes
455.

Rappelons que dans le contexte de la société salariale, une frontière significative sépare les travailleurs stables des «travailleurs périphériques»."Constitués en majorité d'immigrés, de femmes et de jeunes sans qualification, (...) [ceux-ci] occupent les positions les plus pénibles et les plus précaires dans l'entreprise, ont les revenus les plus faibles et sont les moins bien couverts par les droits sociaux. Ils campent aux frontières de la société salariale davantage qu'ils n'y participent à part entière.", R. Castel (1995) p. 370, plus largement pp. 323-384.

456.

Cf. annexes, pp. 107-110. On a consulté les articles et ouvrages suivants : J. Verdès-Leroux, Le travail social, Editions de Minuit, Paris, 1978; L. Boltanski, "L'université, les entreprises et la multiplication des salariés bourgeois (1960-1975)", Actes de la recherche en sciences sociales, 34, sept. 1980; J. Affichard, "Quels emplois après l'école : la valeur des titres scolaires depuis 1973", Economie et Statistique, 134, juin 1981; "P. Clémenceau et M. de Virville, "Garçons et filles face à leur insertion professionnelle", Economie et Statistique, 134, juin 1981; C. Baudelot, R. Benoliel, H. Cukrowicz, R. Establet, Les étudiants, l'emploi, la crise, PCM, François Maspero, Paris, 1981; A. Desrosières, "La nouvelle nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles"; L. Thévenot, "Des cadres moyens aux professions intermédiaires", Données sociales, 1984; D. Bertaux, "L'indépendance, la délinquance et les deux salariats", Annales de Vaucresson, n° 26, 1987 ; M. Maruani, "Statut social et modes d'emploi", Revue française de sociologie, 30, 1989; C. Marry, I. Fournier-Mearelli et A. Kieffer, "Activités des jeunes femmes : héritages et transmissions", Economie et statistique, 283-284, 3/4 1995; M. Méron, Cl. Minni, "Des études à l'emploi : plus tard et plus difficilement qu'il y a vingt ans", Economie et statistique, 283-284, 3/4 1995; O. Marchand, "Salariat et non-salariat dans une perspective historique", Economie et Statistique, 319-320, 1998; F. Audier, "La Fonction publique : un débouché majeur pour les plus diplômés", Economie et statistique, n° 304-305, 1997; C. Topalov, "Une révolution dans les représentations du travail, l'émergence de la catégorie statistique de «population active» au XIXe siècle en France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis", Revue française de sociologie, 49-3, 1999; G. Mauger, "Les politiques d'insertion, Une contribution paradoxale à la déstabilisation du marché du travail", Actes de la Recherche en sciences sociales, 136-137, mars 2001; R. Castel, L'insécurité sociale, Seuil, Paris, 2003.