Les missionnaires, le colonat administratif et le colonat privé du Gabon entre 1905 et 1945 étaient très majoritairement européen. De ce fait, ils entretenaient des relations, de compatriotes fait d'estime réciproques mais tumultueuses parfois.
Les indigènes étaient en relation avec les colonats et les missionnaires, selon leurs secteurs d'activités. En tant que chrétien ils étaient au contact des missionnaires et s'ils travaillaient dans le secteur privé ils connaissaient le colonat privé qui les employait très souvent comme main d'oeuvre. Mais ils connaissaient surtout le colonat administratif car il commandait, emprisonnait, employait aussi.
Lors des contacts avec les agents de l'administration, les forestiers et les commerçants les indigènes prenaient de mauvaises habitudes. Elles étaient dénoncées par les missionnaires au point de rendre tumultueuses les relations entre les missionnaires et les autres européens de la colonie.
Les missionnaires reprochaient aux autres Européens de ne pas montrer le bon exemple. Certains "Blancs" du Gabon, aux dires des missionnaires vivaient dans la débauche, n’assistaient pas à la messe... L'intensification du commerce amenait les indigènes à copier les vices des Européens comme l'ivresse. Les missionnaires reprochaient surtout au colonat privé de détruire la cellule familiale car beaucoup d'indigènes, surtout les hommes, quittaient leur famille pour aller travailler chez les " Blancs. ".
Par conséquent les missionnaires avaient du mal à évangéliser par l’exemple et le comportement car l’attitude de leur compatriote était décourageante. Les indigènes préféraient la compagnie des colons privés qui offraient plus de facilités matérielles. Cette lutte entre bénfices matériels et spirituels se traduisait par des débats sans fin entre les colons, administratifs ou privés d'une part, et les missionnaires. Cela entraînait sur le terrain de mauvaises relations personnelles entre certains missionnaires et certains colons privés.
Selon les témoignages des Pères Clair, Penon, Bleny, Klerjean, Pouchet, Coullette, Sillard, Delegare, Lamaze et Coursol 267 , les missionnaires ayant exercé au Gabon, entre 1905 et 1945, n'avaient pas vécu la même situation que les missionnaires de la période précédente (1844-1905). D'après ces témoignages, les marins en service au Gabon avaient « quelques souvenirs de leurs devoirs de catholique » et un sens aigu de leurs devoirs de Français. Les uns et les autres, avant 1905, travaillaient à une œuvre qu'ils estimaient commune. Mais après 1905, les conflits se multiplièrent à cause du pouvoir politique et civil représenté par l'administration ; mais aussi à cause de l'exploitation économique ayant débuté dans la colonie ; enfin à cause du colonat administratif et privé liés à une République anti-cléricale.
Il y avait chez certains prêtres de l'amertume à cause du comportement de certains de leurs compatriotes qui avaient introduit la Franc-maçonnerie chez les indigènes. Certains " Blancs", du colonat administratif et privé, au contraire se plaignaient de l'intransigeance des missionnaires. Personne ne voulait reconnaître ses torts malgré les instructions des supérieurs hiérarchiques notamment les recommandations, les ordres et les directives. 268 .
De temps à autre, les relations personnelles entre les missionnaires et les autres Européens étaient cependant caractérisées par une collaboration efficace. Certains missionnaires entretenaient même des relations personnelles avec les hommes reputés anticléricaux en France, c'était le cas du "Père Sillard ami de M Combes, du Père Lamaze ami de M Lebel 269 ".
Archives CSSP, Fonds Pouchet, Dossier B, Témoignages des Pères du Gabon, arrivée après 1945
Archives CSSP, Boîte 271, Dossier A, Chemise V, Lettre circulaire de Mgr Tardy du 15 novembre 1927 sur l'attitude a adopté face au autres européens et sur la situation matérielle.
Père Gilles Sillard, entretiens du 3 mars 2000 à Chevilly Larue