La Mission du Gabon disparut institutionnellement, en 1958, à cause de la réorganisation du vicariat entreprise en 1947, puis en 1955. Mgr Adam devint ainsi successivement Vicaire apostolique de Libreville, (1947-1955) Evêque du Gabon, (1955-1958) et Archevêque de Libreville à partir de 1958.
Malgré leur petit nombre, quelques membres du clergé indigène gabonais, à partir de 1947, entamèrent une décantation du message évangélique missionnaire classique, pour écarter tout ce qui était proprement et typiquement européen, en cherchant ce qui pouvait constituer l'essence même et l'originalité du christianisme au Gabon. Cette tentative de décantation, discrète, se fit, dans un premier temps, de 1947 à 1963, sans compter sur l'appui des dispositions du Concile Vatican II dont les répercussions ne furent sensibles, au Gabon, qu'après 1970.
Au moment de la fin institutionnelle de la Mission au Gabon 1958, les missionnaires européens sur le terrain n'étaient pas psychologiquement et pratiquement préparés à laisser leur place à leurs collègues gabonais.
Dans l’immédiat, les missionnaires furent incapables d’appliquer la disposition publiée en 1957 par Pie XII, dans son Encyclique Fidei Donum, dans laquelle il demandait aux missionnaires (européens) de se considérer comme les auxiliaires du clergé local 292 . Au contraire les prêtres, religieux, religieuses et laïcs missionnaires restèrent majoritaires dans la nouvelle Eglise. Cela explique le retard avec lequel on confia l'Archidiocèse de Libreville à un Gabonais en 1969, un peu plus de dix ans après sa création en 1958.
Le premier évêque gabonais, ordonné en 1961, resta longtemps un évêque auxiliaire, de 1961 à 1969. La volonté des missionnaires sur le terrain de ne pas abandonner toutes leurs prérogatives, était perceptible dans leurs correspondances. Le Père Auguste Gervain, arrivé au Gabon en 1945 écrivait à ses supérieures, en France:
‘« Nous sommes à un tournant de l'Histoire. Hier, ici, au Gabon, nous étions chez nous, aujourd'hui nous sommes des étrangers, au service des africains. Hier, nous commandions en maîtres. Aujourd'hui nous devons nous contenter de conseiller, aider, mettre le plus possible les africains à notre place. Je me demande si tous les Pères sauront faire le rétablissement en toute loyauté et sans arrière pensée, en toute charité et en prenant garde de ne pas se réjouir des échecs » 293 ’Cette lettre suggère que certains Pères, surtout ceux arrivés au moment du débat sur la mutation de la Mission, étaient réfractaires à l'idée de transmettre leurs pouvoirs au clergé indigène. Cependant, ayant compris que le mouvement était irréversible, les missionnaires du Gabon demandèrent à la maison Mère de hâter le processus avant d'être contraints par la force 294 . La transmission des pouvoirs se fit donc très lentement.
Au Gabon, les missionnaires craignaient que les œuvres ne soient la proie de graves difficultés financières car la manne provenant de l'Etat colonial allait disparaître et tout ce qui appartenait à la Mission devenait propriété de la jeune Eglise. Aussi le Père Gervain proposait-il, pour pérenniser la Congrégation du Saint-Esprit au Gabon, la construction à Libreville d'une maison appartenant à la Congrégation 295 . Cette proposition était assez surprenante mais révélatrice de l'état d'esprit d’une partie des missionnaires qui visiblement n’entendaient pas quitter définitivement ce pays avant la fin intégrale de leur action.
De nos jours, cette maison 296 existe toujours et permet à la Congrégation d'affirmer son ambition de demeurer un maillon capital de l'Eglise catholique au Gabon.
L'une des raisons principales pour laquelle les missionnaires spiritains ne voulaient pas partir du Gabon était que le catholicisme ne pouvait survivre dans ce pays à cause de la relative faiblesse des vocations indigènes. Il convenait donc pour les missionnaires de rester sur place et de se mettre au service de la jeune Eglise.
THEO, Nouvelle encyclopédie catholique, Droguet & Ardant/ Fayard, Paris 1989, Op. Cit. p. 484.
Archives CSSP, Boîte 351 Dossier B, Chemise 3, Lettre du Père Gervain du 25 juillet 1960.
Archives CSSP, Boîte 351 Dossier B, Lettre du Père Gervain du 22 septembre 1960.
Archives CSSP, Boîte 351 Dossier B, Lettre du Père Gervain, Ibid
Il s'agit de la Maison Libermann, siège des Spiritains au Gabon. Elle est située sur le Boulevard Bessieux à proximité de la Nonciature Apostolique, en face du Petit Séminaire Saint-Jeanet de l'école Maternelle des sœurs bleues de l'Immaculée de Castres, non loin de la Gare Routière.