 Mgr François Ndong en 1961

L’ordination épiscopale de l’abbé François Ndong intervint le 2 juillet 1961 321 à Libreville et elle mit un terme au cycle des évêques missionnaires spiritains. Au moment de son sacre, Mgr François Ndong était le "1er évêque africain d'Afrique centrale" 322 . Cette ordination fut perçue comme la preuve de la maturité religieuse souhaitée par les laïcs, quelques hommes politiques, par certains clercs indigènes et surtout par les missionnaires eux mêmes.

Photo 6: Mgr François Ndong et Mgr jean Jérôme Adam en 1961
Photo 6: Mgr François Ndong et Mgr jean Jérôme Adam en 1961

Source: DOCOPM Dossier sur le Gabon

Sur cette photo 323 : Mgr Jean Jérôme Adam, archevêque de Libreville et son auxiliaire, Mgr François Ndong, premier évêque d'origine gabonaise. Bien avant l'ordination de Mgr François Ndong, les chrétiens du Gabon s'intéressaient à la nomination des évêques.

Déjà, en janvier 1947, après la mort de Mgr Tardy, Jean Hilaire Aubame, grande figure politique du Gabon, alors député à l'Assemblée Nationale Française, avait écrit au supérieur de la congrégation du Saint-Esprit, Mgr Le Hunsec à Paris. C'était pour demander la nomination de Marcel Lefebvre 324 comme Vicaire Apostolique. " Les catholiques gabonais soucieux des problèmes spirituels de leurs pays et certains d'exprimer l'opinion de la masse " avaient fait des pétitions et demandé à Jean Hilaire Aubame de rédiger cette correspondance 325 .

A la fin des années 1950, au moment de nommer un Gabonais comme évêque, les regards s'étaient tournés vers l'abbé François Ndong. Il avait été choisi parmi les plus dociles et les plus anciens. Le Père Gilles Sillard parle même d'une programmation: "… après divers ministères (l'abbé François Ndong) est programmé par la hiérarchie pour être le premier gabonais…sacré évêque. " 326

Originaire de la Région de l'Estuaire, François Ndong était né vers 1906 à Nzamaligue (Dieu laissa) près de la mission Saint Paul de Donguila où il reçu sa première éducation religieuse et apprit le métier de menuisier charpentier, de magasinier et boulanger. Il fut baptisé le 18 mars 1923 à Donguila d'où naîtra sa vocation.

Elève à la mission Sainte-Marie de Libreville, le jeune François Ndong entra au séminaire en 1925 puis devint prêtre, ordonné le 17 avril 1938 en même temps que l'abbé Thomas Ossima. Il servit successivement à Ndjolé jusqu'en 1941 puis dans les missions de Franceville, Lastourville et Donguila où il resta sept ans, à Bitam avant d'être nommé supérieur de la mission de Mitzic en 1951 jusqu'à sa nomination comme évêque 327 .

Son accession à l'Episcopat, fut ressentie, dans l’ensemble, comme un succès pour tous les catholiques, davantage encore dans sa région (l'Estuaire) et dans son ethnie (Fang). Sa nomination suscita tout de même des divergences.. Une partie de l’opinion, tirant un parallèle avec la décolonisation, considéra que François Ndong avait été nommé parce qu'il était décidé à assurer la transition dans l’entente avec les spiritains. Ce point de vue était partagé par certains membres du clergé indigène qui croyaient pouvoir remplir mieux que François Ndong cette fonction. Cette nomination a également souffert d'un sentiment de favoritisme, de la part de Mgr Marcel Lefebvre que l'abbé François Ndong, dans sa jeunesse, avait admiré à la mission Sainte-Marie. C'est donc sans surprise qu’on verra que Mgr Ndong encourager discrètement l'installation des Lefévbristes au Gabon à la fin des années 1960.

Nommé évêque titulaire de Rafanée le 15 novembre 1960, après son ordination épiscopale, il occupa d'abord la fonction d'évêque auxiliaire de Libreville entre 1961 et 1969. Il fut par la suite nommé à la tête du Diocèse d'Oyem à sa création. Il occupa cette fonction jusqu'en 1982 avant de prendre sa retraite à Libreville où il décéda en 1989. En tant que premier évêque gabonais, il fut symboliquement inhumé près des trois Vicaires Apostoliques décédés aux Gabon devant l'ancienne église cathédrale de Sainte Marie 328 .

Notes
321.

Archives CSSP, Boite 351, Dossier A, sacre de François Ndong, « Relatio Annualis » de 1961

322.

DOCSSP et DOCOPM, Titre du Journal La Croix du 5 mars 1961.

323.

DOCOPM, Dossier sur le Gabon N° 347, La formation religieuse des indigènes " Dans un cadre de verdure et de fleurs, cent ans de séminaire! ", (1963)

324.

Il est connu au Gabon. Né le 29 novembre 1905 à Tourcoing (Nord), Mgr Marcel Lefebvre fait ses études ecclésiastiques au séminaire français à Rome et il est ordonné prêtre pour le diocèse de Lille le 21 septembre 1929. Le cardinal Liénart le nomme vicaire à la paroisse de La Madeleine, près de Lille. Il entre dans la Congrégation des Pères du Saint-Esprit en 1931 et il y fait sa première profession le 8 septembre 1932 et sa profession perpétuelle le 28 septembre 1935.

Docteur en philosophie et en théologie, il est d'abord nommé au Gabon où il exerce différentes responsabilités de 1932 à 1945. Il est professeur au séminaire inter vicarial de Libreville (1932-1934) dont il devient ensuite le supérieur (1934-1938), puis directeur de la mission à Ndjolé (1938-1939), supérieur de la paroisse Sainte-Marie à Libreville (19391940), directeur de la mission à Donguila (1940-1942) et à Lambaréné (1942-1945). Il rentre ensuite en France et il est directeur et supérieur du scolasticat de philosophie à Mortain (1945-1947).

Le 12 juin 1947, il est nommé vicaire apostolique à Dakar et évêque titulaire d'Antedone, et il reçoit la consécration épiscopale le 18 septembre suivant. Le 22 septembre 1948, il est nommé archevêque titulaire d'Arcadiapoli di Europa et premier archevêque de Dakar, tout en demeurant délégué apostolique pour l'Afrique française. Le 23 janvier 1962, il est nommé par Jean XXIII évêque de Tulle et il conserve à titre personnel son titre d'archevêque.

Il est élu supérieur général de la Congrégation des Pères du Saint-Esprit en juillet 1962 et il renonce au siège de Tulle le 7 août 1962. Il reçoit alors pour siège titulaire l'archevêché de Sinnadia di Frigia. Après sa démission, en septembre 1968, de sa fonction de supérieur général, il fonde à Fribourg, Suisse, la Fraternité sacerdotale internationale Saint Pie X qui reçoit son décret d'érection de la part de l'évêque du lieu, Mgr Charrière, en novembre 1970. Les actes et les concessions accordés par ce décret seront retirés par Mgr Mamie le 6 mai 1975 en raison de l'opposition de Mgr Lefebvre au Concile Vatican II et aux réformes qui s'y rattachent. Le 22 juillet 1976, il est frappé par Paul VI de la "suspense a divinis" qui lui interdit l'exercice de tout pouvoir découlant de l'épiscopat, du presbytérat et du diaconat. Malgré cette mesure disciplinaire, des liens ont toutefois été maintenus entre Mgr Lefebvre et le Saint-Siège.

Paul VI lui a écrit plusieurs lettres (cf. Documentation catholique, lire DC 1976, n° 1689, p. 33-34; n° 1705, p. 810; n° 1710, p. 1056-1061; 1977, n° 1716, p. 254. Voir aussi la lettre de Paul VI au cardinal Villot (DC 1976, n° 1695, p. 305). Jean-Paul II l'a reçu au début de son pontificat le18 novembre 1978 (DC 1079, n° 1755, p. 47-48). Le 14 juillet et le 18 novembre 1987, il a été reçu par le cardinal Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi (DC 1987, n° 1946, p. 881; n° 1951, p. 1147), qui a; d'autre part, informé, le 29 octobre 1987, les Pères du Synode de la nomination par le Pape du cardinal Gagnon comme visiteur apostolique de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X et des oeuvres qui s'y rattachent (DC 1987, N° 1951, p. 1147). Nous parlons aussi de Mgr Lefebvre dans le Chapitre 4 à propos de la Fraternité Saint Pie X.

325.

Archives CSSP, Boîte 271, Dossier A, chemise 4, Lettre de Jean Hilaire Aubame à Mgr Le Hunsec supérieur des Spiritains, 11 avril 1947. Cette Lettre avait été rédigé suite à l'exposé verbal qu'il avait fait le 2 avril à Mgr Le Hunsec.

326.

" Son Excellence Monseigneur François Ndong Odene Ndoutoume ethnie: Fang, tribu: Essissong. "Document écrit remit par le Père Sillard à la suite de nos entretiens de Mars 2000 à Chevilly. Il s'agit d'une brève biographie de François et d'une présentation de ses rapports avec Léon Mba. Lors de ces entretiens le Père Sillard, nous a donné d’autres documents manuscrits et dactylographiés.

327.

DOCATGAB, Jacques Hubert, Album souvenir, Op. Cit. p.18

328.

Les trois Vicaires Apostoliques décédés au Gabon sont: Mgr Bessieux en 1876, Mgr Le Berre en 1891 et Mgr Martrou en 1925.