1- Les causes et les axes d'implantations des premières paroisses.

La fondation des premières paroisses au Gabon a eu lieu en 1960, deux ans après la création des deux premiers diocèses. Ces fondations s’inscrivent à la suite de la fin institutionnelle de la Mission.

 Les causes : urbanisation et mouvement de la population

Les causes de l'implantation des premières paroisses étaient presque similaires à celles qui avaient commandé la fondation des dernières missions, à savoir l'urbanisation et le mouvement de la population des villages vers les centres urbains à causes des activités économiques et administratives. Après 1958, tous les centres urbains devenaient des zones d'implantation de paroisses, notamment à Libreville et Port-Gentil qui étaient avant 1945 les principales villes du Gabon. Mais dès le début des années 1950 d'autres centres allaient se développer, soit à cause de l'activité économique minière et pétrolière, comme Mouanda Mounana et Gamba, soit à cause de la transformation de certains grands regroupements en centres administratifs importants et en grands centres de commerce: le cas de Fougamou, de Mbigou. D'autres centres administratifs étaient devenus des centres de passage obligatoire pour se rendre à l'intérieur du pays comme Ntoum, Oyem, Bitam, Franceville et Mouila.

Une autre raison de l'implantation et de la transformation des anciennes missions en paroisses avait été la réorganisation administrative du pays à partir de 1960. La hiérarchie catholique cherchait désormais à ce que chaque centre administratif important ait une paroisse à proximité des populations au centre de la ville.

Dans la quasi totalité des villes du Gabon après l'indépendance, ou quelques années auparavant en ce qui concerne Libreville et Port-Gentil, on se trouvait en face de deux villes bien différentes, juxtaposées et se compénétrant assez peu, mais portant un même nom sur le plan administratif: La ville blanche "moderne " avec une voirie assez bien organisée et des édifices obéissant aux lois,et aux principes de l'urbanisme colonial; la ville noire " archaïque " formée de quartiers correspondants à divers groupes ethniques en ce qui concerne les agglomérations et de divers clans en ce qui concerne les villes mono ethnique surtout dans le Nord du pays.

Les quartiers de la « ville noire », insalubre, étaient démesurément gonflés: entassements désordonnés des maisons disparates dans lesquelles la population grouillait et vivait dans des conditions morales déficientes. Ce qui compliquait le travail d’évangélisation 367 .

Les échos d'une vie meilleure à la ville qui parvenaient dans les coins perdus et les villages les plus reculés favorisaient un exode rural massif. Les Gabonais accouraient donc des villages vers les centres importants en espérant trouver un travail facile et rémunérateur, tout en échappant aux servitudes du village.

Des espoirs qui, malheureusement, n'étaient pas réalisés. L'abondance de la main d'œuvre et sa faible qualification ont eu pour conséquence les bas salaires pour ceux qui trouvaient à s'employer et le chômage pour les autres. Malgré ces déboires, bien rares étaient ceux qui retournaient dans les villages et s'arrachaient à la séduction de la ville.

C'était surtout les hommes et les jeunes qui allaient tenter leur chance en ville, notamment les anciens élèves des écoles missionnaires de villages ainsi que les évolués qui étaient incapables de retrouver leur place dans l'économie rurale traditionnelle. Déçus, aigris, désaxés, oisifs ou astreints à des besognes sans attrait ils étaient parfois contraints à toutes les compensations faciles 368 .

C'est pourquoi devant cette situation la hiérarchie catholique au Gabon avait changé sa politique d'implantation par la création des paroisses dans ces centres urbains et la transformation ou le déplacement d'anciennes missions rurales 369 .

Notes
367.

Lassere (G), Au Gabon Libreville et sa Région, Armand Colin, Paris, 1958,346p.

368.

Bouchaud (J.), L'Eglise en Afrique noire, Op. Cit. pp. 46 et 47.

369.

Père Gilles Sillard Entretiens de mois de Mars 2000 à Chevilly-Larue