 Le diocèse d'Oyem.

Le troisième diocèse de l'Eglise catholique du Gabon est celui d'Oyem après Libreville et Mouilla créés en 1958. Le diocèse septentrional d'Oyem était né suite à la division de l'Archidiocèse de Libreville. Créé le 29 mai 1969, et d'une superficie de 84.540 Km2, le diocèse d'Oyem regroupait les régions du Woleu-Ntem et de l'Ogooué Ivindo au Nord et Nord-Est du pays.

Le diocèse d’Oyem était limité au Nord par la République du Cameroun à l'Est par la République du Congo au Nord-ouest par la Guinée-Equatoriale à l'ouest par la région de l'Estuaire et au Sud par les régions du Moyen Ogooué, de l'Ogooué-Lolo et le Haut-Ogooué. A sa création, en 1969, pour une population totale de 133.000 habitants, le diocèse comptait 68.000 catholiques et en 1995, il comptait 123.000 catholiques pour 218.000 habitants. Ce diocèse était, entre 1969 et 1995, toute proportion gardée par rapport à l'archidiocèse, le plus christianisé et le plus « catholique » du Gabon 903 .

Avec une population essentiellement rurale et agricole, le diocèse d'Oyem connaît aussi l'influence de l'Eglise Evangélique du Gabon 904 et de l'Islam avec une forte communauté Haoussa venant du Cameroun et du Nigeria 905 . Ce diocèse bénéficir presque d'une unité linguistique et culturelle puisque la population était essentiellement Fang surtout dans le Woleu-Ntem où la population originaire est 100% Fang. Mais on note aussi la présence d'autres ethnies comme les Kota et les Kélé dans la zone de Mékambo, Makokou et Bouée dans la région de l'Ogooué Ivindo.

En 1993, par exemple, la région du Woleu-Ntem avec une population de 97.000 habitants comptait 83.000 Fang et la région de l'Ogooué Ivindo sur 49.000 habitants comptait 11.500 Fang 906 . A cause de cette quasi unité linguistique et culturelle le diocèse d'Oyem constituait un véritable champ d'expérimentation de l'inculturation de l'évangile et de la pratique religieuse à travers le réseau des catéchistes ruraux. Dans la province du Woleu-Ntem, par exemple, chaque village ou presque comptait après 1969 un catéchiste et une chapelle pour les différents offices.

Photo 21 : Mgr François Ndong. Evêque d'Oyem 1969-1982
Photo 21 : Mgr François Ndong. Evêque d'Oyem 1969-1982

Source : Album souvenir du 150ème anniversaire

La direction du diocèse d’Oyem, en 1969, fut confiée à Mgr François Ndong, évêque auxiliaire de Libreville. Mgr François Ndong avait, non seulement, longtemps servi dans le Nord du pays comme prêtre, mais il avait aussi exercé son ministère dans cette partie du Gabon lorsqu’il était évêque auxiliaire de Libreville. Il eut donc la charge d’un diocèse qu’il connaissait avant sa création. 907 .

Pendant plus de dix ans de 1969 à 1982, Mgr François Ndong s'attela à la modernisation de ce diocèse. Non sans tenir compte de la forte présence des missionnaires. Il voulut faire du diocèse d'Oyem, « un diocèse où tous sont responsables de la foi. » Il continua d'assurer le fonctionnement du diocèse, comme dans une Mission, avec tous ses aspects liés à l'œuvre d'évangélisation, éducative et sanitaire. Une de ses principales préoccupations à la tête du diocèse était de faire de « l'évangile un phare pour la culture africaine » 908 .

A l'aube de sa retraite, Mgr François Ndong, âgé de 74 ans en 1980, avait préparé sa succession en promouvant l'ordination épiscopale d'un fils originaire du diocèse 909 , le Père Basile Mvé Engone. La cérémonie d’ordination épiscopale eut lieu, le 24 août 1980, au cours d'une grande cérémonie au Stade municipale d'Akoakam à Oyem. Ce dernier, nommé évêque coadjuteur remplaça Mgr François Ndong le 23 août 1982 910 .

Mgr Basile Mvé, qui eut la charge du diocèse jusqu'en 1998, était en 1980, à 39 ans, un des plus jeunes évêques d'Afrique. Né le 30 mai 1941 à Nkomelene, non loin d'Oyem, dans le canton Woleu, il a été profès salésien et il fit ses études sacerdotales au séminaire de Lubumbashi dans l'ex Zaïre, à Dormans en France et à Rome. Il a été ordonné prêtre le 29 juin 1973 dans la même congrégation 911 . Il n'avait presque pas servi dans son diocèse. Après son ordination il fut affecté au noviciat des salésiens à Pointe Noire au Congo. A sa son retour au Gabon il enseigna au Petit séminaire Saint Jean de Libreville. En 1980, au moment de sa nomination, il était aumônier national de la JOC, responsable des émissions religieuses à la RTG (Radio Télévision Gabonaise) et il suivait des cours à l'Ecole Normale supérieure de Libreville 912 .

Durant ses seize années à la tête du diocèse d'Oyem, Mgr Basile Mvé agit dans les mêmes domaines que son prédécesseur tout en ouvrant de nouvelles pistes pastorales comme celle des jeunes. Il s'attaqua aux problèmes cruciaux du moment comme ceux de l'Eglise et la culture africaine, la lutte contre les sectes.

Mais Mgr Basile Mvé fit surtout face à une grave crise de vocations, que, du reste, connaissaient tous les diocèses du pays 913 . En effet, il n'a célébré une ordination sacerdotale, en tant qu'évêque du diocèse d'Oyem, que le 2 mai 1993 en ordonnant l'abbé Jean René Mezui, soit 14 ans après les abbés Serge Pasquier Nzué et Abel Eyeghe 914 .

Notes
903.

DOCOPM, Annuaire de l'Eglise catholique 1998. Op. Cit. pp. 434 et 435.

904.

Au Gabon il y a deux Eglises Evangéliques. L'Eglise Evangélique du Gabon implantée surtout dans le Nord du pays dans les régions de l'Ogooué Maritime, l'Estuaire, le Moyen Ogooué, l'Ogooué Ivindo et surtout le Woleu Ntem qui compte deux régions synodales. Cette Eglise Evangélique du Gabon dépendait de la SMEP jusqu'a son indépendance en 1960 quand les présidents furent des nationaux. Il y a aussi l'Eglise Evangélique du Sud Gabon plus connu sous le nom de l'Eglise de l'Alliance chrétienne dont le siège était à Mouila.

905.

En dehors de Libreville avec sa forte affluence étrangère ouest africaine, le Nord du Gabon dans la région du Woleu Ntem connaît une forte présence musulmane à cause de l'immigration haoussa. De nombreuses familles haoussa, musulmanes, sont installées au Gabon depuis le milieu du XXè siècle. Dans le cadre d'une étude sur les frontières religieuses au Gabon on pourrait situer la présence islamique traditionnelle ou ancienne à Bitam et Oyem.

906.

Ministère de la planification, Principaux résultats du recensement, 1993.

907.

Nous avons dressé une brève biographie de Mgr François Ndong dans le chapitre I en sa qualité de premier évêque gabonais.

908.

DOCOPM, Dossier sur le Gabon N° 347, interview de Mgr François Ndong, évêque d'Oyem dans le journal La Croix du 30 décembre 1979.

909.

C'est le sentiment des chrétiens du Woleu-Ntem qui pensent que la nomination de Mgr Basile Mvé est liée à deux aspects: la pression populaire et le rôle de Mgr François Ndong. Témoignages oraux, entretiens collectifs du 6 septembre 2002 à Oyem. Une chose est certaine au Gabon d'après l'opinion, la nomination des évêques est quelque chose de complexe.

910.

DOCATGAB, Jacques Hubert, Album souvenir du 150 ème Anniversaire, 1994.

911.

DOCATGAB, Jacques Hubert, Album souvenir…, Ibid.

912.

DOCOPM, voir aussi DOCGAB, " Etre évêque en 1980" interview de Mgr Basile Mvé par Philippe Essomba, dans le journal BINGO, n° 334 de novembre 1980.

913.

DOCOPM, Dossier 347, « Une Eglise pour construire et planter », interview de Mgr Basile Mvé, dans Don Bosco aujourd’hui, N° de novembre et décembre 1985.

914.

DOCATGAB, Jacques Hubert, Album souvenir du 150 ème , 1994.