 Le choc pétrolier en 1973. Un faux départ?

Le décollage économique qui a soutenu le régime de la Rénovation et le parti unique a débuté en 1973. Ce décollage économique est lié au choc pétrolier. Du fait de la politique des prix pratiquée par l'OPEP, le pétrole du Gabon devint rentable pour le pays.

En 1969, en effet, malgré une production toujours croissante depuis 1957, la barre des 5 millions de tonnes n'était pas encore atteinte et le prix du baril pétrole demeurait très faible. En 1973, le prix du pétrole explose à la suite de la Guerre du Kippour. L’effet immédiat fut l'adhésion du Gabon à l'OPEP en 1974. L’augmentation du prix du baril de pétrole sur la scène mondiale, entre 1973 et 1974, a eu pour conséquence l'augmentation de la production gabonaise qui connut un prodigieux développement. Par exemple, alors qu’elle était de 5 millions en 1970, la production pétrolière gabonaise atteignit 10 millions de tonnes en 1975, pour les dépasser dès 1977 ¹¹²⁴ .

Les recettes pétrolières ont eu pour conséquence, à leur tour, l'augmentation du budget de l'Etat. En l'espace de 4 ans, le budget du Gabon fut plus que sextuplé, passant de 37 milliards en 1973 à 228 milliards en 1977 ¹¹²⁵ . Cette hausse permettait aux autorités gabonaises de réaliser des « projets ambitieux ».

Les points de vue sont partagés. Pour les autorités politiques du régime de la Rénovation sous le parti unique, dont la tache essentielle était le développement économique ¹¹²⁶ , il s'agissait d'une politique de grands travaux dont la finalité était le développement intégral du Gabon. Mais pour les opposants au régime, elle ressemblait à une folie des grandeurs, faute de tenir compte des prescriptions des institutions monétaires internationales et des bailleurs de fonds mondiaux.

« Les projets ambitieux » du régime de la Rénovation portaient sur la construction des ports en eau profonde et minéralier d'Owendo, dans la banlieue de Libreville, sur le barrage hydro électrique de Kinguélé et plusieurs autres projets. Le plus ambitieux des projets fut la construction d'un chemin de fer reliant Libreville et Franceville.

Sur ce projet particulièrement, les témoignages attestent que les institutions monétaires internationales s'étaient opposées au projet mais le régime de la Rénovation voulut à tout prix réalisé ce projet car il visait le développement du pays. Il était aussi l’accomplissement d’un rêve du Président Léon Mba qui l’avait initié. Une phrase du Président Albert Bernard Bongo, est restée célèbre et ancrée dans la mémoire des Gabonais : « Avec ou sans Banque mondiale, le Transgabonais se fera… même s’il faut pactiser avec le diable » ¹¹²⁷ .

L’ensemble de ces projets était présenté, au moment des inaugurations, comme étant l’œuvre du parti unique PDG et du régime de la Rénovation. Tous ces travaux virent le jour grâce au soutien extérieur. En effet, le régime de la Rénovation favorisait intensément l’investissement de capitaux étrangers ¹¹²⁸ .

A côté de ces projets ambitieux qui passaient pour des signes de progrès et d’industrialisation, l’Etat entreprit la construction d’hôpitaux, d’écoles, d’équipements sportifs dans tout le pays, surtout à Libreville. La capitale gabonaise devint en quelques années une métropole internationale, attirant les investisseurs du monde entier. Sur un plan purement interne, le niveau de vie moyen de la population s’élevait donnant l’impression d’un véritable développement social ¹¹²⁹ .