● Paul Mba, après les événements de Makokou, entre 1973 et 1981.

Sorti clandestinement du Gabon, le Père Paul Mba se retrouva à Yaoundé au Cameroun où il fut accueilli par ses confrères spiritains. Le nonce apostolique pour l’Afrique centrale, donc pour le Gabon. Mgr Jean Jadot fut aussitôt au courant de sa présence dans la capitale camerounaise. C’est ce dernier qui, au cours d’une audience accordée par le Président Bongo en mars 1973, vint révéler la présence du Père Paul Mba à Yaoundé.

« M. le Président, est-ce que vous ne pouvez pas désamorcer la situation avec le Père Paul Mba, en lui offrant la possibilité de regagner le pays afin d’exercer ? » 1347 . Une demande qui avait un goût de révélation car officiellement les autorités gabonaises étaient sans nouvelles du prêtre depuis février 1973.

A Yaoundé, le Père Paul Mba prit effectivement contact avec un certain Fochivé 1348 qui avait des relations avec le Président du Cameroun, Amadou Ahidjo. Fochivé était intervenu auprès du Président camerounais pour qu’il interviennent auprès d son homologue gabonais afin d’obtenir le retour du Père Mba. Fochivé avait aussi pris soin d’insister sur un aspect : la sécurité du Père. Le président Ahidjo mena donc des tractations avec beaucoup de tact auprès du président Bongo. En mai 1973, grâce à l’intervention de Fochivé et à la médiation de du Président Ahidjo, le Père Paul Mba put regagner le Gabon, non sans méfiance, car il avait en mémoire l’épisode de Germain Mba en 1971 1349 .

A son retour au Gabon, le Père Paul Mba fut affecté à la Paroisse Sainte Thérèse d’Angone, près d’Oyem, dans le diocèse du même nom. A la différence de Notre Dame des Victoires de Makokou c’était une paroisse rurale. Le Père Paul Mba parcourait donc les villages pour exercer son ministère. Dans ses sermons, comme à Makokou, la valeur de la liberté revenait sans cesse.

Son message, « Dieu appelle les hommes et les femmes libre. Pour répondre à cet appel, il faut être libre  1350 », rencontra un écho favorable auprès des populations rurales d’Oyem et cela d’autant plus que les événements de Makokou avaient de lui une personnalité.

Les sermons du Père Paul Mba imprégnèrent les couches sociales et chrétiennes d’Oyem. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la paroisse d’Angone vibra comme celle de Makokou. Mais les tracasseries en tout genre redoublèrent d’intensité, surtout l’espionnage et les menaces morales sur le Père. Aussi en 1976, le Père Paul Mba prit la décision d’aller poursuivre ses études en France 1351 .

Entre 1976 et 1981, le Père Paul Mba « s’exila » volontairement en France où il obtint de nombreux diplômes dans de nombreuses disciplines et langues orientales comme la théologie, l’exégèse, la linguistique, l’hébreu, l’araméen et le grec. Cet exil lui permit, entre 1976 et 1981, de tempérer son combat politique pour la liberté au Gabon.

Mais à la fin de l’année 1981, alors que sa congrégation lui avait trouvé une affectation à Brazzaville pour enseigner, et alors qu’il avait été aussi contacté par des autorités rectorales d’une université au Zaïre, éclata l’affaire du MORENA à Libreville. Cette affaire fut déterminante pour la suite du combat politique du clerc. En effet au lieu d’aller à Brazzaville, le Père Paul Mba choisit de rester à Paris pour faire la politique.

Notes
1347.

Essone Ndong, op.cit. p. 34.

1348.

Les documents que nous avons consultés n’indiquent pas la fonction et l’origine de Fochivé. On peut toutefois penser qu’il s’agit d’une personnalité importante pour qu’elle ait des contacts avec le Président camerounais

1349.

Témoignage du Père Paul Mba rapporté par Essone Ndong, op.cit. p. 36.

1350.

Témoignages oraux, entretiens de l’enquête de terrain à Oyem en septembre 2002. Ces pros sont les mêmes qu’il tenait au chrétiens de Makokou.

1351.

DOCGAB, DOCOPM,  Portrait de Paul Mba Abessole. « Les parcours sinueux d’un opposant dans l’âme » par Francis Kpatindé in Jeune Afrique N° 1563 du 12 au 18 décembre.