● La période missionnaire : 1844-1955

Durant cette période la Congrégation du Saint-Esprit évangélise, éduque et soigne les gabonais. Elle détient le monopole et dans ces domaines jusqu’en 1905 avant de se voir opposer par l’administration coloniale une relative concurrence jusqu’en 1955.

Sur le plan de l’évangélisation, la congrégation du Saint-Esprit construit des églises, ouvre des séminaires et catéchise les autochtones en prenant soin de convertir en premier « les souverains locaux ». Ce fut le cas dès 1844 avec la conversion des Roi Denis et Quaben qui entretenaient de très bonnes relations avec Mgr Bessieux. Cette entente cordiale favorisa la réussite de l’œuvre d’évangélisation au Gabon. Les missionnaires du Saint Esprit initièrent un contact pacifique avec les peuples autochtones qui déboucha sur un échange, même s’il fut aussi source de malentendus.

Dans l’ensemble le contact fut productif car, du point de vue des autochtones, les missionnaires spiritains étaient porteurs d’un message qui revendique une universalité capable de les intégrer dans un monde sans frontières. La volonté des spiritains au Gabon d’associer les autochtones à leur propre évangélisation est accélérée dès la fin du XIXè siècle par l’entremise des catéchistes indigènes qui en deviennent des piliers et des relais dans les zones éloignées.

Le discours des missionnaires est basé sur la conversion, le changement de religion et la lutte contre le paganisme. La crainte de l’enfer est un moyen de persuasion qui s’est avèré efficace. L’évangélisation donna des fruits puisque le nombre des chrétiens croît d’années en années. Grâce à l’action des missionnaires, le Gabon est devenu, au fil des ans, une terre profondément catholique malgré la présence d’autres groupes religieux et la résistance des religions traditionnelles. A la fin de la période missionnaire un Gabonais sur deux est catholique et l’Eglise est déjà implantée aux quatre coins du pays.

Sur le plan de l’éducation, les missionnaires sont les champions de l’instruction des Gabonais. Ils contribuent de manière réelle à l’introduction de la culture européenne, notamment dans les mœurs autochtones. L’éducation constitue, pendant cette période, la clé de voûte de la présence missionnaire au Gabon au point que l’œuvre d’évangélisation et d’éducation se confondent.

Pour légitimer leur présence, les missionnaires s’intéressèrent aussi à un autre domaine, mais moins fructueux, celui de la santé. Durant cette période, ils essaient de soigner les autochtones. Comparativement à l’évangélisation et l’éducation ce secteur n’a pas été florissant pour des raisons internes et externes : la réticence des indigènes, le manque de personnels et de médicaments. Dans l’ensemble, les missionnaires catholiques n’en faisaient pas un secteur prioritaire comme leur confrères protestants qui possédaient de grands centres de santé dans certaines localités, tel que l’hôpital Albert Schweitzer à Lambaréné.

Chronologiquement, l’Eglise missionnaire et la vie politique au Gabon connaissent des fortunes diverses. Après l’installation des missionnaires entre 1844 et 1880 et l’arrivée des marins, la période de l’impérialisme, entre 1880 et 1914 est marquée par le rejet de bâtir un Etat national dans un modèle missionnaire bien que ce ne fut pas un projet. Ce triomphe de l’impérialisme ouvre la voie à la colonisation. Les marins quittent le Gabon à la fin du XIXè siècle pour céder leur place à l’administration coloniale.

La période entre deux guerres, 1918-1940 est celle de la coexistence et de la fusion des projets coloniaux et missionnaires. Leur terrain d’entente est l’éducation des autochtones, fondement de la civilisation. La fin de la deuxième guerre mondiale en 1945 inaugure en revanche le ralliement de la Mission du Gabon à l’émancipation des Gabonais. Devant la montée des colons privés, peu soucieux des idées religieuses et, anticléricaux pour certains, les missionnaires soutiennent les autochtones. Mais ce soutien s’effectua avec des réserves dans la mesure ou l’émancipation risquait de jouer au profit du communisme, qui disposait de relais dans la colonie et, favorable à l’émancipation politique.

La fin de la période missionnaire au Gabon, en 1955, est marquée par la volonté de confier aux indigènes leurs Eglises alors que le mouvement de décolonisation conduit à l’indépendance politique. la période missionnaire se termina avec la création des premiers diocèses. D’abord en 1955 avec la création du diocèse du Gabon et surtout en 1958 avec la création de l’Archidiocèse de Libreville et du diocèse de Mouila.