●Le réveil de 1990-1995

Le réveil politique de l’Eglise à partir de 1990 est en grande partie liée à sa consolidation interne. Elle commence à sortir lentement des difficultés héritées de la Mission et à appliquer les résolutions du Concile Vatican II pour mieux intervenir dans la société gabonaise. La visite du Pape Jean Paul II n’est pas étrangère à ce renouveau. Elle contribue véritablement à promouvoir un engagement des chrétiens. Les autorités religieuses furent particulièrement confortées de sorte que leurs paroles et leurs actions furent désormais plus cohérentes. La Conférence Episcopale, créée en 1973, devient réalité pour les Gabonais en 1989. Pour la première fois, les évêques publient un document intitulé « Paroles d’Eglise » largement diffusé dans lequel ils s’adressent à tous les Gabonais et non plus aux seuls catholiques.

Cette nouvelle attitude de l’Eglise amène le Président de la République à demander à un évêque de présider la Conférence nationale sur la démocratie en 1990.

Lorsque débutent ces mutations politiques l’Eglise est mieux outillée et prête à l’épreuve. Son influence morale, mise à mal par la course aux biens matériels encouragés par le boom pétrolier dans les années 1970, est en partie restaurée quand surgissent les difficultés sociales et économiques des années 1980. Entre 1981 et 1989, l’Eglise apparaît même comme le porte parole des faibles confrontés aux difficultés sociales. La liberté syndicale étant limitée à cause du parti unique, elle dénonce certaines situations sociales qu’elle présente comme des « nuages à l’horizon ». En 1990, la lecture des « signes des temps » et sa vision de la société s’approfondit avec l’amorce des changements.

C’est au nom de ses qualités morales qu’elle est choisie pour guider les mutations démocratiques. Face aux événements politiques et sociaux, elle parle, exhorte les chrétiens et les Gabonais de bonne volonté. Mais elle ne résout pas totalement le problème de l’engagement politique de ses prêtres et des chrétiens.

A certains moments, devant ces mutations démocratiques, l’Eglise reste impuissante car les laïcs ne sont pas prêts à l’action politique directe à partir d’idées chrétiennes. Les laïcs ne disposent pas d’un parti politique, encore moins d’un syndicat. Les chrétiens continuent à militer à titre individuel et de manière disprsée.

Le réveil politique de 1990 marque la fin d’une tentative d’introduction de l’idéologie communiste à la grande joie de l’Eglise. L’Eglise se réjouit également de la mise ne place des institutions démocratiques après 1990 même si cela ne se passe sans heurts. Elle vit cette période avec prudence tout en renforçant ses relations avec l’Etat. Cette prudence est voulue et entretenue dans le but constant de ne pas se compromettre dans les difficultés politiques. Elle se caractérise par un discours théologique à contenu social inspiré des textes bibliques, pontificaux et épiscopaux. Mais il demeure inaccessible à beaucoup de Gabonais malgré sa iffusion plus large. D’ailleurs l’intervention de l’Eglise est alternativement récusée, selon les situations, par le pouvoir, par l’opposition, ou par le peuple, alors que son influence positive est reconnue par tous, même si on la juge souvent trop exigeante.